Débuté ce mardi, le procès pour tentative d’assassinat et violences aggravées impliquant six accusés devant la cour d’assises des mineurs (et 5 autres qui seront jugés devant le tribunal pour mineur car ayant moins de 16 ans au moment des faits) s’est achevé ce soir, après de longues délibérations.
Les faits jugés remontent au 23 janvier 2018. Alors, un jeune homme de seize ans était violemment agressé à Hajangoua, tandis qu’il circulait en scooter. En dépit du huis clos et donc de l’impossibilité inhérente pour les journalistes et le public d’assister au procès, l’un des avocats nous raconte les faits tels que présentés lors de l’audience. Ainsi, la victime était attaquée par une bande alors qu’elle revenait du sud en deux-roues, après un premier passage quelques heures plus tôt. Si l’ordonnance de mise en accusation précise qu’il existait un précédent entre un membre de la bande des assaillants et la victime, le procès se serait orienté vers une agression gratuite perpétrée au nom de rivalités inter-villageoises entre Iloni et Hajangoua.
Violence gratuite ou vendetta organisée ?
Et quelle agression ! Voyant ce jeune d’Iloni passer une première fois, le groupe d’agresseurs décidait de tendre une embuscade, se postant ainsi à plusieurs endroits de la route jouxtant le centre équestre, de part et d’autre de la voie. Munis de bâtons et de pierres, ces derniers assénaient alors un violent coup de bâton au conducteur du scooter, à son passage, tandis que son acolyte parvenait à s’enfuir. Une fuite in extremis, le passager étant alors poursuivi par des membres du groupe, jusqu’à trouver un usager de la route prêt à l’évacuer des lieux. Preuve en est, pour l’avocat de la victime, que l’attaque n’était pas tant ciblée sur son client qu’un reflet symptomatique de la lutte perpétuelle entre ces deux villages.
Les faits qui s’ensuivent restent flous, bien qu’indiciblement violents. D’une façon ou d’une autre, la victime aurait perdu son casque dans la chute, à moins qu’on ne lui ait enlevé : c’est la tête nue que le jeune homme de 16 ans subit de multiples coups de bâtons. Ces derniers se brisent sur lui, les assaillants les remplacent et reviennent à la charge. Coups de pieds, coups de poings, coups portés avec son propre casque : les mutilations se multiplient, les assaillants allant même jusqu’à sauter sur la victime à pieds joints, pour au moins deux d’entre eux. La victime inerte se serait ensuite faite traînée sur le sol, déshabillée, recouverte d’un sac poubelle et laissée pour morte sur le bord de la chaussée. L’origine d’une tétraplégie permanente.
« Ce jour-là, mon client a perdu l’usage d’une partie de son corps et une partie de son âme sur cette chaussée sanglante »
Dix longues minutes d’un calvaire perpétré par au moins 15 individus, dont au moins 11 mineurs. Concernant les six présentés devant la cour d’Assises des mineurs, l’avocat général les aura fermement condamnés dans son réquisitoire.
Les peines requises se veulent lourdes : deux ans d’emprisonnement pour l’un des accusés, dix ans pour quatre d’entre eux, et quinze ans pour l’instigateur présumé des faits.
Selon lui, l’attaque n’aurait pas été directement dirigée contre le conducteur du scooter, mais s’inscrivant dans un conflit historique entre les deux villages.
Durant sa plaidoirie, l’avocat de la victime déclarera au tribunal et aux jurés que « ce jour-là, mon client a perdu l’usage d’une partie de son corps et une partie de son âme sur cette chaussée sanglante. Ce jour-là, les accusés ont choisi de l’asseoir définitivement dans un fauteuil, pour le restant de sa vie. Rendez-lui son statut de victime, et l’humanité qu’ils ont voulue lui voler. »
Finalement, après plusieurs heures d’attente, deux des accusés seront reconnus coupables de tentative d’assassinat et violences aggravées, soit respectivement 10 et 7 années d’emprisonnement. Les quatre autres accusés seront eux reconnus coupables de violences aggravées, et écoperont de peines allant de 2 à 3 ans.
Mathieu Janvier