Alors que les services de l’Etat voient une amélioration de la situation sécuritaire depuis le début de l’opération Place nette il y a deux mois et demi, de nombreuses agressions continuent pourtant à avoir lieu sur le territoire, renforçant un sentiment d’extrême solitude chez les habitants, ne se sentant plus en sécurité nulle part.
Pour preuve, samedi 13 juillet, des gendarmes ont eux-mêmes été agressés et dépouillés par un groupe d’individus armés, leur dérobant leurs armes et leurs chargeurs, sur un sentier de randonnée, sur la crête de Bandrélé.
Un énième bus du CHM caillassé à Majikavo
Mardi 16 juillet, les soignants du Centre hospitalier de Mayotte (CHM) ont une fois de plus été ciblés. Après leur service, quinze soignants empruntent un bus de l’hôpital pour rejoindre leur domicile, quand le bus est pris dans une embuscade vers 18h45 à Majikavo Dubaï. Trois vitres du bus sont brisées par des jets de pierres. Deux soignants sont légèrement blessés.
Un marteau jeté sur la voiture de deux soignantes à Kahani
Ce même soir, alors qu’elles sortent du Centre médical de référence (CMR) de Kahani, deux soignantes de la maternité de Kahani sont coincées devant un barrage « sauvage » près de l’entreprise Mon Pouleti. Avec effroi, la direction de l’hôpital a précisé que les soignantes étaient parvenues à éviter le barrage après avoir été visées par un jet de marteau qui transperça leur voiture.
Sécuriser pour être davantage ciblés ? Une situation quasi insoluble
Si le directeur du CHM salue « un gros travail fait par la préfecture et les forces de l’ordre pour sécuriser les soignants », Jean-Mathieu Defour reconnaît que cette sécurisation des véhicules du CHM montrerait des limites. Non seulement, sécuriser les véhicules de l’hôpital ne peut être systématique en raison des effectifs disponibles mais étant encadrés par les forces de l’ordre, ces véhicules sanitaires seraient davantage des cibles : « Les forces de l’ordre font un travail très important. Ils accompagnent les bus et interviennent rapidement sur les CMR dès qu’il y a une agression mais quand un bus du CHM est accompagné, il peut devenir d’autant plus une cible, c’est ça le problème. »
Au sujet de l’attractivité du territoire pour recruter des soignants, Jean-Mathieu Defour admet qu’il s’agit en partie d’une organisation interne mais que le contexte d’insécurité nuit particulièrement aux efforts de recrutement : « On peut me dire que l’organisation de l’hôpital est délétère, c’est une responsabilité interne et une partie du problème, mais la grosse difficulté du territoire c’est l’insécurité. On ne se sent pas en sécurité sur l’île. Personne. »
Dans ce contexte, plusieurs soignants ont déjà fait valoir leur droit de retrait. Depuis plus d’un an, les droits de retrait se succèdent auprès des soignants du CHM, dénonçant un « décor de guerre permanent. » La direction du CHM a annoncé qu’elle se déplacerait jeudi, au CMR de Kahani.
La réponse policière ne montre-t-elle pas ses limites face à une situation politique, géopolitique et sociale particulièrement complexe ?
Mathilde Hangard