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Blocage des prix, rémunération maximale, le groupe LFI-NFP monte au créneau 

À l'occasion de sa niche parlementaire, le groupe LFI-NFP a inscrit à l'ordre du jour deux propositions, dont l’une sur le blocage des prix de l’énergie dans l’Hexagone et en outre-mer, notamment à Mayotte.

Comme chaque année, les groupes parlementaires bénéficient d’une « niche parlementaire » durant laquelle ils décident des textes qui seront mis à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Pour cette prochaine session, la niche parlementaire du groupe LFI-NFP se tiendra le 28 novembre 2024 dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Ces propositions, préparées depuis déjà plusieurs mois, se déclinent en propositions de loi ou en résolutions, après avoir auditionné des citoyens concernés par les thèmes sélectionnés. Elles seront débattues en commission le 20 novembre et dans l’hémicycle le 28 novembre. Pour la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, cette session sera l’occasion d’examiner un texte « jamais débattu auparavant dans l’hémicycle ».

Parmi ces propositions, une concerne la rémunération maximale des entreprises, l’autre s’intéresse au blocage des prix de l’énergie dans l’Hexagone et en Outre-mer, et notamment à Mayotte. « Douze millions de personnes souffrent de précarité énergétique en France. Et la situation va en s’aggravant. », voici les premiers mots d’introduction de la proposition de loi déposée par le groupe LFI-NFP, le 15 octobre dernier. D’après le groupe politique, près d’un Français sur trois n’a pas la liberté de choisir la façon de se déplacer  : « Des personnes cumulant bas revenus, dépenses élevées en carburant, longues distances à parcourir et/ou absence d’alternative à la voiture, auxquelles s’ajoutent les personnes qui ne disposent d’aucun moyen de mobilité. »

Des « difficultés spécifiques » en Outre-mer

EDF, EDM, électricité, Mayotte
En janvier dernier, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, annonçait une hausse des factures d’électricité à partir du 1er février 2024 de 9,8%, en Hexagone comme en Outre-mer

Les Outre-mer n’ont pas été oubliés par le groupe politique qui considère que les territoires ultramarins sont confrontés à des « difficultés spécifiques, avec un coût de la vie dans ces territoires en moyenne de 19 % à 38 % plus élevé que dans l’Hexagone », d’après les données de l’Autorité de la concurrence. Pour ses représentants, les prix de l’énergie seraient notamment la cause de tensions qui ont éclaté dans plusieurs départements d’Outre-mer récemment, comme en Martinique. Le groupe politique a également mentionné le territoire de Mayotte, où à titre d’exemple, la hausse des prix de l’énergie (+8,5%) accélérée en août a été rappelée, après une augmentation de 7,9 % en juillet sur un an, et où les prix de l’électricité sont en hausse de 19,9 % sur un an.

Est-ce possible de « bloquer les prix » ?

Pour protéger les Français de l’Hexagone et des Outre-mer de l’inflation, dont le groupe politique rappelle qu’elle creuse « davantage des inégalités » entre les citoyens, le groupe LFI-NFP entend « bloquer les prix de l’énergie ». Selon la 10ème édition 2022 de l’étude sur les dépenses et les habitudes de Français et des Européens (ECPR), près d’un Français sur deux aurait des difficultés à payer ses factures d’énergie. « J’ai rencontré une mère isolée avec un bébé qui se retrouve avec 4.000 euros d’impayés de factures, des gens qui n’allument la lumière chez eux que quand ils mangent, parce qu’ils ont peur de l’explosion des factures. », avait témoigné la députée de la France insoumise Alma Dufour, rapporteuse de la proposition de loi. « En 3 ans, le tarif réglementé a augmenté de 45,3% et le gaz a doublé. Dans les Outre-mer, c’est la catastrophe », précisait-elle.

Somagaz, gaz, Ukraine, Mayotte
L’article 1er de la proposition de loi du groupe LFI-NFP prévoit de bloquer les prix des produits énergétiques, non pas pour six mois mais pour douze mois

Pour se faire entendre, le groupe politique répète depuis plusieurs semaines que le bouclier tarifaire du gouvernement, estimé à près de 70 milliards d’euros, n’a pas fait diminuer les factures d’énergie des Français. Pour Alma Dufour, ces 70 milliards « ont été engloutis par les multinationales de l’énergie. Les trois plus grands fournisseurs d’électricité ont fait 100% de marges l’année dernière grâce à l’impôt des Français ! Nous proposons un blocage des prix d’urgence et de revenir au tarif réglementé de vente de l’électricité pour toutes et tous », affirme-t-elle en s’appuyant sur un précédent rapport de la Cour des Comptes.

Un décret pour geler les prix ?

premier ministre, projets structurants, simplification de la règlementation
Un décret du Premier ministre pris dans ce contexte pour « geler les prix » ne pourrait excéder six mois.

Exception faite au principe de liberté de fixation des prix, le Code de commerce autorise la possibilité pour le Premier ministre de prendre un décret pour prévoir certaines mesures pour lutter contre « une situation manifestement anormale du marché » : « Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Toutefois, dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d’Etat peut réglementer les prix après consultation de l’Autorité de la concurrence. Les dispositions des deux premiers alinéas ne font pas obstacle à ce que le Gouvernement arrête, par décret en Conseil d’Etat, contre des hausses ou des baisses excessives de prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé. Le décret est pris après consultation du Conseil national de la consommation. », d’après l’article L. 410-2 du Code de commerce.

Un coût important pour les finances publiques

Pourtant, le juriste, Jean-Paul Markus déclarait qu’un tel décret ne pouvait s’appliquer sur ce type de situation. Selon le professeur de droit public, « l’inflation généralisée actuelle ne répond pas » aux critères fixés par la loi, puisqu’ « elle n’est pas exceptionnelle, nous avons déjà connu en France une inflation à deux chiffres ». D’après lui, la situation ne rentre pas dans l’impératif prévu dans le code de commerce « de situation anormale de marché ». Le juriste précise qu’au-delà cet argument, un blocage des prix est complexe à appliquer : « Comment fixer le prix de toutes les variétés de salades, de carottes et de pommes, de toutes les variétés et marques de biscottes ou d’huiles, et ensuite contrôler le respect de ce prix chez tous les marchands, lesquels n’ont d’ailleurs ni les mêmes coûts, ni les mêmes marges ? », s’interrogeait Jean-Paul Markus à propos des produits de consommation. Pour lui, un gel des prix des énergies ne serait pas pertinent et risquerait de provoquer « des pénuries » sauf si cela est financé par l’État.  Dans l’hypothèse où le gouvernement instaurerait des compensations pour les fournisseurs concernés, la mesure pourrait avoir un coût important pour les finances publiques. 

Mathilde Hangard

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