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En France, un enfant sur cinq se sent en insécurité 

D’octobre 2023 à mars 2024, des enfants et adolescents de 6 à 18 ans ont été invités à répondre à un questionnaire de l’UNICEF pour mesurer leurs sentiments en matière de pauvreté et d’exclusion sociale.

Aide-toi, le ciel t’aidera… Ou pas ! Le propos qui suit fait référence aux limites de cet adage, où les conditions de vie des enfants et des adolescents, sont intrinsèquement liées à leur environnement familial, affectif et matériel, où du fait de leur âge et/ou de leur dépendance aux adultes, les jeunes sont très vulnérables et perméables aux difficultés de la vie. Dans les Outre-mer, les jeunes n’ont pas les mêmes chances qu’en métropole. Après avoir interrogé à l’aide de questionnaires plus de 20.000 enfants et adolescents, âgés de 6 à 18 ans, entre octobre 2023 et mars 2024, l’UNICEF dresse un rapport alarmant sur les conditions de vie des mineurs en France. Les résultats de cette enquête sont édifiants. Les enfants et adolescents souffrent de profondes inégalités, d’insécurité, de rejet, dont les souffrances qui en émanent peuvent sinueusement les exclure de la société. 

Les enfants ignorent souvent qu’ils ont des droits 

De prime abord, c’est surtout le manque d’informations des mineurs sur leurs droits qui a interpellé l’UNICEF. 24,7% des jeunes déclarent ne jamais avoir entendu parler des droits de l’enfant et 43,5% d’entre eux estiment, à tort, que leurs droits sont conditionnés à la réalisation de devoirs. En 2016, le Défenseur des droits révélait qu’un jeune sur dix connaissait l’existence de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE). 

La pauvreté s’aggrave en France 

Mayotte, pauvreté, UNICEF, seuil de pauvreté,
Mayotte, quatre habitants sur dix vivent sous un seuil de pauvreté situé à 160 euros par mois

Durant l’année 2022, la pauvreté s’est aggravée sur l’ensemble du territoire national. Les autorités sociales ont estimé que 95% des personnes accueillies par le Secours Catholique vivaient sous le seuil de pauvreté, quand 74% d’entre elles vivaient sous le seuil de l’extrême pauvreté. « Cela représente une augmentation de trois points en un an. Ce qui montre que l’on accueille des publics de plus en plus pauvres. La pauvreté s’intensifie pour les ménages dans lesquels il y a une présence d’enfants. La pauvreté s’aggrave. Personne n’est épargné. », confient Aurélie Mercier, chargée de projets et de plaidoyer Solidarités familiales au Secours Catholique, et Mathilde Nugue, responsable du département Analyse des pauvretés et des territoires au Secours Catholique. Ces constats sont partagés par le SAMU social où « plus de la moitié des personnes hébergées sont des enfants », affirme Vanessa Benoit, directrice générale du Samu social de Paris. 

Les Outre-mer sont gangrénés par la précarité 

Sur le territoire national, ce sont les départements d’Outre-mer qui connaissent un taux particulièrement élevé de pauvreté. Elle peut être quinze fois plus élevée qu’en métropole, et les enfants en sont les victimes collatérales, comme sur le département de Mayotte, où un habitant sur deux a moins de 18 ans. Sur le 101ème département français, 77 % des habitants (près de 200.000 habitants) vivent sous le seuil de pauvreté national, soit cinq fois plus qu’en France hexagonale. À cela s’ajoute un niveau de vie extrêmement coûteux, générant des répercussions inquiétantes sur la pauvreté des habitants et notamment des enfants. Dans un rapport de l’UNICEF consacré à un état des lieux des droits de l’enfant*, 8 enfants sur 10 seraient en situation de pauvreté à Mayotte.

l’insécurité, le fléau des jeunes 

Transport scolaire, bus, caillassage, Mayotte
Chaque jour, des élèves se font caillasser lors de leur trajet en bus scolaire

Les enfants et les adolescents sont les réceptacles de l’insécurité. Près de 20 % des enfants et adolescents affirment ne pas se sentir en sécurité dans leur quartier, leur ville ou leur village, soit près de 2 enfants sur 10. Dans un contexte de crise du logement, cette précarité représente un facteur de mal-être pour de nombreux enfants et adolescents dont les parents sont confrontés à des difficultés matérielles. À l’échelle nationale, si ce sentiment d’insécurité varie fortement selon les conditions sociodémographiques de chaque enfant, la situation des filles est particulièrement inquiétante. 21,2% d’entre elles confient ne pas se sentir en sécurité chez elles, contre 16,6% garçons. À Mayotte, les chiffres sont à nouveau saisissants. En 2020, l’INSEE révélait que 59 % des personnes âgées de 14 ans ou plus déclaraient se sentir personnellement, souvent ou de temps en temps, en insécurité, dont 48 % directement à leur domicile et 52 % au sein de leur quartier ou de leur village. Les personnes qui ne se sentent jamais en insécurité avaient été quantifiées à 19% à Mayotte, contre 74% sur le territoire métropolitain. 

Un enfant sur quatre est victime de violences physiques

Les dessins des enfants sont parfois révélateurs sur les violences qu’ils peuvent subir (image d’archives)

Loin d’être une nouveauté mais plutôt en hausse, cette consultation nationale des 6-18 ans a mis également en lumière la part d’enfants et adolescents victimes de violences. La situation de ces violences a franchi un cap. Plus d’un enfant sur quatre (30%) a subi des violences physiques de la part d’autres enfants ou adolescents. Plus d’un enfant sur dix (13,1%) est concerné par des violences commises par des adultes. Les enfants ayant subi des violences de la part d’adultes représentent près de 57,3% des enfants ayant déjà pensé au suicide. 6,2% des enfants ont subi un rapport sexuel alors qu’ils n’en avaient pas envie. En 2023, 444.700 cas de violences physiques ont été enregistrés comme crimes ou délits et plus de la moitié étaient des cas de violences intrafamiliales. 

Les Familles monoparentales, plus exposées à la précarité

Dans le cadre de cette consultation nationale, près de 15% des enfants enquêtés ont déclaré vivre avec un seul de leurs parents. À Mayotte, 30% des enfants vivent au sein d’une famille monoparentale. À ce sujet, les données de l’Insee** sont une fois de plus saisissantes : 41% des enfants issus de familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté monétaire, soit 2,5 fois plus que ceux vivant dans une famille composée d’un couple. Ce taux de pauvreté atteint 46% pour les enfants vivant seuls avec leur mère, contre 22% des enfants vivant seuls avec leur père. Face à ces résultats, l’UNICEF sonne l’alarme auprès des décideurs pour renforcer la protection et les droits des enfants en France. À Mayotte, la situation des mineurs est particulièrement inquiétante, où des milliers d’enfants sont quotidiennement livrés à eux-mêmes.

Mathilde Hangard

* UNICEF, Grandir dans les Outre-mer – État des lieux des droits de l’enfant, 11.2023

** INSEE, Les familles en 2020, Insee Focus – 249, 2020.

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