Santé publique France Mayotte a transmis ses derniers chiffres sur le VIH et les infections sexuellement transmissibles pour l’année 2023. Si le nombre de personnes diagnostiquées séropositives a légèrement baissé, ce fléchissement des indicateurs est à relativiser, compte-tenu du fait que Mayotte reste le deuxième département de France le plus touché par le VIH.
Une baisse très relative des indicateurs
Les épidémiologistes sont unanimes : si l’ensemble des indicateurs permettant de surveiller l’activité du VIH et des IST sur le territoire ont baissé en 2023 par rapport à l’année 2022, cette légère baisse est néanmoins à relativiser. « Mayotte est toujours en deuxième position derrière la Guyane en raison du nombre élevé de découvertes de séropositivité sur le territoire et du nombre de sérologies qui se sont révélées positives », commente Youssouf Hassani, Responsable de la Cellule Mayotte de Santé publique France.
« On ne connaît pas la part des tests rapides qui aboutissent à des sérologies »
Par ailleurs, si le nombre de sérologies positives au VIH a légèrement diminué, il ne traduit pas une exhaustivité parfaite du dépistage global du VIH réalisé sur l’île, compte tenu de l’importance des tests rapides de dépistage réalisés par les associations mahoraises. En 2023, 110 sérologies de dépistage du VIH ont été réalisées pour 1.000 habitants. En 2022, ce chiffre était de 114 pour 1.000 habitants. « Cette baisse est à relativiser car il y a une offre de dépistage relativement importante à Mayotte grâce aux associations qui font de nombreux tests rapides de dépistage. Cela baisse légèrement le niveau des sérologies. On ne connaît pas la part des tests rapides qui aboutissent à des sérologies. » Même chose pour le diagnostic dont les indicateurs sont également en baisse. En 2023, la proportion de sérologies positives a été estimé à 3,1 pour 1.000 sérologies réalisées, représentant une baisse de 24% par rapport à l’année 2022 (4,3 sérologies positives/1.000 réalisées). Néanmoins, les épidémiologistes souhaitent rester prudents : « Ce chiffre reste très élevé car Mayotte se situe juste derrière la Guyane, dont le taux de sérologies positives est le plus élevé de tous les départements (4,5 sérologies positives/1.000 réalisées).
Un nombre de séropositivité important
Par ailleurs, le nombre de découvertes de séropositivité au VIH était de 92 en 2023, soit 296 par million d’habitants. À titre de comparaison, en France hexagonale hors Île-de-France, ce taux était de 50 par million d’habitant. Mayotte reste le département français au taux le plus important concernant ces découvertes de séropositivité, après la Guyane, a fortiori si l’on rapporte ce taux au nombre d’habitants à Mayotte, équivalent à 320.901 habitants d’après les données de l’INSEE.
Plus de la moitié des personnes séropositives sont des femmes
En 2023, sur l’ensemble des personnes séropositives, 64% étaient des femmes. Pour Youssouf Hassani cela s’explique par le fait que le dépistage du VIH se réalise systématiquement dans le cadre d’une recherche ou d’un suivi de grossesse. En 2018-2022, 56% des personnes séropositives étaient des femmes. Parmi ces personnes séropositives, celles-ci sont majoritairement des personnes nées à l’étranger. 64% des personnes diagnostiqués positives au VIH viennent de Madagascar, des Comores, des Seychelles, et de l’île Maurice, contre 59,7% en 2022. 21,8% viennent de pays d’Afrique subsaharienne. En revanche, le nombre de personnes séropositives diminue au sein des personnes nées France. En 2023, elles représentaient 14%, contre 20% entre 2018 et 2022.
Le taux d’incidence calculé pour la première fois
l’enquête LaboVIH.
Afin d’estimer l’incidence à Mayotte, il a d’abord été nécessaire d’estimer la part des personnes nées à l’étranger qui ont été contaminées en France et exclure les personnes contaminées avant leur arrivée sur le territoire. Ainsi, l’incidence du VIH à Mayotte a été estimée à 37 en 2023, représentant un taux d’incidence rapporté à la population de 11,9 pour 100 000 habitants, équivalent au taux d’incidence en Île-de-France. Par ailleurs, le nombre de personnes vivant avec le VIH à Mayotte sans connaitre leur séropositivité, a été estimé à 139 pour l’année 2023. En 2023, 8 personnes ont été diagnostiqués au stade de sida, contre 15 en 2022. Sur ces personnes, cinq étaient des femmes et trois des hommes. Leur âge moyen était de 40 ans. D’après Santé publique France, seules trois de ces personnes avaient connaissance de leur séropositivité préalablement. Aucun n’avait bénéficié d’un traitement antirétroviral au moins 3 mois avant le sida.
Une surveillance efficace
Pour surveiller cette maladie sexuellement transmissible, les épidémiologistes et les laborantins travaillent main dans la main pour veiller au suivi des dépistages réalisés. Santé publique France se félicite de ce travail mutuel « qui fonctionne très bien » : « Concernant les déclarations obligatoires, les médecins et les biologistes nous rapportent tout. L’exhaustivité est de 100% », précise Youssouf Hassani.
Mathilde Hangard
