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Le volcan Fani Maoré révolutionne les hypothèses sur la création de l’archipel des Comores

Selon de nouvelles études scientifiques publiées dans Futura-Sciences et le journal du CNRS, un immense corridor volcanique aurait été découvert près de Mayotte. D’autre part, on apprend que la « naissance » de Fani Maoré serait d’origine tectonique entre la plaque somalienne et une deuxième plus petite appelée Lwandle.

Toute la population mahoraise se souvient de ce fameux mois de mai 2018, le 10 plus exactement quand la terre s’est mise à trembler à Mayotte. Point culminant de cette activité, le 15 mai avec un séisme atteignant 5,9 sur l’échelle de Richter, du jamais vu ! Pendant plusieurs jours et plusieurs semaines des secousses ont rythmé le quotidien des Mahorais générant de la tension et surtout de nombreuses interrogations. « Mayotte n’étant pas considéré comme un territoire potentiellement à risque. La zone était assez peu étudiée car il ne s’y passait pas grand-chose », avoue Éric Humler, président du comité des très grands équipements scientifiques et grandes infrastructures (TGIR) du CNRS.

Idem pour Aline Peltier, volcanologue à l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP) et directrice de l’Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise, à La Réunion « Si quelqu’un nous avait dit, avant la crise, qu’il y aurait un séisme de 5,9 à Mayotte, on aurait eu du mal à le croire », admet-elle. En effet, à 50 kilomètres au large de l’île, un énorme volcan sous-marin venait de surgir sur le fond océanique.

Une forte mobilisation de la communauté scientifique pour expliquer ce phénomène

L’archipel des Comores s’avère être très actif concernant l’activité volcanique et ce contre toute attente comme l’avait déjà souligné en 2014, Frédéric Lacquement, du Service géologie du Bureau de Recherches géologiques et minières (BRGM). « Jusqu’à présent, on pensait avec certitude que les quatre îles, alignées de la plus ancienne, Mayotte et ses 8 millions d’années, à la plus récente, Grande Comore, « jeune » de 100.000 ans, était nées d’une montée de magma, communément appelé « point chaud » par les géologues ».

Or, une étude menée par le BRGM concernant l’archipel des Comores ne semblait pas confirmer cette hypothèse, à savoir que l’alignement des quatre îles est perpendiculaire à celui de l’alignement de la plaque océanique. Frédéric Lacquement estimait alors à l’époque qu’« Il est possible que la fracture liée à l’apparition d’un océan entre Madagascar et l’Afrique, provoquant l’écartement puis le glissement de la première vers le sud, ait provoqué des fissures. La croûte terrestre en se brisant a alors fabriqué elle-même du magma en petite quantité, qui est remonté pour former Mayotte, puis Anjouan, Mohéli et enfin Grande Comore. C’est ce qui expliquerait la petite taille des îles, le volume de magma produit étant très faible et se libérant sur la courte distance devenue Canal du Mozambique. Ce n’est qu’une théorie de plus, aucune grosse étude n’ayant été menée sur cet archipel », expliquait alors le scientifique.

L’alignement des îles est perpendiculaire à celui de la plaque océanique (en noir) ©brgm

Afin d’être sûr, plusieurs missions en mer ont été menées dont Revosima (2019) et Sismaore (2020-2021). Il en ressort que l’activité volcanique ne serait pas liée à un point chaud mais davantage à la présence d’une ancienne croute océanique âgée de 170 millions d’années. C’est ainsi que les scientifiques ont mis au jour un immense corridor volcanique de 200 km de large et 600 km de long regroupant plus de 2200 volcans sous-marins qui s’alignent sur la jonction de deux plaques tectoniques, celles de Somalie et Lwandle

Pour Vincent Famin, chercheur au Laboratoire GéoSciences Réunion « À ce moment-là, on ne savait pas si les séismes étaient d’origine volcanique ou d’origine tectonique, raconte-t-il. Or, la différence était de taille. Si l’origine était volcanique, il était peu probable que des séismes plus puissants surviennent. En revanche, si elle était tectonique, toute magnitude était possible… ».

Une remise en cause des théories concernant l’histoire de la formation des Comores

La mission Mayobs 1 en 2019 a ainsi permis de déterminer que le volcan se situait à 50 km des côtes et à 3500m de profondeur et qu’il crachait jusqu’à 400 mètres cubes de lave par seconde. Elle a révélé aussi la présence d’importantes remontées de gaz provenant du plancher océanique sur une zone appelée Fer à Cheval, à 10 kilomètres de Mayotte. En quelques mois un cône de 800 mètres de hauteur et de 2 kilomètres de diamètre s’était formé, ce qui a fait dire à l’époque à Aline Peltier que « C’est la plus grosse éruption effusive qu’on connaisse après l’éruption du Laki, en Islande, en 1783 ».

Les volumes de magma étaient si importants qu’au cours de cette éruption sous-marine l’île de Mayotte s’est déplacée de 24 centimètres vers l’est et s’est enfoncée de 19 centimètres. « Les premières secousses, celles de mai 2018, ont été produites par la remontée de magma dans une écorce terrestre fracturée. Le magma a fait de la surpression et cassé la roche afin de se frayer un passage vers la surface océanique. Les secousses suivantes, à partir d’août 2018, résultent probablement de l’effondrement de la chambre magmatique après s’être vidée de sa lave pour alimenter le volcan », explique Jérôme Van der Woerd, chercheur à l’Institut Terre et environnement de Strasbourg.

La mission Sismaoré (2021) a révélé l’existence de centaines de volcans sous-marins. « Le but de Sismaoré était d’élargir le champ de vision en étudiant le volcanisme à l’échelle des Comores », explique Vincent Famin. Les chercheurs en ont profité également pour effectuer différents relevés et récupérer des échantillons de roche permettant de déterminer l’âge de ces volcans. Il apparait que certains dépôts volcaniques sur les îles de Mohéli et d’Anjouan dateraient de 8 000 et 9 000 ans.

Longtemps ont a considéré que la formation de l’archipel des Comores correspondait à un point chaud comme c’est le cas en Hawaï par exemple. Cette théorie a été remise en cause avec l’apparition de Fani Maoré qui montre que le coulissement de deux plaques dans des directions contraires provoque des remontées de magma, comme l’explique Vincent Famin : « Le volcanisme des Comores est un volcanisme de limite de plaques. Nous pensons que cette zone volcanique est en fait la continuation du rift est-africain qui se prolonge ensuite vers Madagascar. Il va nous falloir dater et analyser les roches recueillies pour le prouver. »

Le Marion Dufresne, surnommé aussi Le Marduf, effectue des recherches océanographiques pour l’IFEMER

Les campagnes en mer menées ces dernières années ont permis de mettre en place des outils de surveillance

« Personne ne peut dire ce qui va se passer, s’inquiète Jérôme Van Der Woerd. La seule consolation, c’est que le volcanisme prévient ». C’est dans cet objectif de surveillance que Révosima (Réseau de surveillance sismologique et volcanique de Mayotte) a été pensé. Il est opéré par l’IPGP et ses partenaires. La partie opérationnelle de surveillance H24 est basée à l’Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise à La Réunion, ce qui permet ainsi de surveiller en temps réelle les évolutions de Fani Maoré. « Le Révosima est un bel exemple d’intégration de diverses disciplines. C’est un modèle pour savoir comment réagir en cas de crise. Un modèle qui peut valoir au-delà de Mayotte, par exemple aux Antilles, où il y a aussi de l’activité volcanique et tectonique sous-marine. » se félicite Éric Humler.

Ainsi, Mayotte compte onze stations sismiques permanentes et neuf bornes géodésiques, points de repère GPS qui permettent de suivre en continu la déformation et les déplacements de la surface terrestre. Elle compte aussi une station pour mesurer le bullage (endroits par où des gaz sortent de la Terre).

Largage d’un sismomètre de fonds de mer (OBS) dans la zone du volcan en février 2019

Par ailleurs, des sismomètres ont été déposés près de Fani Maoré ainsi que des planeurs sous-marins autonomes. Cela permet d’une part de mesurer son intensité de façon permanente mais aussi de surveiller constamment la zone des panaches. Enfin, une station sous-marine appelée Marmor est en projet. Pilotée par l’Ifremer et placée sur le Fer à Cheval, elle réalisera de la surveillance permanente et continue de l’activité sismo-volcanique et des phénomènes associés comme les panaches.

Longtemps considérée comme une zone à faible intensité sismique voire quasi nulle, l’île de Mayotte fait dorénavant l’objet de toutes les attentions de la part des scientifiques du monde entier. Sa zone maritime permet ainsi d’observer la création et l’activité d’un volcan sous-marin. De plus les études réalisées ces dernières années permettent de mieux évaluer les risques sismiques concernant l’archipel et d’adapter des normes et des mesures en conséquence, notamment pour les populations.

B.J.

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