Étude de l’Insee sur les femmes à Mayotte : des progrès mais une situation encore précaire

Le panorama dressé par l’Insee et la Préfecture, représentée par la Direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité de Mayotte et publié ce mercredi, renseigne la situation des femmes de l’île dans six grandes thématiques économiques et sociales. Ces analyses permettent d’appréhender leurs réalités en comparaison de celles des femmes de l’Hexagone mais aussi des hommes de l’île.

Si le taux d’emploi des femmes reste faible à Mayotte, il progresse incontestablement. Depuis 2009, il est passé de 22 à 27 %, mais reste largement inférieur à la situation de France métropolitaine (63 %). A niveau de diplômes équivalents, les femmes accèdent moins à l’emploi que les hommes mais elles représentent un emploi sur deux dans la fonction publique. Par ailleurs, si entre 1997 et 2017 le nombre de femmes cadres a été multiplié par 5, elles atteignent cependant moins souvent ces types de postes que les hommes. En outre, elles sont quasiment absentes des hautes responsabilités en politique. A titre d’exemple, aucune femme n’est maire à Mayotte.

Dans le secteur de la scolarité, des écarts qui se réduisent avec les hommes

Des écarts qui se réduisent notablement

Concernant la scolarité des femmes, leur écart avec les hommes s’est réduit au fil des générations. Alors que parmi celles âgées de 50 à 59 ans, 70 % ne sont jamais allées à l’école – contre 31 % pour les hommes – l’écart se réduit entre 40 et 49 ans à 39 %. En dessous de 40 ans, les femmes et les  hommes ont eu un accès équivalent avec seulement 5 % qui ne sont pas allés à l’école. Le niveau de formation augmente également fortement d’une génération à l’autre : 75 % des femmes natives de l’île, âgées de 20 à 29 ans disposent d’un diplôme qualifiant (au moins un CAP ou BEP) contre 31 % pour celles âgées de 40 à 49 ans.

Les femmes sont en outre scolarisées plus longtemps que les garçons : à 18 ans, 76 % des filles nées à Mayotte sont encore scolarisées contre 66 % des garçons natifs. Malgré cette scolarité prolongée, 44 % des jeunes femmes ayant quitté le système scolaire ne sont ni en emploi ni en études ni en formation en 2019, soit 10 points de plus que les hommes.

Précarité et accès aux soins, de fortes disparités

Si en 2017, 40 % des femmes de 20 à 24 ans vivaient en couple contre seulement 24 % dans l’Hexagone, dès 30 ans, elles y vivent moins souvent, c’est le cas de 63 % des femmes de 30 à 34 ans, contre 70 % dans l’Hexagone. Contrairement à la France métropolitaine, les mères isolées vivant seules avec des enfants sont bien plus nombreuses à Mayotte, 23 % contre 12 %. Ces familles monoparentales vivent dans une grande précarité : 94 % des personnes y vivant sont sous le seuil de pauvreté, contre 77 % des autres habitants de Mayotte.

Alors que les femmes à Mayotte ont une espérance de vie s’élevant à 76 ans, elle reste de 9 ans inférieur à celle de l’Hexagone. Par ailleurs, 12 % des femmes de 15 ans ou plus se déclarent en mauvaise ou très mauvaise santé et 34 % sont en situation d’obésité, soit une part deux fois plus élevée qu’en France métropolitaine. Elles ont également beaucoup moins recours aux soins : 10 % des femmes n’ont jamais consulté de médecins généralistes et 54 % de spécialistes. Un constat similaire pour les recours aux dépistages : 86 % des femmes à Mayotte n’ont jamais effectué de mammographie contre 38 % des femmes dans l’Hexagone.

A Mayotte, les femmes davantage victimes de violence

Si entre 2018 et 2019, 5 % des femmes âgées de 18 à 75 ans dans l’Hexagone déclarent

Les femmes davantage victimes de violence physiques et sexuelles

avoir subi des violences physiques ou sexuelles à l’intérieur ou à l’extérieur du cercle familial, à Mayotte ce pourcentage s’élève à 9 %. Les violences sexuelles sont bien plus élevées à Mayotte : 5 % des femmes adultes déclarent en avoir été victimes au moins une fois au cours des deux dernières années, contre 1 % dans l’Hexagone. Toutefois, qu’il s’agisse des menaces, insultes ou discriminations, leur nombre est moins élevé à Mayotte : 9 % des femmes déclarent en avoir été victimes contre 15 % en France métropolitaine.

Cette étude, véritable creuset d’information, apporte un éclairage dans des domaines aussi divers que variés. Elle permet notamment de constater une amélioration des conditions des femmes dans le secteur de la scolarité et de l’emploi, même si cette dernière est loin d’être satisfaisante.

Pierre Mouysset

Partagez l'article :

Subscribe

spot_imgspot_img

Les plus lus

More like this
Related

Les députés adoptent la suppression des titres de séjour territorialisés en 2030

Les échanges houleux entre députés étaient à prévoir, qui illustrent la méconnaissance du phénomène migratoire à Mayotte. L’évolution est à souligner au sein du gouvernement où le curseur commence à bouger. La mesure doit être assise sur une lutte contre l’immigration clandestine efficace… ce qui reste encore à démontrer

Au lycée de la Cité du Nord, la possible fin des récréations embrase la communauté éducative

Entre la contestation de la suppression des récréations, des pannes informatiques persistantes et des locaux dégradés, les enseignants du lycée du Nord dénoncent une situation de plus en plus intenable.

Intercommunalités de France, Interco’ Outre-mer et l’association des intercommunalités de Mayotte alertent sur une « loi de programmation » sans programmation

Les présidents d'Intercommunalités de France, d'Interco Outre-mer et d'Interco 976 (Mayotte), alertent sur la contradiction majeure entre une volonté politique et le projet de loi qui doit la traduire. Ils soulignent que le texte, en l'état, ne s’apparente pas à une loi de programmation réelle et ne donne pas aux territoires les moyens de la mettre en œuvre, risquant ainsi de transformer une promesse d'avenir en une crise durable.

Air Austral déplore un manque de repères pour poursuivre sa croissance

Hugues Marchessaux, président du directoire d’Air Austral et président d’Ewa Air et Drissa Samaké, directeur général d’Ewa Air, ont dressé, ce mardi 24 juin, le bilan de l’exercice 2024-2025 des deux compagnies. Avec des résultats d’exploitation positifs, malgré les événements perturbateurs et les contraintes, l’avenir semble prometteur, mais le manque de visibilité à moyen et long terme, notamment sur les infrastructures, laisse planer le doute.