À Mtsamboro, dans le nord de Mayotte, la colère des enseignants non payés depuis plusieurs mois s’est de nouveau transformée en action. Ce lundi 3 novembre, dès l’aube, les grilles du collège se sont refermées sur un mouvement de protestation. En soutien à huit enseignants toujours sans le moindre salaire depuis au moins deux mois, personnels et parents d’élèves ont décidé de bloquer l’établissement.
« Nous ne pouvons plus attendre », souffle le collectif local, à bout de patience. Le collège de Koungou est lui aussi en grève, pour dénoncer les mêmes anomalies de paie qui frappent une partie des contractuels de l’académie.
Plusieurs mois sans salaires

Depuis la rentrée, des dizaines d’enseignants de Mayotte travaillent sans être payés. Au collège de Mtsamboro, ils étaient encore 36 sur 119 impayés mi-octobre, dont 25 sans la moindre rémunération.
« La situation grave dans laquelle se retrouvent plusieurs de nos collègues nous pousse à durcir les actions commencées dès le mois dernier », a écrit Erwan Coic, membre du collectif, dans un message adressé dimanche aux médias. Les personnels réclament désormais « une somme décente et digne », quel que soit son nom : acompte, aide sociale ou geste exceptionnel du rectorat.
Des promesses à répétition
Les enseignants de Mayotte ont appris à ne plus trop croire aux annonces. Début octobre, après des grèves et des sit-in, la rectrice Valérie Debuchy promettait un acompte entre le 6 et le 10 du mois. Résultat : seuls dix agents ont touché une somme, souvent partielle. Une régularisation était prévue le 29 octobre. En réalité, celle-ci n’a pas eu lieu pour la majorité des concernés.
La FSU Mayotte, excédée, appelle désormais à des actions coordonnées dans les établissements scolaires dès mardi 4 novembre. À Mtsamboro, les enseignants n’en démordent pas : « plus aucun professeur ne doit travailler gratuitement ».
Un rectorat dépassé et des explications peu convaincantes

Dans une lettre adressée aux professeurs concernés, datées du 30 octobre, la rectrice leur a fait part de ses excuses en reconnaissant des « causes multiples ». « Je tiens à vous présenter nos plus sincères excuses, à exprimer toute notre sollicitude même si cela ne suffira pas à réparer les préjudices causés ». Évoquant « un fort renouvellement des gestionnaires et des cadres, la complexité accrue des procédures et un déficit de formation des nouveaux agents » pour expliquer ces difficultés.
Une explication jugée déroutante par le corps enseignant : « comment peut-on en 2025 laisser des centaines de profs sans salaires au nom d’une erreur de formation ? ».
Dans son courrier, Valérie Debuchy assure « engager sans délai les actions suivantes : réviser, optimiser et fluidifier l’ensemble des processus techniques, du recrutement au paiement du salaire ; mieux anticiper les échéances calendaires et les préparer collectivement ; renforcer les services en moyens humains et financiers et développer un plan de formation spécifique pour stabiliser les compétences ; enfin améliorer notre communication interne et externe : renforcer la GRH de proximité, être plus réactifs et apporter à chaque agent une réponse explicite et dans des délais resserrés ».
Une nouvelle promesse a suivi : une paie « normale » en novembre et des régularisations « au plus tard en décembre 2025 ». Autrement dit : après trois mois sans salaires, certains devront encore attendre Noël pour être payés… ou pas.
Le rectorat, sollicité, n’a pas répondu à nos questions pour plus de précisions.
Mathilde Hangard


