Après une précédente visite sur la commune de Dembéni, c’est une importante délégation composée des membres du GAL Est, de la Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF) et d’acteurs départementaux qui arrivent à proximité de l’aire de jeux de Passamainty. Bien que la zone se prête encore aux derniers travaux de circonstance, relatifs notamment à la modernisation de la voirie et l’aménagement de ce chantier Caribus, l’atmosphère se veut paisible et le cadre verdoyant. Une sorte de havre de paix, ouvert il y a peu, encore camouflé qui, par l’efficace magie du bouche à oreille, gagne doucement mais sûrement en notoriété. Et pour cause…
Pour transformer et valoriser made in local
Parti du triste constat qu’il n’existait guère de chaine réellement professionnalisée en lien avec la valorisation de nos produits locaux, Sidi Moukou Hamada a souhaité créer son propre concept de fabrication de fruits séchés, de thé et de jus frais. À consommer sur place ou à emporter, chez Eco Eco tout se veut délicieux et 100% naturel. Voilà le secret ! « Lorsque vous allez dans les magasins, ça n’est pas évident de trouver ce genre de produits ou alors cela est industrialisé et importé de je ne sais où (…) Ce projet est né d’une profonde envie de re-prioriser l’approche environnementale et les circuits courts. En plus de mon propre champ, je travaille avec 2 producteurs qui ne sont pas loin; un moyen pour moi de créer de la résilience et de développer localement de l’économie ». C’est dans le cadre de l’achat de matériels de production, de l’aménagement de son local de vente et de restauration, ainsi que la perceptive d’un proche recrutement, que l’intéressé a fait appel à ces fonds européens LEADER pour un financement global de 50 135 €
Le GAL met un point d’honneur à l’accompagnement personnalisé
Pour pouvoir prétendre à des subventions européennes de type LEADER*, qui sont un peu perçues comme le bonus FEADER propres aux aspirations de développement des zones rurales, les porteurs de projets s’adressent donc au Groupe d’action locale rattaché à leur zone. Il en existe 3 sur notre département : le GAL Nord et Centre, le GAL Ouest Grand Sud et le GAL Est.
Bien que son dossier se voulait déjà relativement avancé, Sidi Moukou Hamada a été des plus agréablement surpris dès sa première prise de contact avec ladite structure précitée : « Lorsqu’on passe les portes d’une telle administration, surtout dans le cadre de financements européens, on s’attend clairement à ce qu’on nous donne des tonnes de papiers et on se débrouille avec ça. Mais là pas du tout, j’avais une personne référente à qui parler, j’ai été accompagné, aiguillé et soutenu; cela fait énormément de bien, croyez-moi ». L’intérêt de passer par les services du GAL c’est qu’il existe justement un accompagnement personnalisé afin d’élaborer et/ou peaufiner le projet, auquel se greffe un comité technique en charge de vérifier les divers points et spécificités propres à la mise en place du dossier. Un certain nombre d’experts sont rattachés à ce comité. C’est la seule mesure sur les fonds européens qui bénéficie d’un tel accompagnement ramifié, au plus près du porteur de projet mais qui comprend également un animateur.
Pour la zone Grand Est, c’est Sikina Madi Ousseni. Depuis la mise en place de ce programme LEADER, elle a participé à la création concrète de 22 projets : « Nous ne sommes bien évidemment pas là pour rédiger ces dossiers à leur place mais nous faisons en sorte que tous les critères soient remplis afin que la validation finale soit actée lors de la commission d’évaluation ».
Quels sont ces critères justement ?
En fonction d’un diagnostic terrain, propre à chaque zone, il est établi en amont du lancement des programmes, avec l’appui des acteurs locaux, une liste de critères en lien avec les problématiques, singularités et besoins relatifs à ces respectives zones. Pour le GAL Est et le programme LEADER 2016-2022, il était question de s’orienter sur les 4 thématiques suivantes :
- Patrimoine et Savoir-faire ( environnement, développement touristique…) ;
- Produit locaux et Création ( approvisionnement, transformation produit, création de marché et de points de vente en circuit court…) ;
- Professionnalisation ;
- Culture et liens sociaux ( tous les projets en lien avec la culture qui favorise les liens sociaux ).
L’étude de terrain pour le programme LEADER 2023-2027 a justement eu lieu en fin d’année dernière. Les précédentes thématiques ayant été des plus pertinentes, elles se voient reconduites et enrichies, de surcroît, par 3 autres :
- Mobilité ;
- Cadre de vie et Services de proximité ;
- Numérisation (aide et soutien dans le cadre de procédures dématérialisées…).
Car tout ne peut être si simple…
Le bémol prédominant de ces fonds, c’est la démarche finalement très réductrice et complexe d’un système bancaire classique. En somme, le porteur de projet doit avoir obligatoirement fait une demande de subvention avant d’avoir engager des dépenses. À cela se greffe par la suite, l’avance de paiement sur fonds propres, pour pouvoir ensuite prétendre au remboursement européen. S’il rencontre un quelconque souci avec son centre financier ou un problème de trésorerie pour X ou Y raison et qu’il n’est pas en mesure d’acquitter ses factures, le porteur de projet ne peut débloquer son remboursement LEADER. Une approche plutôt limitative au niveau des potentiels profils qui peuvent prétendre à ce programme, surtout au regard de notre territoire.
Cette rigidité législative imposée par l’Europe se veut au final quelque peu assouplie en certains points, notamment au regard des praticités et singularités locales. Sans pour autant parler de dérogation, les équipes de la DAAF Mayotte, en leur qualité d’autorité de gestion des FEADER/LEADER, se veulent aussi compréhensives, intelligentes et humaines. Pour exemple, dans le cas de notre tout nouveau gérant Eco Eco qui table sur un travail de produits majoritairement locaux et qui a aussi fait le choix, pour raison économiquement transparente, d’importer uniquement son miel bio, depuis Madagascar, et bien avec les lois européennes, il n’est plus question d’un projet 100% local : « Sachant le coût extrêmement important de ce produit sur Mayotte, son but c’est de pouvoir vendre des produits à des prix abordables à sa clientèle, raison pour laquelle il a fait le choix de plutôt importer. Il est important que la mise en route de son commerce soit rentable » indique avec lucide bienveillance Clara Bosznay, coordinatrice du programme LEADER au sein de la DAAF avant de poursuivre :
« Lorsque l’on ressent l’envie, l’engagement et la bonne foi de gens, il est important de faire confiance. Alors bien sûr, le comité n’a pas le pouvoir de vérifier la pleine traçabilité de ses produits mais dans un accord de principe et, encore une fois, de confiance, il est demandé à ce qu’au moins 50 % des produits exploités soient locaux ».
C’est donc les papilles épanouies, et la satisfaction d’avoir vu au concret ce pour quoi ils ont administrativement travaillés, que les divers membres des comités techniques et institutionnels sont repartis avec les mains pleines d’achats de ces merveilleux produits qui avaient ce goût délicieusement de »je ne sais quoi » mais surtout de naturel… Si vous passez du côté de Passamainty, n’hésitez pas à y faire une pause. Ressourcement en divers points garanti !
(Pour les porteurs de projets en devenir, le programme 2023-2027 est donc lancé avec une enveloppe validée d’1 million d’euros; il serait bien dommage de ne pas tenter de franchir le pas)
MLG
*Le programme LEADER est une sous-ramification du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) dont l’autorité de gestion se rattache à la Daaf.