Les nouveaux équipements présentés ont été financés dans le cadre du PIOM (Plan Innovation Outre-Mer), dispositif dont l’ADIM est chef de file à Mayotte, à travers le plan « France 2030 ». Le docteur Yazid Souf, ingénieur de recherche et responsable du laboratoire, mène avec son équipe plusieurs programmes de recherche sur la flore de Mayotte. « Notre objectif est de valoriser la biodiversité mahoraise avec notamment des extraits innovants… Nous analysons ainsi les différentes molécules présentes dans les huiles essentielles des plantes que nous distillons », explique-t-il. Pour cela le laboratoire a reçu il y a quelques mois de nouveaux équipements, financés par le Département, permettant notamment d’améliorer les procédés de distillation. « Nous faisons de l’extraction d’huile essentielle d’ylang ylang, du café, de la citronnelle, du curcuma, etc. Notre but est d’aller chercher quelque chose qui n’a pas encore été identifié », poursuit-il.
Un laboratoire de plus en plus équipé et moderne…

Le laboratoire PI2M n’a rien à envier aux autres laboratoires malgré sa petite taille. Il dispose ainsi pour tout ce qui est extraction d’une centrifugeuse (pour homogénéiser les phases), d’un évaporateur rotatif (pour concentrer les extraits liquides) ; d’un agitateur (homogénéiser ou dissoudre des mélanges liquides), d’une hôte aspirante (pour protéger et évacuer des vapeurs et fumées nocives) ou encore d’une balance de précision, et d’une verrerie. Cela permet ainsi la préparation des extraits secs sur les basilics ou encore des extraits sur les plantes médicinales.
Pour tout ce qui est analyse, le laboratoire possède des chromatographes en phase liquide et en phase gazeuse (pour analyser les HE, arômes, parfums) ; ainsi qu’un lyophilisateur (pour déshydrater les échantillons) ; un évaporateur centrifuge (pour concentrer les extraits liquides) ; un congélateur analytique (jusqu’à -42°C). Cela a pour finalité de comparer les singularités des vanilles régionales ou encore d’étudier la diversité des basilics mahorais. Mais aussi de procéder à une analyse chromatographique du curcuma mahorais par exemple.
Enfin, sur le volet distillation, le laboratoire est équipé d’un alambic (optimisation de la distillation et valorisation des coproduits) ; d’un micro-ondes (modulation des propriétés diélectriques pour améliorer l’extraction) ; d’ultrasons (accélération de la diffusion pour une extraction plus efficace) ; d’un CO2 supercritique (extraction précise, innovante et écologique). Cela peut permettre la création d’un parfum à base d’extraits naturels et/ ou de développer un prototype de macérat huileux pour une gamme de bougies parfumées naturelles, et même de développer un extrait de vanille local destiné à la Laiterie de Mayotte…
…pour alimenter différents programmes de recherche sur les végétaux de Mayotte

Le laboratoire étudie ainsi la singularité de la vanille mahoraise qui est différente de celles des Comores et de Madagascar. A ce stade, il apparait qu’elle a un profil phytochimique singulier par rapport aux autres vanilles régionales avec notamment 5 marqueurs biochimiques identifiés. En outre, sa qualité aromatique serait due à son mode de culture (plein champ, association avec d’autres cultures ou sous-bois…), ainsi que la durée de maturation et des conditions climatiques. Des données précieuses pour l’Association Saveurs & Senteurs de Mayotte…
Le laboratoire étudie bien évidemment l’ylang-ylang avec pour objectif avoué de relancer la filière sur notre territoire. « Il y a des thèses en cours… », nous indique le docteur Souf. « Nous tentons de savoir si les mêmes molécules sont présentes dans l’ylang qui pousse au Nord et dans celle qui pousse dans le Sud de l’île. Là aussi nous savons, comme pour la vanille, qu’elle a un profil phytochimique singulier par rapport aux autres ylangs de la région et qu’elle est différente de celles des Comores et de Madagascar. Mais nous ne savons pas encore précisément pourquoi : est-ce la terre, la biodiversité ou la plante en elle-même ? ». Un projet est en cours : Cosmahora’Innov en collaboration avec une entreprise mahoraise pour créer une gamme cosmétique. Le café est également analysé. Ainsi le laboratoire a mis au point un processus d’extraction et d’analyse afin de transférer des arômes de la coque vers le grain.
Ces nouveaux équipements renforcent les capacités locales de recherche appliquée dans le domaine de la bioéconomie, avec pour ambition de valoriser durablement les ressources végétales et naturelles du territoire. Ainsi plusieurs thèses sont en cours en partenariat avec le laboratoire et à terme différents débouchés sont envisageables dans la cosmétique, la parfumerie, la pharmacologie, ou encore l’alimentaire.
B.J.


