Le 5 juillet, vers 20h, sur le stade du terrain de foot de Kawéni, un homme surnommé Jock donnait rendez-vous à un individu, surnommé Parfum. Jock lui proposa « un boulot payé 200 euros » qu’il accepta sans hésiter.
Vers une heure quinze du matin, Parfum, accompagné de sept autres individus, se rendit sur le site de la carrière ETPC de Bandrélé. L’agent de sécurité en charge de la surveillance du site le soir des faits, aperçut cinq individus se regrouper vers le pont bascule, puis un groupe de six personnes, arrivé par la route, et alerta les forces de l’ordre. Parmi la dizaine d’individus, tous avaient le visage dissimulé, certains étaient armés de machettes, de pinces-monseigneur, de barres à mine et d’armes de poing. Parmi eux, les dénommés Mario, Checke, Fahad, Attoumani, Mohamadi, Kirmane, seront identifiés. À l’arrivée des gendarmes, certains hommes furent arrêtés, quand d’autres prirent la fuite. Parmi ceux qui t’entèrent de s’échapper, un des individus embarqua à bord d’un véhicule en direction de la forêt et menaça les militaires à l’aide d’une machette, donnant lieu à un tir de lanceur de balles de défense (LBD) par les gendarmes, qui toucha l’homme à l’abdomen.
De fausses coïncidences ?
Pendant toute la durée de l’audience, les six braqueurs qui avaient pu être retrouvés n’auront de cesse de répéter qu’ils se seraient retrouvés sur les lieux par hasard : « On vous menace avec une arme, on vous embarque dans une voiture, et vous vous laissez faire? » demande Tarik Belamiri, substitut du procureur, aux individus qui avaient été forcés de monter à bord du véhicule, ordonné par Parfum. Suspectant une opération organisée entre personnes qui se connaissaient, Catherine Vannier, la Présidente du tribunal réitèrera face aux prévenus : « C’est curieux, vous alliez tous de nuit dans une voiture par hasard ? » Un des braqueurs, dont le rôle consistait à conduire le véhicule, agissait en qualité de chauffeur pour la deuxième fois, sur des faits similaires. Au fil de l’audience, les dires de l’homme qui continuait de nier son implication dans les faits n’apparaitront plus crédibles aux yeux du tribunal : « Le chauffeur, même s’il n’a pas participé plus que cela, a surtout fermé les yeux (…) C’est un hasard improbable que vous soyez cité à tord dans deux dossiers pour des faits similaires », déclarait la Présidente du tribunal.
Une organisation magnégné
Parmi les six prévenus, aucun ne prendra le risque de s’avancer sur d’autres actions commises par peur de se voir imputer un rôle de meneur de bande, laissant la tribunal dans le flou sur les motifs du braquage et les commanditaires. Mais au regard des tâches bien précises dont chaque homme avait charge, la présidente du tribunal déclarera : « S’il n’y a pas de meneur, ça ne peut marcher ». Face au tribunal, un des braqueurs finira par reconnaître : « C’est Jock qui avait l’idée du braquage (…) Tout le monde savait qu’on allait voler (…) Moi j’avais des cisailles pour entrer à l’intérieur de la société. »
Pendant la phase d’instruction, Jock, Mario, Fahad seront désignés comme les meneurs du braquage. Les trois individus auraient ordonné de « ligoter les gardiens et voler le coffre de l’entreprise ». En ce sens, chaque braqueur avait un rôle bien précis. Par exemple, Mario devait couper le grillage, et prendre des cailloux pour les jeter sur les personnes qui s’approcheraient d’eux. Jock, Mario et Fahad portaient tous les trois des gants, et avaient pris soin d’emporter des vêtements de change pour ne pas être repérés par les caméras de surveillance de l’entreprise.
Un braquage confus et râté
Si les braqueurs avaient tenté de dissimuler leurs identités, leurs intentions ne semblaient pas claires entre tous. « Au début de l’enquête, vous disiez que le but était de récupérer de l’espèce et après vous avez déclaré qu’il vous fallait des passeports ? », interrogeait le substitut du procureur. L’arrivée des gendarmes aura transformé cette intention de braquer en simple tentative. Sur place, la clôture de l’enceinte de la carrière ETPC apparut légèrement endommagée et quatre barres à mine, ainsi qu’un coupe boulon avaient été découverts. De même, la voiture qui avait servi à transporter les braqueurs, sera retrouvée et rendue à son propriétaire.
Les six prévenus ont tous été déclarés coupables par le tribunal et condamné à des peines comprises entre 18 et 30 mois d’emprisonnement. Me. Baudry, qui représentait un des prévenus, a déclaré être satisfaite de la décision du tribunal, qui a condamné son client à une peine de 24 mois d’emprisonnement, qu’il avait déjà réalisée en étant en détention provisoire depuis deux ans. Théoriquement, Me. Baudry pouvait espérer voir son client repartir libre, mais celui-ci demeure en détention pour d’autres faits. L’avocate de La défense, a précisé que son client était à Mayotte depuis 1997 et qu’il n’avait commis des délits qu’à partir de 2020. « Mon client n’a pas une carrière de délinquants », avait-elle déclaré.
Mathilde Hangard