Si la cérémonie a réuni une impressionnante délégation d’autorités locales, nationales et européennes parmi lesquelles le président du Conseil départemental, Ben Issa Ousseni, le directeur général de l’ARS, Sergio Albarello, ou encore Carsten Rasmussen de la Commission européenne, ce sont surtout les voix mahoraises qui ont marqué cette matinée. Des voix fières, reconnaissantes, mais aussi lucides sur les défis encore à relever.
« Une première pour Mayotte »

Pour Dhinouraine MCOLO MAINTY, président du Conseil de surveillance du CHM, cette inauguration marque une rupture symbolique : « C’est une première pour Mayotte. Ces scanners, ces équipements biomédicaux, c’est l’Europe qui nous les a financés. L’État, seul, ne peut plus suivre. Le CHM, non plus. Grâce à ces fonds, on peut lancer des projets ambitieux pour offrir aux Mahorais une santé digne ». L’homme politique, très engagé sur les questions sanitaires, insiste sur l’importance de ces fonds européens pour tout le territoire : « Le CHM, c’est un symbole. Mais sans l’Europe, même des projets comme Caribus n’auraient pas vu le jour. On commence à voir que les Mahorais en sont satisfaits. Alors, oui, il faut qu’on prenne en main ces financements. Et qu’on cesse de dire que Mayotte n’a pas les compétences : elles sont là ».
Des équipements de pointe, au niveau européen

Sur le terrain, le changement est concret. Jean-Mathieu Defour, directeur général du CHM, résume l’évolution avec sobriété : « Ce sont des équipements de dernière génération. Ce qu’on a ici aujourd’hui, c’est le niveau technologique qu’on retrouve ailleurs en Europe. Pour les professionnels, c’est un saut de qualité énorme. Pour les patients, c’est une prise en charge plus rapide, plus précise, plus humaine ». Le nouveau service de néonatalogie bénéficie désormais de lits de réanimation spécifiques, d’une sécurisation renforcée des transferts, et de locaux rénovés pour les consultations pédiatriques. Ce projet, financé à hauteur de 4,08 millions d’euros, vise à répondre à une urgence démographique : Mayotte, avec ses 8.910 naissances en 2024, connaît un taux de mortalité néonatale encore bien au dessus de la moyenne nationale.
Deux scanners, une autonomie nouvelle
Le second chantier, l’installation de deux scanners de dernière génération, représente à lui seul plus de 15 millions d’euros. L’objectif est clair : réduire les évacuations sanitaires vers La Réunion, chronophages et coûteuses, et renforcer l’autonomie diagnostique du CHM. En cas de panne ou de maintenance, un deuxième appareil prendra le relais. « Aujourd’hui, on ne dépend plus des autres pour savoir ce qu’a un patient. On peut le savoir ici, à Mayotte, immédiatement », résume un chef de service, visiblement ému.
Une confiance européenne…Et des attentes

Le représentant de la Commission européenne, Carsten Rasmussen, a tenu à rappeler le contexte du financement : « C’est un budget qui est arrivé tardivement, presque comme une surprise. Il fallait des porteurs de projet réactifs. Mayotte l’a été […]. Ce qu’on a vu aujourd’hui, c’est de l’excellence ». Il a également salué « la capacité d’expertise locale » du CHM et du GIP-Mayotte, insistant sur le fait que l’île dispose désormais des compétences pour répondre aux appels à projets européens de manière autonome.
Une dynamique à poursuivre
Le message porté par cette inauguration est sans ambiguïté : Mayotte entre dans une nouvelle ère sanitaire. Grâce à une mobilisation commune de l’Europe, de l’État, du département et des professionnels de santé, des progrès tangibles voient le jour dans un département souvent relégué aux marges. Mais les défis restent nombreux : transport, formation, ressources humaines, continuité des soins… Autant de chantiers qui demain encore, nécessiteront audace, financement et coopération. « On ne peut plus attendre. On doit aller de l’avant », condense Dhinouraine MCOLO MAINTY. « Mayotte a trop souffert. Ces projets montrent qu’on peut faire mieux. Et qu’on va continuer ».
Bobane ABASSE