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Mamoudzou

Une motion sur la délinquance s’invite à l’assemblée départementale

Les conseillers d’opposition par les voix de Soula Saïd Souffou et Elyassir Manroufou, pointaient l’inefficacité de la politique de lutte contre les violences entre jeunes. Se nourrissant des évènements de la Cité du Nord, la présentation des préconisations restait partielle et à enrichir.

C’est sur le ton solennel qu’on lui connaît que Soula Saïd-Souffou, conseiller départemental de Sada-Chirongui, lisait ce jeudi lors de l’assemblée plénière une motion sur la prise en compte de l’insécurité par le Département au sein d’un Comité départemental de prévention de la délinquance, mais qui visait essentiellement l’Etat.

Au nom du groupe d’opposition « Le choix des Mahorais », lui et Elyassir Manroufou (Mamoudzou 2) évoquaient les actes de violence qui faisaient écho aux événement de la Cité du Nord, « nous avons entendu l’appel de détresse de notre collègue Zouhourya Mouayad Ben sur les violences commises au Nord », la conseillère départementale de Mtsamboro s’était rendu immédiatement sur place.

Pour l’élu de Mamoudzou 2, les actions de prévention de la délinquance ne sont pas assez visibles, « nous finançons des associations avec de l’ingénierie externe qui ont pris beaucoup de marges de manœuvre dont on peut critiquer l’action, comme Mlézi par exemple. On a du mal à identifier qui fait quoi ». Il demandait la mise en place d’un Schéma de prévention de la délinquance, et un travail sur « un bilan des politiques publiques ».

Se basant sur ces violences inédites dans un établissement scolaire, les conseillers d’opposition plantaient un décor digne d’une couverture de Paris Match  : « À Mayotte, l’école de la république est devenue une zone de guerre où des organisations terroristes agissent en bandes organisées pour semer la terreur à coups de machettes, de haches, de bidons d’essence, de jerricanes de pétrole lampant, de caillassages intempestifs sur les bus et d’incendies criminels à répétition sur les biens publics et privés. La situation est explosive, angoissante, insoutenable pour les élèves, les parents d’élèves, les enseignants et toute la communauté éducative. »

Gendarmerie, police, Mayotte
Une sorte de Groupement d’Intervention Régional (GIR) bis

Une cellule mixte Police-Gendarmerie

Parmi les multiples causes identifiées, la surpopulation scolaire, « Des lycées et collèges construits pour recevoir une moyenne de 600 à 800 élèves peuvent, aujourd’hui, accueillir plus de 2?000 élèves avec un taux d’encadrement souvent inférieur aux normes nationales », une « doctrine d’intervention des forces de l’ordre qui n’est plus adaptée à la réalité des violences avec armes ».

Un état de fait qui « nuit gravement à la continuité éducative, à la qualité des enseignements, à l’attractivité de notre académie et affecte, visiblement, l’égalité des chances et favorise, malheureusement, l’échec scolaire ».

En découlent plusieurs propositions classées en trois catégories : administratives, policières et pénales. Les premières évoquent les travaux de sécurisation des établissements scolaires, l’alignement de l’encadrement scolaire sur les normes nationales, l’exclusion des élèves violents, la construction de centres éducatifs fermés, le renforcement du suivi psychologique pour les victimes et « un comité de suivi regroupant toutes les institutions intéressées par les questions liées à l’école, à la prévention, à la justice et à l’ordre public ».

En ce qui concerne les forces de l’ordre, leur « doctrine d’intervention » de « mise à distance des manifestants et d’usage de la force qu’en cas d’absolue nécessité », est considérée comme pas adaptée, il est demandé notamment de « créer une cellule mixte Police-Gendarmerie dédiée à la maîtrise des bandes, manifestement structurées en sous-groupes dans plusieurs communes de l’île », de contrôler identités et armes par destination dans le périmètre des établissements scolaires, et d’instaurer une « coopération renforcée entre les chefs d’établissements scolaires et les services de police, brigades de gendarmerie et associer les polices municipales, le cas échéant, pour les interventions préventives et/ou répressives au sein de l’école. »

Au chapitre justice, d’augmenter le nombre de places de détention pour mineurs, construction de centres éducatifs fermés.

Prise de conscience des élus

Elyassir Manroufou demandait une évaluation des politiques publiques de prévention

A l’issue de cette lecture, le président Ben Issa Ousseni se disait en désaccord avec certains termes employés, « notamment avec plusieurs qualificatifs », mais proposait de le présenter à la prochaine plénière, « pour sortir un document de consensus sur ce sujet », et « après avoir associé les maires et les parlementaires ».

En effet, si ce document reprend les manquements de l’Etat, notamment sur la surpopulation scolaire, et donc l’immigration, ou une méthode sécuritaire aux résultats mitigés, il fait abstraction des ressorts sociaux à l’origine des violences, comme le déficit de parentalité avec des pères absents, ou les agressions intrafamiliales, etc. D’autre part, même si les établissements sont atteints de gigantisme, c’est rarement en leur sein que les violences se commettent, mais en périphérie.

Notons que plusieurs préconisations ont déjà obtenu des réponses, sur la sécurisation des établissements scolaires, les contrôles des sacs, ou la création d’organe de concertation que sont les Conseils locaux de sécurité et prévention de la délinquance, mais ils sont sous-utilisés pour ces deux derniers.

Zouhourya Mouayad Ben active sur la mise en place des solutions à la Cité du Nord

On ne peut que se réjouir que le sujet s’invite au sein de l’assemblée du Département, et plus largement, souligner la prise de conscience des élus de leur rôle. C’est le maire de Chirongui et la conseillère départementale du canton qui à 3h du matin étaient présents lors du blocage ubuesque de la route par les habitants cette semaine, c’est la conseillère départementale de Mtsamboro qui était sur place lors des violences à la Cité du Nord, et le maire d’Acoua prompt à travailler sur le sujet. Tout cela est nouveau, auparavant, il fallait chercher les élus.

Pour autant, les réponses aux faits ne doivent pas être biaisés, et rien ne doit être éludés si l’objectif est vraiment de trouver des solutions départementales aux problèmes de violences.

Anne Perzo-Lafond

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