Celui qui vient de remporter l’argent aux championnats du monde master, c’est-à-dire réservés aux athlètes de plus de 35 ans, vaut bien un arrêt sur image. Soultoini Ali n’est pas un inconnu à Mayotte, pas plus que sur les pistes de lancer de javelot… enfin, des bouts de terrain qu’il s’octroie pour s’entrainer à Mayotte.
Car s’il a décroché le 2ème lancer en Suède pour les Championnats du monde, au milieu de plus de 8.000 athlètes représentants 110 pays, c’est essentiellement grâce à sa volonté d’y arriver et à l’accompagnement de petits sponsors locaux. Petits, mais fidèles. Avant d’atteindre ses 60,04m à Göteborg, ce licencié de 45 ans du club Ouchapiha athlétisme a usé la pointe de son javelot sur la terre tantôt dure tantôt boueuse de l’île. Et quand on lui demande quel est son entraineur, il sourit en retraçant brièvement son parcours.
« J’ai intégré le Pôle espoir du CRESS de la Réunion de 1998 à 2004, année où je suis rentré à Mayotte. Depuis, je m’entraine tout seul à côté du terrain de foot du Baobab où le terrain est boueux en saison des pluies. » Il continue malgré tout à collecter les médailles, beaucoup d’or, comme au Championnat de France master en juin dernier, « je suis persévérant », lâche-t-il naturellement.
Une icone au top pour Mayotte
Il travaille au service Jeunesse et sports du conseil départemental comme responsable de l’excellence sportive, au moins sait-il de quoi il parle, « j’accompagne les jeunes talents mahorais. »
Son déplacement en Suède, il l’a partiellement financé de sa poche, mais aussi, grâce aux sponsors qui l’accompagnent depuis sa médaille d’or aux Jeux des Iles de l’océan Indien 2023 à Madagascar. Ils sont nombreux*, « chacun donne un peu », et il sait pouvoir compter sur le conseil départemental, à travers le Comité départemental d’Athlétisme de Mayotte (CDAM).
« Ce sont des petites aides, mais les besoins sont grands quand on fait de la compétition à ce niveau. Il faut assurer la préparation depuis un an, et ensuite, le déplacement sur place en Suède, le séjour, les billets d’avion pour une compétition qui s’étale sur plusieurs jours. » Il y a aussi les soins, les kinés, etc., « je m’entraine de manière à éviter les blessures, il faut trouver un juste équilibre ».
Des sponsors qui doivent se préparer et se multiplier car l’histoire n’est pas finie. « Lors de la compétition en Suède, on m’a demandé si je pouvais être présent aux Championnats d’Europe masters à Madère au Portugal l’année prochaine. » Il vise aussi les championnats du monde d’hiver en Floride.
Le choix de la délégation française de désigner Soultoini Ali comme porte-drapeau en Suède sonne comme une reconnaissance de ses capacités, et qui pourrait inciter à miser sur ce cheval gagnant ici à Mayotte. Une image on ne peut plus positive qui fait du bien.
Anne Perzo-Lafond
*CDAM, CC Sud, SERCorp, Baco & Fils, Salama Sara, BMPS, Yous Pro BTP, MS Lodge, M2D, EIC, May Bodyform, Sophiata Souffou, MCTP