En novembre 2020 alors que le département est en proie à une montée des agressions entre jeunes, le Rectorat, l’ARS, le Tribunal judiciaire, le Département par le biais du Conseil de la Culture, de l’Éducation et de l’Environnement ( CCEE), la FCPE, mettent en place un Observatoire des violences des jeunes qui se propose de mener une étude préalable et d’orienter des actions par le biais de son conseil scientifique.
Plusieurs acteurs mahorais sont mis à contribution pour rédiger des textes alimentant la réflexion sur les raisons des violences des jeunes. L’ère du fouet, l’utilité des murengue très codifiés, les « enfants du juge » dont l’éducation est abandonnée à l’Etat, les carences affectives conduisant les jeunes enfants dans le réconfort artificiel des bandes… tout est là pour inciter à une réflexion multisectorielle.
Depuis, l’Observatoire des violences était en stand-by, alors que la population continue à subir des agressions dont le degré de gravité s’accroît.
C’est pourquoi la réunion qui s’est tenue ce mercredi, relançant l’Observatoire semble prometteuse. Nous avons interrogé Madi Velou, 7ème vice-président du Conseil départemental, qui nous explique avoir repris le protocole signé en décembre 2020 par les parties citées plus haut : « Cela a pris du temps car nous devions chercher les statuts les plus adaptés. Ce sera un GIP, un Groupement d’Intérêt Public, qui permet d’avoir de multiples financeurs, qui sont les membres constitutifs de cet Observatoire. »
On retrouve donc le Rectorat, le Tribunal judiciaire, le CCEE émanation du Conseil départemental, la préfecture, l’ARS, la CSSM, mais aussi plusieurs collectivités locales, l’association des Maires de Mayotte, et l’université, « qui nous mettra à contribution des enseignants chercheurs ».
« Des interactions invisibles… »
Quatre collèges ont été définis qui permettent de répondre à la catégorisation des violences : celles commises dans l’espace public, celles dans l’environnement scolaire, les violences conjugales et les violences intrafamiliales. « Nous voulons avoir un diagnostic partagé sur chacune d’entre elles, et des données précises dans l’objectif d’alimenter les politiques locales. » Si le Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) sont des espaces privilégiés pour à la fois récupérer des informations, livrer des explications, le vice-président espère implanter une même animation mais à l’échelle départementale.
« Nous avons également d’autres objectifs pour exploiter les données, se saisir des dépôts de plainte et des réponses pénales pour les comprendre, les expliquer, évaluer leur impact, et analyser le tout sous le prisme sociologique qui m’est cher. Également, analyser la cartographie de la délinquance qui devra corroborer l’impression que la zone du grand Mamoudzou est davantage touchée. Il y a peut-être des interactions invisibles qui nous échappent. »
Mettre en place des équipes pluridisciplinaires sur les violences, analyser leur retour d’expérience, alimenter les politiques de prévention, sont autant de sujets que nous liste l’élu et qui donnent le sentiment qu’on est au cœur de la problématique
« La partie financement est importante pour structurer tout ça et accueillir notamment des doctorants, qui devront organiser des séminaires, pour permettre une analyse fine. » Le budget de la 1ère année est évalué à 245.000 euros, pour une équipe de 8 personnes qui comprendra des statisticiens, et 300.000 euros ensuite. « Nous avons demandé au CCEE de s’assurer de l’accord des partenaires sur ce sujet ».
Rendez-vous est donné en novembre pour continuer sur cette lancée, « pour un Observatoire des violences opérationnel en 2025 ».
Anne Perzo-Lafond