Depuis 2017, le groupe Abattoir de volaille de Mayotte (AVM), né de l’union de plusieurs partenaires, éleveurs, industriels et entrepreneurs, connaît un franc succès dans la vente de ses poulets sur le territoire. Pour preuve, « on a du mal à approvisionner le marché tant les produits sont vendus », avoue Guillaume Rubin, le directeur de la société Ekwali, associée de AVM.
Une ascension rapide
Quelques années plus tôt, le groupe AVM fonctionnait grâce à sept salariés et onze éleveurs, majoritairement implantés dans le centre et le sud de l’île, et l’usine s’étendait sur 1.850 m². Rapidement, grâce à d’importants investissements, à hauteur de huit millions d’euros, les effectifs se sont agrandis. Aujourd’hui le groupe compte 60 collaborateurs, bientôt 65, et 30 éleveurs de l’île travaillent avec l’entreprise.
Des travaux d’un montant de quatre millions d’euros ont également permis de créer un nouvel atelier de 230m² dédié à la création de la nouvelle gamme de charcuterie du groupe et des panneaux photovoltaïques installés sur le toit de l’usine, permettent à l’entreprise de réduire sa dépense énergétique.
Une nouvelle gamme de charcuterie « 100% poulet »
Victime de son succès, Mon Pouleti s’est imposé rapidement auprès de nombreux clients, tels que Sodifram, Carrefour, Kagna Maoré, plusieurs restaurants, des pizzerias, et des boulangeries. Le groupe AVM a ainsi souhaité diversifier son offre en lançant sa production de produits de charcuterie. Désormais, dans les grandes surfaces, en barquette et bientôt à la découpe, les consommateurs pourront trouver des chipolatas, des merguez, de la mousse de foie, du saucisson à l’ail, de la terrine de poulet et des knacks de poulet.
Lors de notre visite de l’abattoir de Mon Pouleti, situé à Kahani, pour permettre à la main d’oeuvre de travailler sur cette nouvelle gamme charcutière, Loïc Breton, directeur général du groupe, explique que « toutes les tâches ingrates de l’abattoir ont été mécanisées (…) C’est donc la même équipe qui abat et qui fait le conditionnement. » Dans cette usine, les températures sont en moyenne proches de 0 degrés Celsius. « Le personnel a été formé à ses métiers du froid, qui sont peu courants à Mayotte, ils ont appris à travailler dans le froid, dans des températures négatives, et sur des tâches variées, tels que l’abattage et la transformation de produits. » Entre le moment où l’animal entre à l’abattoir et où sa viande est conditionnée, le directeur du groupe précise qu’il faut huit jours. L’abattage est réalisé deux fois par semaine.
Des actionnaires mahorais
Pour valoriser ses produits, l’entreprise a misé sur une production 100% locale. « Rien n’est importé, même pour fabriquer la charcuterie, on utilise des produits fabriqués uniquement sur le territoire », déclare Guillaume Rubin. L’implantation du groupe à Kahani était également volontaire : « On a implanté l’usine en dehors du grand Mamoudzou pour se rapprocher des éleveurs et pour donner du poids au reste du territoire. »
Le poulet mahorais, moins cher que le poulet réunionnais ?
La production locale n’est pas toujours un remède contre la vie chère, mais elle est un gage de meilleure santé. Lors de la conférence de presse, un interlocuteur a pris la parole en déclarant que les prix affichés par Mon Pouleti étaient élevés en raison du pouvoir d’achat des mahorais et qu’ils s’adressaient à une classe aisée. Le directeur d’Ekwali a justifié ces prix en raison du contexte économique de Mayotte dans l’océan indien et du coût des matières premières : « Les produits de Mon Pouleti ne seront jamais moins chers qu’en métropole, mais ils sont 100% local (…) L’objectif est de les rendre accessible au plus grand nombre et que la population mange des produits de qualité. » Guillaume Rubin a également comparé le prix de vente d’un poulet fermier produit à Mayotte et le prix de vente d’un poulet fermier produit à La Réunion. À Mayotte, le produit est vendu à 7,35€/Kg, tandis qu’à La Réunion, les prix les moins chers sont affichés à 8,30 €/Kg.
Des ambitions locales et internationales
À Mayotte, chaque année, près de 18.000 tonnes de volailles sont produites. En 2020, Mon Pouleti produisait 120 tonnes de kilos de carcasses. Actuellement, 1.000 tonnes sont produites par le groupe, qui aimerait d’ici quelques mois, doubler sa production, pour représenter 10% de la production locale de volailles.
Un circuit-court entre Mayotte et Madagascar pour la production de soja et de maïs. Pour renforcer sa gamme de charcuterie et la diversifier, le groupe est actuellement en train d’investir dans une société malgache pour construire « un circuit court » de production du soja et du maïs entre Mayotte et Madagascar, afin « de ne plus dépendre des géants latino-américains » pour reprendre les termes du directeur d’Ekwali.
Mon Pouleti pourrait bientôt s’exporter. Chaque année, ce sont près de 600 containers qui sont importés de Longoni vers l’usine. Ainsi, l’entreprise souhaiterait s’implanter à Longoni, pour s’alléger d’une « logistique routière conséquente ».
Un projet de minoterie. Par ailleurs, elle souhaiterait diversifier ses activités en créant sa propre farine, permettant d’approvisionner par des sacs de 1 kilo à 25 kilos les boulangeries de l’île, où le son de blé serait également utilisé pour la nutrition animale. Par ailleurs, pour la gestion de ses déchets, le groupe réfléchit à un « projet de micro-méthanisation » afin de « valoriser nos déchets organiques, en produisant de l’énergie et de l’engrais, car actuellement, les déchets sont enfouis à Dzoumogné. »
Mathilde Hangard