Résultats de la première enquête sur les pratiques culturelles à Mayotte

L’Institut national de la statistique et des études économiques et le Département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation ont produit la première enquête culturelle à Mayotte. Une photographie inédite qui permet de mieux appréhender les pratiques linguistiques et les traditions de l’île.  

Il aura fallu attendre la sixième édition des enquêtes culturelles du Département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation (Deps-doc) pour que l’outre-mer soit inclus dans cette démarche de suivi des comportements culturels en France. Depuis 1973, seul l’Hexagone était concerné par cette pratique.

Une méthodologie robuste

« Dans chacun des départements d’outre-mer, les données recueillies sont exploitables de manière à part entière, alors qu’en France métropolitaine, tout est coulé dans un même moule », explique Amandine Louguet ayant participé à l’enquête pour le Deps-doc. Cette granularité inédite permettra ainsi d’exploiter des données précises pour chacun de ces départements. Pour l’île au lagon, les résultats portent sur les pratiques culturelles des Mahorais et Mahoraises avant le premier confinement lié à la crise sanitaire.

Menée entre octobre 2019 et décembre 2019, 1200 personnes âgées de 15 ans et plus ont été enquêtées à partir d’un questionnaire adapté aux réalités du territoire. Un dispositif d’enquête déclarative ambitieux et coûteux qui a nécessité jusqu’à une trentaine d’enquêteurs sur le terrain. « La robustesse de notre enquête dépend de la méthodologie », souligne Loup Wolff, directeur de l’Insee La Réunion-Mayotte. Une solidité

La langue de Molière moins répandue à Mayotte que le shimaoré

d’autant plus cruciale que l’enquête sera amenée à servir de référence à d’autres études thématiques, monographiques ou territoriales.

La langue française moins répandue que le shimaoré

L’enquête met ainsi en lumière que parmi les habitants de l’île âgés de 15 ans ou plus, 75% déclarent maîtriser le shimaoré et 18 % le kibushi, sachant qu’au total, 81 % des habitants de l’île déclarent maîtriser au moins l’une de ces deux langues ; la proportion grimpe à 94 % pour les natifs de l’île. A contrario, le français est une langue moins répandue puisque seulement 55 % des habitants de Mayotte déclarent le maîtriser. Si le lieu de naissance et l’âge ont une influence sur cette donnée, le niveau de diplôme n’est pas non plus à exclure. Même d’un niveau modeste, 9 habitants de Mayotte sur 10 ayant un diplôme déclarent maîtriser le français contre 4 non-diplômés sur 10.

La lecture de livres religieux explique la forte proportion de lecteurs

Pourtant, sur l’île 54 % des habitants déclarent lire des livres, une proportion moindre au regard de la situation en métropole (70 %) mais supérieure à La Réunion (42 %). Un constat qui peut sembler paradoxal compte tenu du taux élevé d’illettrisme en langue française mais qui s’explique par la lecture de livres religieux écrits en langue arabe : la moitié des lecteurs déclarent lire des livres religieux. Par ailleurs, contrairement à la métropole, les pratiques en amateur de la danse, du chant, de la musique et du théâtre sont davantage répandues à Mayotte qu’en la métropole, notamment grâce au debaa, le shigoma, le

Le chant et la danse davantage pratiqués à Mayotte qu’en Métropole

m’biwi.

Des équipements culturels limités qui restreignent les sorties culturelles

Si l’usage de la télévision et de la radio reste inférieur à Mayotte (85 % et 60 %) qu’en métropole (94 % et 82 %), le petit écran reste le moyen d’information le plus utilisé pour suivre l’actualité sur l’île (63 %). Concernant les sorties culturelles, les pratiques restent faibles compte tenu d’une offre restreinte d’équipements sur l’île. Ainsi, 4 % des habitants de l’île déclarent avoir visité un musée, 2 % avoir assisté à un spectacle de théâtre ou de danse contre 29 %, 21 % et 13 % en France métropolitaine.

Une première étude qui en appellera d’autres à l’avenir et permettra, avec le recul, d’analyser les évolutions des pratiques culturelles des Mahorais et Mahoraises et servir d’outils décisionnels pour les décideurs politiques.

Pierre Mouysset

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