C’est aux abords de l’entame du tronçon pédestre encore méconnu, situé au niveau du carrefour de M’Tsangamouji/Soulou et de ses fameux vestiges de l’usine sucrière, qu’Agnès Vince, directrice nationale du Conservatoire du littoral (CDL) et Maanrifa Said Ibrahima, président de la 3CO, ont scellé solennellement le destin d’une partie cette Baie de Soulou. Un destin d’aménagement, de rénovation et de mise en valeur aussi bien historique qu’environnementale pour lesquels l’interco s’engage comme gestionnaire. Après la Cadema hier, au niveau de son site d’Hajangoua, c’est donc la région centre qui prête ’’serment’’ ce jour, portant à 4 le nombre de conventions estampillées CDL. Lorsque l’on sait que ce chiffre se tablait sur 0, il y a encore 5 ans de cela, on peut aisément imaginer le travail intensif de fond de Christian Beillevaire, directeur du CDL Mayotte et de ses 2 collaborateurs.
Acquérir pour protéger
Cet établissement public national ayant pour mission première de reconquérir le domaine foncier attenant aux rivages français métropolitains ET ultramarins — afin de les préserver contre les potentielles menaces d’urbanisation — porte prioritairement une approche à caractère anticipatoire et environnemental. Un indispensable travail préventif au regard des diverses manifestations naturelles liées notamment aux changements climatiques, pour lesquels les pleines fonctionnalités de l’écosystème se doivent d’être maintenues, entretenues et défendues telles les forêts de mangroves, entre autres, dont l’indiscutable rôle n’est plus à démontrer. Une fonctionnalité qui impacte directement la viabilité même de nos cotes et d’autant plus, en nos insulaires contrées comme nous le rappelle Agnès Vince : « Nos missions pluridisciplinaires, avant tout d’acquisition foncière, ciblent à la fois l’écosystème terrestre et maritime, pour justement maintenir le trait de côte. C’est quelque chose de fondamental pour tous les territoires, Mayotte inclus, pour lequel il y a aussi tout un interface avec le rétro-littoral* » .
Un travail dans l’ombre pour faire émerger de beaux projets
S’il y a bien une noble étiquette que nous pouvons coller aux équipes du Conservatoire du littoral, c’est celles de petites fourmis. Engagés, courageux, travailleurs et souvent dans la discrétion, les collaborateurs du CDL sont au total 160, dont 20 détachés en zone Outre-mer. Sur notre île par exemple — où 2 763 hectares sont sous l’égide du CDL — en plus de leurs propres missions, souvent complexes au regard des problèmes fonciers récurrents que nous connaissons, les agents apportent, leur ingénierie en matière de gestion administrative, de montages de dossiers, de décrochage de subventions, d’appel et de coordination de divers acteurs techniques liés à l’urbanisme, l’archéologie, l’architecture, l’aménagement paysager etc.
En somme, une polyvalence à très haute valeur ajoutée et ce, pour un même projet, qui se veut porteuse et cadrée avant tout pour les gestionnaires ou futurs gestionnaires : « Dans notre mission de propriétaire de l’espace du littoral, lorsque nous décidons de signer, c’est que nous avons derrière les garanties nécessaires quant à l’aménagement respecté et à l’entretien du site qui est laissé en gestion » nous précise Alain Brondeau, délégué CDL des Outre-mer, « Dans cette signature du projet de la Baie de Soulou, il y a 3 dimensions liées au patrimoine culturel, au patrimoine naturel ainsi qu’à l’aménagement cohérent du territoire ».
Le grand tout qu’est Soulou
Inauguré en février dernier, le nouveau sentier d’accès à la cascade et plage de Soulou se voulait chantier vitrine du projet global qui se rattache aux différents points névralgiques et culturels qui composent ladite baie. Une baie riche de sa végétation, de sa faune mais également de son Histoire qui remonte, pour les premières traces, au 8ème siècle, alors sous giron du Sultanat de Tsingoni. Cette sensibilité archéologique est bien entendue étudiée et prise en compte dans les travaux de la Délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle (Daac) auxquels se greffent également un pan historique plus récent relatif à l’ancienne usine sucrière de la zone bâtie fin du 19ème siècle, vers les années 1856.
Étendue sur près de 400 hectares, ce lieu est l’un des mieux préservés du territoire, avec différents éléments et emplacements tels que l’usine centrale, la maison du maitre mais aussi son embarcadère et son dépôt attenant. Véritables vestiges témoins du Passé qu’il faut impérativement restaurer et préserver comme il est cas dans le projet de la 3CO, en plus de l’aménagement côtier et pédestre au moyen de la réhabilitation, voire création, de sentiers interconnectés. Des sentiers établis via un tracé respectueux de l’Environnement, où la magie des lieux est préservée tout comme l’utilisation de matériaux naturels, directement trouvés sur place, est priorisée. Un principe d’aménagement léger où l’ajout d’équipements artificiels est minimisé, pour ne pas dire inexistant, afin justement de limiter les dangers de dégradation mais également les frais d’entretien trop importants pour le gestionnaire du site; en l’occurence, l’interco.
Toute cette étude pluridisciplinaire est en cours de finalisation après une 1ère tranche de nettoyage et de sécurisation, d’un montant de près de 62 000 euros, qui a été amenée sur le sentier ainsi que les vestiges du dépôt en attendant la suite des travaux et la poursuite de ce magnifique chantier global tant aspiré qui offrira une connexion à la Nature depuis la commune de Tsingoni jusqu’aux portes de M’Tsangamouji de quoi ravir les amateurs de randonnée, de Trail mais aussi les familles.
MLG
*Le rétro-littoral est relatif à l’arrière-côte, au-delà du littoral; c’est une terre immédiatement à côté d’une côte. Elle peut concerner différents niveaux d’échelle.