Jeudi dernier, la Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, accompagnée des ministères concernés et de leurs directions générales (Direction générale des outre-mer, Direction générale de l’enseignement scolaire, Direction générale à l’emploi et à la formation professionnelle), a signé le premier plan interministériel de prévention et de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme en Outre-mer, dans une volonté de « garantir l’accès aux savoirs fondamentaux dans les territoires ultramarins ».
L’illettrisme encore très présent dans les Outre-mer

« Dans les départements et régions d’outre-mer, l’illettrisme demeure l’un des principaux freins à l’inclusion sociale, à l’accès à l’emploi et à l’égalité des chances », rappelle la Direction Générale des Outre-mer (DGOM) dans un communiqué, le 27 novembre. « Dans certains départements, jusqu’à un quart des adultes sont concernés et plus d’un jeune sur deux rencontre de graves difficultés de lecture. Les données disponibles montrent des taux d’illettrisme deux à cinq fois supérieurs à ceux de l’Hexagone : jusqu’à 25 % de la population à Mayotte, plus de 20 % en Guyane, autour de 12 % à La Réunion, 9 % en Guadeloupe et 8 % en Martinique ».
« Être en situation d’illettrisme, c’est aussi être plus vulnérable face aux inégalités et à l’exclusion », continue la DGOM. Les études menées par l’Insee le confirment : les personnes en situation d’illettrisme sont plus souvent touchées par la pauvreté. Elles occupent moins fréquemment un emploi durable, disposent de revenus modestes et rencontrent davantage de difficultés d’accès à la santé, à la formation ou au logement. Illettrisme et précarité se nourrissent aussi l’un de l’autre.
« L’illettrisme appauvrit les personnes autant qu’il appauvrit les territoires. Les conséquences de l’illettrisme ne se mesurent pas en effet seulement à l’échelle des trajectoires individuelles : elles touchent aussi la vitalité économique et sociale des territoires », avertit la DGOM. En réduisant les niveaux de qualification, l’illettrisme freine la compétitivité des entreprises, limite l’innovation et affaiblit l’attractivité des Outre-mer. Les acteurs économiques peinent à recruter, les services publics doivent compenser des fragilités de base et les dynamiques de croissance s’essoufflent.
Plusieurs acteurs pour un plan inédit

C’est pour répondre à cet enjeu que la DGOM lance pour la première fois, un Plan interministériel de prévention et de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme en outre-mer, couvrant la période 2025-2028. Ce plan a été élaboré en étroite collaboration avec la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO); la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et la délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté (DIPLP).
« L’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI), a apporté son appui méthodologique et son expertise technique tout au long de l’élaboration du plan. Le Service militaire adapté (SMA), acteur historique de la formation et de l’insertion des jeunes ultramarins, a également contribué au diagnostic territorial et jouera un rôle déterminant dans la mise en œuvre, en mobilisant ses savoir-faire en matière d’accompagnement, d’apprentissage et de formation professionnelle », précise la DGOM.
« Ce plan reconnaît et intègre pleinement les spécificités culturelles, linguistiques et géographiques des outre-mer », estime la Direction générale. « Le plurilinguisme, loin d’être un frein, doit être regardé comme une richesse et un levier pour l’apprentissage du français, langue de l’école et de l’emploi et de la citoyenneté. De même, les réalités propres à chaque territoire comme l’éloignement, les contraintes d’accès à la formation ou encore la diversité des parcours scolaires exigent des réponses sur mesure, proches de nos concitoyennes et concitoyens ultramarins« .
6 axes stratégique, 16 mesures
Le plan fixe une feuille de route structurée autour de 6 axes stratégiques et 16 mesures,
– Axe 1 : piloter et animer la politique de lutte contre l’illettrisme, fédérer l’existant et mieux le structurer
– Axe 2 : prévenir l’illettrisme dès la toute petite enfance et jusqu’à la scolarité obligatoire, en impliquant davantage les familles
– Axe 3 : systématiser le repérage des personnes en situation d’illettrisme
– Axe 4 : faciliter l’accès aux savoirs de base dans le monde du travail
– Axe 5 : mieux évaluer et mieux exploiter les résultats
– Axe 6 : communiquer et sensibiliser pour faire reculer l’illettrisme et l’illectronisme.
Ce plan prévoit de couvrir à la fois les enjeux de prévention précoce (petite enfance, école, lien avec les familles) et de remédiation tout au long de la vie (emploi, formation, insertion, accompagnement social).
La mise en œuvre du plan repose sur une mobilisation coordonnée des crédits nationaux et du Fonds social européen plus (FSE+), dans le cadre de la programmation 2021-2027.
Un suivi annuel et une évaluation régulière
Pour garantir l’efficacité de ce premier plan interministériel, les signataires assurent vouloir mettre en place un suivi annuel et une évaluation régulière des actions engagées dans chaque territoire ultramarin. « L’objectif est de disposer d’indicateurs fiables pour suivre l’évolution de l’illettrisme et de l’illectronisme, éclairer les choix publics et assurer la transparence des résultats. Cette démarche d’évaluation continue constitue un levier essentiel pour renforcer l’impact du plan et garantir que chaque euro investi contribue effectivement à réduire les inégalités et à améliorer la vie des habitants », relève la DGOM.


