Des membres de la famille de l’ancien président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi ont déploré, ces derniers jours, la « difficile épreuve » de l’ancien président, actuellement détenu dans sa propre résidence administrative, située à quelques kilomètres de Moroni sur la route menant à l’aéroport.
La sixième année en détention
Les quatre enfants, vivant en France, ont mis en ligne une lettre adressée à leur père, et dans laquelle ils l’invitent à faire preuve de courage et à rester fort face à l’adversité. « Ils voulaient qu’on grandisse sans père mais même à distance, par ta combativité et ta justice, tu continues à nous apprendre la patience, le courage, la lutte contre l’injustice, et bien d’autres choses que nous ne pourrions citer. (…). Nous espérons vous retrouver bientôt, afin de reprendre notre vie de famille et essayer de rattraper ces 12 Eids, ces 6 ramadans et ces 1920 jours passés sans vous, sans votre affection », disent-ils en prélude.
L’objectif de cette lettre était d’apporter un réconfort à leur papa condamné. «En ce triste anniversaire du 20 août qui marque 5 ans pendant lesquels nous avons grandi sans toi 5 ans que nous avons été cambriolés et à l’aube de la 6ème année qui commence, nous tenions à exprimer notre admiration pour toi. À cette injustice totale que vous avez subie depuis le début », écrivent-ils.
La missive de 245 mots est partagée, ce week-end, sur les réseaux sociaux. La date du 20 août n’a pas été choisie au hasard. Elle marque ainsi le jour de l’inculpation (en 2018) de l’ancien chef d’Etat par le magistrat instructeur en charge du dossier de la citoyenneté économique. «Tant de choses se sont passées au cours de ces 5 années. Vous avez eu des petits-fils, dont certains que vous n’avez toujours pas rencontrés jusqu’à maintenant. Vous avez perdu des êtres chers que vous ne reverrez jamais. Malgré tout sache que tu es peut-être loin de nous mais tu es dans chacune de nos prières », poursuit la lettre des enfants de l’ancien chef d’Etat.
Des messages en forme de soutien psychologique
Des messages groupés en signe de solidarité à l’ancien chef d’Etat sont, par ailleurs, apparus sur les réseaux sociaux, largement partagés par les sites pro-Sambi et des pages Facebook des fidèles de l’ancien président. Ils expriment tous leur compassion à l’égard de l’ancien président, dénoncent ce qu’ils considèrent comme « une injustice », s’inquiètent sur son état de santé et s’interrogent sur son sort après cinq années de privation de liberté.
Les principaux signataires voulaient réveiller les esprits mais surtout exprimer et faire partager leur peine avec l’opinion publique. «À l’heure où le nom de Sambi est piétiné et déshonoré, sachez que nous portons tous votre nom avec fierté, la tête haute. Parce que nous avons compris que pour marquer l’histoire de notre pays, nous devions en payer le prix et cela passe par cette difficile épreuve pour vous, comme pour nous et notre mère», souligne encore la missive.
Une condamnation à perpétuité
L’avocat de l’ancien président, Me Ahamada Mahamoudou, très offensif dans les medias, a adressé, lui aussi, une lettre au condamné, l’invitant à garder encore et toujours le moral. « Restez debout et fier de vous même Monsieur le président car la communauté internationale et nationale reste convaincu de vôtre innocence. Vos partisans et sympathisants ainsi que votre famille et vos amis sont tous fiers de vous. Vous êtes et resterez leur image », a-t-il mentionné, dénonçant, par la même occasion, la procédure à l’origine de l’arrestation, la détention et la condamnation de l’ancien raïs.
Aux Comores, la détention de Sambi suscite encore de nombreuses controverses. Si la procédure ayant conduit à l’arrestation et à la condamnation est vivement critiquée, faisant légitimer « des abus manifestes et une violation flagrante » des libertés individuelles, certains milieux estiment, de leur côté, que les erreurs de forme ne doivent pas étouffer les questions de fond notamment les scandales liés à la citoyenneté économique. Mais aussi les errements constatés dans les opérations de vente de passeport entre 2008 et 2011.
L’ancien chef d’Etat a été inculpé pour «corruption, détournement de deniers publics, complicité de faux et usage de faux et forfaiture ». Des faits requalifiés en haute trahison, d’après l’ordonnance de renvoi du magistrat instructeur. Il sera condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une perte de ses droits civiques et politiques, pour haute trahison. La peine a été prononcée le 28 novembre 2022 par la Cour de sûreté de l’Etat contestée par l’inculpé. L’ancien président a toujours nié les faits qui lui ont été reprochés.
A.S.Kemba, Moroni