Mépris, dédain, dialogue de sourd, on peut dire que l’ambiance est toujours électrique entre les grévistes et l’exécutif du Conseil départemental de Mayotte. Après une décision unilatérale, les agents grévistes et l’intersyndicale ont opté pour la mise en place d’un durcissement du mouvement de grève en cours : « Nous avons décidé de durcir ce mouvement car le dialogue avec l’exécutif est devenu un langage de sourd. »
Les 1607 heures annuelles de travail cristallisent les tensions
Pour appliquer la durée annuelle de temps de travail dans la fonction publique, équivalente à 1607 heures, le Département de Mayotte avait voté pour la suppression des jours fériés pour les fêtes religieuses musulmanes, mettant fin au rythme de 1568 heures de travail pratiquées jusqu’alors. Depuis, le fossé se creuse entre le président du Département, Ben Issa Ousseni, favorable à cette adaptation aux règles pratiquées dans les autres collectivités territoriales françaises et les syndicats, furieux de ce balayage des réalités culturelles de Mayotte : « Les locaux semblent ignorer que, dans de nombreuses collectivités en France, des solutions adaptées sont mises en place pour prendre en compte les spécificités locales sans pour autant s’attaquer aux acquis sociaux. Dans des territoires comme la Corse, Strasbourg, ou encore La Réunion, on a par exemple ajusté le temps de travail quotidien ou annualisé le temps de travail pour respecter les particularités culturelles sans réduire les droits des agents. À Mayotte, il semble que cette option de compromis ne soit pas envisagée, et nous le vivons comme un mépris pour les réalités culturelles et historiques de notre territoire. »
« Cette paralysie pourrait devenir plus générale »
Les discussions entamées avec l’exécutif n’ont guère été favorables à un accord. Les représentants syndicaux s’estiment lésés face à un mur d’incompréhension, où leurs revendications auraient été « balayées d’un revers de main. » Pour se faire entendre, les grévistes ont bloqué ce lundi 4 novembre les barges qui assurent les liaisons entre Grande-Terre et Petite-Terre. D’ici là, le mouvement pourrait se durcir et s’étendre. À notre question sur la reprise des barrages comme lors de la crise sociale de janvier et février 2024, les syndicats assurent que rien n’est écarté : « Le durcissement de notre mouvement va principalement affecter les services de transport maritime, en particulier les barges. En l’absence de réponse de l’exécutif, cette paralysie pourrait devenir plus générale et s’étendre à d’autres services du département. »
Mathilde Hangard