Mobilisés depuis le lundi 6 octobre pour s’opposer à la démolition de deux salles de classe de l’école primaire Acoua 2, prévue dans le cadre du projet municipal de construction d’un plateau sportif, les parents d’élèves restent déterminés.

Ce lundi 13 octobre, aux alentours de 7 h, ils ont décidé d’ériger un barrage sur la route qui traverse Acoua, avec un message clair : « Non à la démolition ! On défend nos enfants, leur avenir ! ». Les parents se sont ensuite rassemblés devant l’établissement, situé rue Boira Soilihi, et autour des deux salles de classe menacées, où, depuis plusieurs jours, ils dorment sur des matelas et des nattes posés à même le sol.
Un choix qui va à l’encontre « des droits de nos enfants »

« Notre école est la seule qui n’a pas été gravement endommagée par le cyclone Chido. Nous fonctionnons normalement, sans système de rotation. Mais avec cette démolition, nous serions contraints d’y recourir, ce qui irait à l’encontre des droits de nos enfants », déplore Nassila Nourdine, porte-parole des parents d’élèves.
Les deux salles concernées, situées légèrement à l’écart du bâtiment principal, accueillent 27 élèves de CE1, ainsi qu’une classe de CM2 comptant 28 élèves. Le passage à un système de rotation diviserait la journée scolaire en deux : certains enfants suivraient les cours le matin pendant cinq heures, les autres l’après-midi. Un rythme qui, selon les parents, ne permettrait ni de respecter le programme scolaire, ni de maintenir les activités habituelles comme les cours de français, de mathématiques ou encore le carnaval.
Pour l’heure, aucune date précise de démolition n’a été communiquée, mais elle serait envisagée dans les prochains jours, pendant les vacances scolaires. Samedi dernier, des ouvriers sont venus retirer les tôles des toitures, mais les parents sont rapidement intervenus pour les remettre en place. Selon eux, dans la nuit de mercredi à jeudi, vers 22 heures, des individus se seraient introduits dans les salles afin d’enlever le mobilier et préparer la destruction — une tentative une nouvelle fois contrecarrée par les parents.

Depuis, les discussions entre la mairie et les représentants des familles n’ont toujours pas permis de trouver un terrain d’entente. Déjà en février dernier, la colère grondait : les parents avaient bloqué les écoles de la commune pour protester contre les rotations mises en place après le passage du cyclone Chido. Ils réclamaient alors des garanties de sécurité pour leurs enfants, scolarisés dans des établissements qu’ils jugeaient dangereux en raison de la présence de clous, de bris de verre ou de gravats. Surtout, ils demandaient l’ouverture de la nouvelle école Acoua 3, récemment construite sur les hauteurs de la commune, afin de désengorger les autres établissements.
Des solutions alternatives face au manque de subventions de l’Etat

Un argument repris une nouvelle fois par les parents d’élèves, ce lundi matin, installés sur le parvis de l’école. « Il y a des salles de classe disponibles à Acoua 3, il suffit de les rénover. Elles pourraient accueillir les élèves pendant les travaux. C’est ça, la vraie solution », avance un parent d’élève. « Ce n’est pas le projet de plateau sportif qui nous pose problème, mais la méthode. Il y a une question de priorité. On ne peut pas faire le plateau avant les besoins des enfants. Il faut d’abord créer des salles de classe, notamment à Acoua 3, assurer de bonnes conditions d’accueil pour les élèves, puis construire d’autres écoles, et enfin réaliser le plateau sportif, dans cet ordre-là, pas l’inverse », poursuit-il.
Quelques mètres plus loin, dans son bureau, le maire d’Acoua, Marib Hanaffi, accepte de répondre aux questions sur le sujet, malgré la période électorale qui lui impose un devoir de réserve. Selon lui, le maintien du projet de construction du plateau sportif, le premier dans la commune, constitue « la solution la moins perturbante pour tout le monde ».

« L’idée est de mettre en place une rotation temporaire afin de permettre les travaux du plateau, le temps que la municipalité obtienne les fonds nécessaires pour reconstruire deux salles de classe à Acoua 2 dans les prochains mois », explique l’élu. Il précise que le coût de ces nouvelles salles est estimé à 300.000 euros, une somme qu’il espère voir bientôt débloquée rapidement par l’État. À défaut, il faudra, selon lui, « sortir progressivement du système de rotation ».
« Le projet du plateau a été pensé il y a dix ans. Il est aujourd’hui prêt à être lancé. Nous avons obtenu les conventions de financement nécessaires pour démarrer, et si les travaux ne débutent pas maintenant, ces financements pourraient être remis en cause. Il faudrait alors attendre encore deux à trois ans pour espérer une telle infrastructure », poursuit Marib Hanaffi. Il rappelle que le plateau ne sera pas réservé aux activités sportives, mais servira également à des événements culturels et éducatifs, y compris pour les écoliers.
Concernant la solution d’Acoua 3, le maire indique là encore attendre les subventions de l’État pour engager les travaux de rénovation.
Le système de rotation : une solution selon la municipalité
« Le cyclone a touché tout le monde. Nous traversons tous une période difficile. Acoua s’en sort mieux que d’autres communes, notamment pour les écoles. Mettre en place une rotation permettra malgré tout aux élèves de bénéficier de cinq heures de cours par jour », conclut-il.
Un raisonnement loin de convaincre les parents d’élèves qui rappellent en plus qu’à l’approche de la saison des pluies, l’école Acoua 2 est régulièrement sujette aux inondations. Selon eux, certaines salles du rez-de-chaussée devront être fermées, ce qui accentuera encore la pression sur les classes restantes.

En attendant, si le maire assure rester ouvert au dialogue, les tensions demeurent vives. Du côté de la municipalité on regrette des « pressions politiques » exercées par certains parents à l’approche des élections, tandis que ces derniers estiment que le projet de plateau sportif n’est qu’une promesse de campagne réalisée au détriment des élèves.
À deux semaines de la rentrée, prévue le 27 octobre, l’incertitude reste entière : les enfants d’Acoua 2 ne savent toujours pas dans quelle salle ils feront classe.
Victor Diwisch