Ouverte il y a près de 3 ans, en pleine période quarantaine, masque et population covidée, la toute première École de la deuxième chance de Mayotte continue son discret, mais non moins efficace, petit bonhomme de chemin tout terrain au profit de l’insertion des 16 à 25, bien souvent en situation de décrochage scolaire, dépourvus de qualification professionnelle et/ou de diplôme à minima du niveau tertiaire .
Vers une labellisation
Ayant aspiration à faire partie intégrante d’un grand tout qu’est le réseau E2C France — association nationale reconnue par l’État* — notre école de la deuxième chance mahoraise, membre associé candidat du dit réseau depuis le 24 septembre 2021, suit divers protocoles de conformité relatifs à un cahier des charges national validé par les respectifs ministères de l’Éducation et de l’Emploi. Une exigeante trame de fond visant la qualitative obtention du label E2C d’ici cette fin d’année 2023, à l’issue d’un audit, qui permettra d’appréhender l’établissement telle une autonome référence sur notre territoire en termes de méthodes pédagogiques et d’insertion des jeunes publics très éloignés du marché de l’emploi.
Une première tentative d’implantation de ce même type d’établissement avait eu lieu quelques années en amont, par une autre structure porteuse. Par manque certainement de préparation, d’encadrement et de lecture du tissu économique et des besoins réels locaux, ce projet fut avorté. Les erreurs des uns faisant l’apprentissage des autres, l’École de la deuxième chance de Mayotte, portée cette fois-ci par l’association Mlezi Maore, semble plus que bien partie pour conjurer le sort et même gagner ses lettres de noblesse objectivement méritées. « Cette école permet activement de lancer les jeunes sur une trajectoire positive tout en les faisant sortir de leur respectif isolement social et professionnel. Vu le sérieux et le travail déjà accomplis, il y a de fortes de chances pour l’issue de cette labellisation soit positive » nous explique un des représentants préfectoraux présent à cette matinée portes-ouvertes et signature de conventions.
L’importance des partenariats
Rien que pour l’année 2022 c’est plus d’une soixantaine de jeunes qui sont passés à travers les murs de l’E2C de Mayotte répartissant leurs périodes de stage sur un réseau d’une dizaine de partenaires économiques locaux. Principalement des petites et moyennes entreprises pour lesquelles il serait intéressant et légitime d’y joindre d’autres sociétés et groupes plus importants, afin de faciliter l’apprentissage, la prise en charge et de manière plus ou moins directe, l’insertion de ce public. Sur un territoire comme le notre, au regard des divers défis et complexités que nous connaissons, aucune structure de ce type n’est de trop, surtout lorsque cette dernière s’inscrit dans une efficiente démarche étudiée qui contribue à favoriser les respectives approches sociales et économiques. En ce sens, en plus d’un volet présentation et introduction qui a été amené à la quarantaine de convives invités à cette occasion, ce sont 3 conventions de partenariats supplémentaires qui ont été signées durant cette matinée afin d’alimenter la ramification du réseau E2C Mayotte.
Un réseau qui mutualise déjà ses moyens auprès d’autres entités majeures de notre île tel que le Régiment du service militaire adapté (RSMA) : « Contribuer au développement économique de notre territoire tout en aidant nos jeunes à sortir de leurs difficultés au moyen d’une formation et d’un emploi, ce sont des valeurs que nous partageons. Nos années d’implantation permettent d’apporter notre expertise et nos conseils auprès de l’E2C mais également de nos soutenir mutuellement au profit de ces mêmes jeunes. Si un de nos stagiaires ressent qu’il s’est trompé dans son intégration au régiment, nous pouvons l’orienter vers cette école et réciproquement pour offrir un épanouissement dans l’élaboration de son projet de vie » nous indique le commandant Christophe Toussaint.
Déroulé du parcours
Chaque année, c’est un roulement de 3 formations qui se succèdent comportant pour chaque promo une petite dizaine d’élèves. Des élèves à qui il est demandé de trouver en introduction d’année, un stage de manière autonome tout en dessinant son projet professionnel. Chaque projet se veut légitimement singulier; c’est aussi ce qui fait la force et la valeur de cette école dont le parcours de formation s’étale sur une période de 7 mois, contre 4 à 5 mois en Métropole, sachant les grandes difficultés et lacunes rencontrées avec notre jeune public mahorais. Durant ce parcours, un temps d’approfondissement, voire d’apprentissage, des connaissances minimales est inclus dans le programme pédagogique auquel se greffe 5 stage en alternance. Une judicieuse articulation qui permet à l’élève de toucher du doigt le monde professionnel, tout en continuant à être soutenu par l’école en parallèle.
À l’issue du cursus global, c’est un accompagnement de 12 mois qui continue à être apporté à tous ces jeunes afin de garantir une concrétisation positive de leur respectif projet : « Il est certain que nos jeunes à Mayotte ont besoin de plus de soutien et d’encadrement qu’en national. Alors qu’un élève en Métropole suit 4 mois de formation et présente une sortie déclarée positive après 5 mois, cela représente un encadrement global de 9 mois contre 19 mois ici. Et même si c’est plus long, cela fait ses preuves » nous explique Salha Es Sassi, directrice du Pôle insertion et vie sociale Mlezi Maore. Des preuves concrètes et épanouissantes comme nous le raconte Amina : « J’ai eu l’opportunité d’intégrer cette école qui m’a offert des connaissances pratiques afin de mieux me vendre auprès d’un employeur. Grace à cette mise en confiance j’ai trouvé moi même mes stages qui m’ont apporté en plus la maturité nécessaire pour murir mon projet. J’ai postulé pour l’ouverture prochaine du Carrefour de Combani et ma candidature a été retenue ».
À ces limpides visions de parcours professionnels se greffent également des élèves qui ont l’opportunité de découvrir en cours de formation d’autres aubaines et/ou vocations comme Kaoula qui initialement était partie dans une formation de secrétariat médical avec des stages réussis en la matière mais qui, grâce à l’école de la deuxième chance, a pu également découvrir le milieu de la petite enfance, ce qui a été une révélation pour elle : « Je me sens réellement bien avec les enfants, c’est vivant. À la fin de mon cursus E2C je souhaite intégrer un CAP petite-enfance tout en passant mon Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (BAFA) pour travailler aussi dans l’animation, toujours auprès des enfants ».
Après l’élaboration d’un dossier complet d’inscription allié à un entretien de motivation poussé, les jeunes intègrent l’E2C de Mayotte sous une casquette de stagiaire de formation professionnelle et touchent une rémunération mensuelle moyenne de 500 euros financée principalement par le Conseil départemental. Depuis 2021, ce sont 91 jeunes qui ont pu bénéficier du sérieux de cette école.
MLG
*Créé en 2004, le Réseau E2C France est reconnu depuis le 23 décembre 2019 comme instance labellisatrice par France compétences.