Ce jeudi matin, sur le bureau du juge du tribunal administratif, les élections départementales des 20 et 27 juin à Sada. Mansour Kamardine et Tahamida Ibrahim, l’avaient emporté par 38 petites voix d’écart sur le binôme mené par Mohamed Assani Abdou. Ce dernier avait alors accusé dans un communiqué envoyé aux médias, une radiation arbitraire de près de 200 personnes des listes électorales, “à quelques jours des élections départementales des 20 et 27 juin 2021 et ce au mépris des dispositions du code électoral”. Des radiés dont une partie serait essentiellement « des personnes ou des familles liées à l’opposition municipale de la commune de Chirongui », qui le soutenait. Ses accusations se tournent alors vers l’équipe municipale de Chirongui, et il dépose plainte.
C’est celle-ci qui était jugée au tribunal administratif ce jeudi 3 février. Selon le fonctionnement de cette juridiction, le rapporteur public prend la parole pour exposer les circonstances des faits, et expose ses conclusions censées éclairer ses confrères juges qui statueront ensuite. Des conclusions qui sont généralement suivies. Il confirmait qu’il y avait bien eu des « manœuvres pour modifier les listes électorales peu avant l’élection ». Et constatait que le maire de Chirongui avait procédé à une radiation de 242 inscrits « liés à l’opposition municipale », et qu’il n’a pas ensuite réinscrit « 84 électeurs qui avaient pourtant obtenu une ordonnance de justice ». Il proposait donc « une annulation des élections ». Généralement, les conclusions du rapporteur public sont suivies par les magistrats.
« C’est une entreprise collective de captation ! »
Il ne retenait pas en revanche la demande de l’accusation d’une inégibilité de 3 ans des deux élus, en raison de manœuvres qualifiées par elle de « frauduleuse ». « On écarte cette conclusion même si ces manœuvres altèrent la sincérité du scrutin. »
C’est Me Laurent Tesoka qui intervenait pour Mohamed Assani Abdou. Il se réjouissait à peine des conclusions du rapporteur public, et poussait le curseur, voulant démontrer qu’il y avait eu fraude. « La binôme de monsieur Kamardine est adjoint au maire de Chirongui Et on assiste à la mobilisation de toute une équipe municipale pour faire gagner les leurs. Un adjoint qui n’est pas membre de la commission électorale radie des personnes, et ils ne prennent pas les 84 électeurs qui ont obtenu une ordonnance du juge pour être réinscrits. Bien sûr que la manœuvre est frauduleuse, c’est une entreprise collective de captation ! Trichez, trichez, il en restera quelque chose apparemment. Une simple annulation, c’est une péripétie dans la carrière politique du conseiller de Sada, dans 6 mois il sera réélu, puisque les électeurs réélisent en général les mêmes quand il y a eu contestation.
Je demande donc que soient prises les 2ème et 3ème sanctions prévues par les législateurs, c’est à dire la suspension et inéligibilité. »
La défense de Me Jean-Paul Ekeu était concentrée sur un axe, « les personnes qui ont obtenu une ordonnance n’ont pas été réinscrites car elles étaient déjà sur la liste ». En reprenant une liste de noms. Un argument qui n’a pas semblé convaincre le juge Gil Cornevaux, « je ne retrouve pas ces 84 électeurs dans la liste ». Et sur les sanctions plus sévères, Me Ekeu expliquait que « la complicité n’est pas démontrée, il faut prouver qu’il y a un lien (sous entendu entre la majorité de l’équipe municipale et son client), or, il n’y en a pas ».
Le délibéré devrait tomber la semaine prochaine.
Anne Perzo-Lafond