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Mamoudzou

À la suite d’un appel national des syndicats, près de 180 établissements pénitentiaires sont actuellement bloqués

Depuis 24h, la prison de Majicavo est bloquée par des agents pénitentiaires. Ce blocage fait suite à la mort de deux agents, mardi 14 mai, tués froidement par un commando alors qu'ils convoyaient un dangereux prévenu.

Cette action de blocage s’inscrit d’abord dans un élan de « solidarité avec les collègues de la métropole qui ont été exécutés froidement dans l’exercice de leur fonction » a indiqué Mouhamadi Houmadi, représentant du syndicat Force Ouvrière Justice au centre pénitentiaire de Majicavo. En effet, mardi 14 mai, un fourgon pénitentiaire qui transportait un détenu dans l’Eure, a été attaqué à l’arme lourde. Deux agents de l’administration ont été tués et trois gravement blessés.  

« À Mayotte, on est plus exposé qu’ailleurs »

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Pour conduire rapidement un détenu du centre pénitentiaire de Majicavo jusqu’au CHM, une seule route peut être empruntée

Sur l’ensemble du territoire, suite à un appel national des syndicats pénitentiaires, près de 180 établissements pénitentiaires sont actuellement bloqués, tel que le Centre Pénitentiaire de Majicavo. Si les pensées des agents pénitentiaires, « vont d’abord aux collègues qui se sont fait exécuter sur la voie publique », les agents craignent aussi d’être attaqués, en raison des moyens dont ils disposent pour travailler, des conditions de détention des détenus et du contexte de Mayotte. 

« À Mayotte, on est plus exposé qu’ailleurs car il n’y a qu’une route. Normalement, lorsqu’on fait une extraction médicale, le chef de l’extraction doit d’abord imaginer le trajet qu’il va emprunter. À Mayotte, je vous laisse imaginer le choix qu’il va faire. Il est vite fait, car il n’y a qu’une route ! », a déclaré inquiet le représentant syndical.

« On a peur d’une attaque par arme de guerre »

Ce blocage traduit une inquiétude des agents pénitentiaires de Majicavo face à une éventuelle attaque à l’arme lourde comme celle de l’Eure : « On a peur d’une attaque par arme de guerre comme celle qu’ont vécue nos collègues. », nous a confié Mouhamadi Houmadi.

Les agents de la prison ont fait part de leur inquiétude sur leurs conditions de travail au regard des violences urbaines dont Mayotte est touchée (photographie/DR)

Leurs revendications portent au niveau des moyens de protection dont ils disposent et notamment du nombre d’agents mobilisés pour réaliser des extractions de détenus : « On demande qu’au niveau des armements les choses évoluent. On a des armes de poing, des gaz lacrymogènes, une matraque. Mais eux (ndlr : les assaillants) ils avaient des armes de guerre, ils ont tiré en mode rafale (…) Il s’agit de donner à chaque agent des armes de guerre et de pouvoir les utiliser en cas d’attaque (…) À Mayotte, on a peur que des délinquants emploient les mêmes méthodes pour récupérer les détenus et pour nous tuer (…) À Koungou, à Kawéni, il y a eu des morts par balle (…) Si on ne nous donne pas de moyens, on ne peut pas se protéger. », a exprimé le représentant FO Justice du centre pénitentiaire de Majicavo.

La prison de Majicavo étouffée par une surpopulation carcérale

Alors que le centre pénitentiaire de Majicavo dispose d’un nombre limité de places, sur les 270 places prévues pour accueillir des détenus, la prison a presque triplé ses capacités d’accueil avec 640 détenus pour 170 agents pénitentiaires.

Prison, Mayotte
Les cellules prévues pour une seule personne, comptent souvent 5 ou 6 détenus, allongés sur des matelas par terre

Le représentant syndical déplore ainsi une situation de surpopulation carcérale, nuisant aux missions théoriques d’un centre de détention : « Comme on n’a pas de maison centrale pour accueillir des détenus qui doivent purger des longues peines, on met tous les détenus ensemble, peu importe la peine qu’ils ont à purger (…) même s’il y a des critères d’affectation des cellules, les détenus sont souvent 5 voire 6 par cellule (…) On va mélanger les prévenus avec les détenus, ou ceux qui purgent une petite ou une longue peine, ceux qui ont commis un délit pour la première fois et les personnes qui sont récidivistes (…) Alors que le centre de détention a la vocation de réhabiliter le détenu et à participer à sa réinsertion (…) Toutes ces missions, on ne peut pas les exercer. » 

Maintien du blocage jusqu’à nouvel ordre 

Suite à une réforme nationale en 2019, l’administration judiciaire a été chargée  de réaliser des extractions judiciaires. Mais dans les départements d’outre-mer, ces extractions judiciaires sont réalisées par des gendarmes. À Mayotte, le personnel pénitentiaire réalise ainsi uniquement les extractions médicales. Actuellement, pour transporter un détenu vers le CHM, deux agents du centre pénitentiaire sont mobilisés, pour escorter le détenu et conduire le véhicule. Le représentant FO Justice du centre pénitentiaire de Majicavo estime que cette situation expose les agents de la prison à des risques : « Tant que nous ne pourrons pas être trois sur ces extractions, on ne sortira pas », a-t-il déclaré.

D’après nos dernières informations, une plainte pour mise en danger de la vie d’autrui devrait être déposée par les syndicats nationaux suite à l’attaque du fourgon pénitentiaire dans l’Eure. À l’issue d’une réunion entre les syndicats nationaux et le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, qui a duré près de trois heures, l’intersyndicale a appelé à maintenir les blocages ce jeudi, dans l’attente d’un accord écrit avec le ministère.

Mathilde Hangard 

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