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Assemblée du CESEM : Mayotte, un territoire de discrimination institutionnalisée ?

Lors de l’assemblée plénière de ce lundi, le CESEM a présenté la synthèse du rapport « À Mayotte qui fait quoi ? Entre opportunité d’agir et intérêt à réagir ». Présenté par la présidente et le rapporteur de la Commission affaires générales, financières et internationales, ce document se veut dresser un constat sans ambages de la situation à Mayotte.

Pas moins de 8 propositions déclinées en plus d’une trentaine d’actions, telles sont les conclusions de la synthèse du rapport du Conseil Economique, Social et Environnemental de Mayotte (CESEM) ayant trait à la répartition et l’exercice des compétences territoriales sur le département. « Un sujet dense et passionnant ayant nécessité un an de travail », souligne Saoudat Abdou, présidente de la Commission affaires générales, financières et internationales du CESEM.

Ce travail a été mené suite à une réflexion de la commission concernant l’analyse de la mise en œuvre du contrat de convergence et de transformation 2019-2022. Au regard du nombre conséquent d’acteurs impliqués, l’interrogation s’est promptement orientée sur la répartition des compétences entre les acteurs publics sur le département et le portage des politiques publiques. « Dans le cadre des entretiens menés, témoigne Haoussi Boinahedja, on s’est rendu compte que si les projets n’avançaient pas, les acteurs interrogés indiquaient que cela ne dépendaient pas d’eux mais des autres parties prenantes présentes ».

Quelques mots introductifs du président du CESEM

Un environnement institutionnel complexe

Ce fourmillement d’acteurs évoluant dans un contexte institutionnels en transformation constante, qu’il s’agisse de la départementalisation en 2011, la rupéisation en 2014 ou encore l’émergence des intercommunalités en 2015, participe à la complexification du paysage institutionnel. Dès lors, précise Saoudat Abdou « dans ce contexte particulier, l’Etat intervient et prend la main sur des aires de compétences qui sont du ressort des collectivités ». Le CESEM pointe ainsi que « le processus de décentralisation n’est toujours pas abouti », alors que ce dernier est initié à Mayotte depuis 2004.

S’agissant de la déconcentration, même constat. Cette dernière reste « partielle » au regard de « l’absence de l’ensemble des services déconcentrés » ainsi que de « l’implantation d’antennes et de délégations locales dont la direction est assurée en dehors du territoire de Mayotte ». Cette situation aboutit à « des relations déséquilibrées en faveur de l’Etat », le CESEM préconisant que la défense « par les élus locaux » des « principes qui régissent les relations entre l’Etat et les collectivités locales » afin de bénéficier de « la liberté d’administration ». « Mayotte est devenue un territoire de dérogation institutionnalisée », constate la présidente de la commission. Elle ne manque pas d’illustrer ses propos par quelques exemples, tels que la construction des lycées relevant de la prérogative de la région.

Les lacunes en matière d’ingénierie territoriale entravent le développement

Présentation du rapport et de ses propositions

Le conseil remarque également que le Conseil départemental fait face « à une fragilité de son mode de financement » qui reste dérogatoire, ainsi qu’à un pilotage insuffisant de ses moyens humains et matériels » ne lui permettant pas de remplir pleinement « son rôle de chef de file dans le pilotage des politiques publiques ». De manière plus générale, au regard du déficit d’ingénierie territoriale, l’Etat « a tendance à vouloir reprendre en main les compétences des communes ». Une situation pointée du doigt par le CESEM dans la mesure où « cette méthode ne permet pas de répondre durablement à leur besoin de montée en gamme ».

Cette problématique semble aller de pair avec celle de la « faiblesse des dotations des collectivités locales » perçue comme « une entrave à l’efficacité de l’action publique ». A ce titre, le rapporteur de la commission rappelle que « si la Guyane bénéficie d’un effort budgétaire de l’Etat de l’ordre de 8 247 euros par habitant, à Mayotte il n’est que de 4 390 euros en 2022, le plus faible de France ». « A se demander, selon lui, si Mayotte n’est pas un territoire de discrimination institutionnalisée ». Certes malgré de multiples propositions mises en avant, aussi bien celles concernant la rénovation et le rééquilibrage des relations entre l’Etat et les collectivités territoriales, ou encore la promotion et l’action pour un développement endogène du territoire, Abdou Dahalani président du CESEM, note néanmoins que « ce travail est à titre indicatif, à charge aux pouvoirs publics de s’en saisir ».

Pierre Mouysset

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