Tribunal judiciaire : Détournement des ressources en eau

Le tribunal judiciaire de Mamoudzou ne juge pas uniquement des faits de violences, de vols ou d’agressions… Même si cela représente une grande partie de son activité. Certains actes de délinquance sont parfois plus sournois, comme le détournement des ressources naturelles.

Un homme a comparu hier pour « la mise en place sans autorisation d’un ouvrage nuisible à l’eau ou au milieu aquatique » dans le but de détourner cette précieuse richesse à son profit. Pendant près de quatre ans, de 2018 à 2022, il a détourné illégalement un cours d’eau à Brandraboua. Cela pourrait paraitre comme un fait anodin, mais vu le contexte actuel que connait le territoire, notamment sur les problèmes d’approvisionnement en eau, cela prend un tout autre sens. D’autant plus, que l’ouvrage qu’il a installé n’a pas fait l’objet d’une déclaration auprès des autorités et que par-dessus le marché, bien qu’ayant reçu une mise en demeure, cet individu n’a procédé à aucune modification, d’où sa convocation devant le tribunal correctionnel.

La police de l’environnement veille notamment sur les cours d’eau.

Ainsi, c’est en avril 2022 que l’OFB (Office Français de la Biodiversité) signale que des travaux non conformes, notamment un mur de soutènement en béton, se situe sur un cours d’eau, en toute illégalité. L’individu est alors sommé d’arrêter les travaux qu’il a commencé et de remettre le site en état. « Pourquoi, suite à cette mise en demeure vous n’avez pas rectifié, régularisé et arrêté les travaux commencés pour remettre le site en état, comme cela vous l’a été signifié ? », lui demande la présidente du tribunal, Virginie Benech. – C’est une erreur de ma part, je le reconnais. Je m’excuse je vais remettre le terrain en état », assure l’accusé. Sauf que le mal est largement déjà fait.

Un préjudice pour l’environnement

Le Conseil départemental, propriétaire de de l’ensemble du réseau fluvial et gestionnaire des cours d’eau a donc porté plainte dans cette affaire. « C’est une infraction au code de l’environnement et à la propriété. Il y a un fort préjudice pour le Département mais aussi pour la population, explique le chef du bureau gestion de l’eau au Conseil départemental, Ronan Le Goaster. La construction d’ouvrages dans le lit des rivières est interdite, sauf autorisation, car cela modifie le flux de l’eau ainsi que son écoulement, entrainant de fait des dégâts sur les berges, favorise l’érosion des sols, ou encore accentue les inondations. C’est une atteinte à l’environnement et à la biodiversité. Il va falloir remodeler la berge à l’identique et replanter certaines espèces de plantes. – A combien estimez-vous le montant de cette remise en état ? Interroge la présidente. – Environ 50.000 euros et un mois de travaux probablement ».

Le code de l’environnement fait partie de outils à la disposition des magistrats pour faire appliquer le droit.

Le prévenu, commerçant, veuf depuis quelques mois et ayant des enfants à charge assure ne pas avoir l’argent pour effectuer l’ensemble des travaux et a demandé une aide au tribunal pour les exécuter, même s’il assure avoir simplement été « négligent ». Le procureur dans son réquisitoire avait demandé une amende de 10.000 euros avec l’obligation de détruire son ouvrage et la remise en état du site. Le tribunal l’a reconnu coupable des faits reprochés et l’a finalement condamné à 7.000 euros d’amende, l’obligation de détruire le mur de soutènement qu’il a installé, de remettre en état le site en respectant l’arrêté préfectoral. Il a 12 mois pour effectuer les travaux. De plus, il est soumis également à une astreinte de 300 euros par jour de retard.

B.J.

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