Le passage à la fiscalité de droit commun a profondément bouleversé le modèle financier du Conseil départemental de Mayotte. Les dotations, dont le dynamisme s’est réduit, représentent désormais plus de la moitié des produits courants, explique la CRC en préambule.
Le Département reste ainsi fortement tributaire des financements publics de l’État. Sa situation financière repose sur le versement de régularisations ou de dotations exceptionnelles, les recettes pérennes ne permettant pas d’assurer l’équilibre de son budget et de réaliser les dépenses d’investissement prévues, indique la chambre régionale des comptes dans ce premier rapport.

L’écart croissant, entre des recettes qui sont restées relativement stables et des dépenses dont le dynamisme s’est considérablement accéléré, a conduit le Département à consommer les 150 millions d’euros d’arriérés de dotations versées entre 2016 et 2018 au titre des compensations liées au transfert de compétences en matière d’aide sociale à l’enfance et de protection maternelle et infantile. Compte tenu de l’évolution démographique et sociale de Mayotte, ces compensations s’avèrent insuffisantes, relève la CRC.
Le contrat d’engagement passé entre l’État et le Département, le 8 décembre 2023, n’a prévu que deux versements ponctuels de 50 millions d’euros en 2023 et 100 millions d’euros en 2024. Les contreparties demandées au Département sont multiples, non hiérarchisées et dépourvues de force contraignante suffisante, en contradiction avec le rapport précité de novembre 2023. Le contrat omet également de prendre en compte la régularisation des dettes croisées entre l’État et le Département qui n’a toujours pas été résolue depuis le passage à la fiscalité de droit commun en 2014, poursuit la chambre.
L’affectation des fonds s’est révélée erronée et imprécise. Le comité de suivi du contrat s’est réuni de manière irrégulière et l’ensemble des engagements n’a pas été respecté. Malgré ces carences, les recettes ont pourtant été intégralement versées au Département en 2023 et 2024.

En dépit d’effectifs pléthoriques au sein de la collectivité, la qualité de la gestion budgétaire et du contrôle interne reste faible. Aussi, le Département recourt systématiquement, depuis 2022, à des cabinets d’experts pour réaliser les prestations tenant aussi bien à l’organisation des services, aux ressources humaines, à l’achat public qu’aux finances et à la planification des investissements. L’exploitation de ces travaux n’a toujours pas permis une amélioration tangible de la gestion et de la situation financière et le Département se place dans une situation de dépendance vis-à-vis de ses consultants, notent les magistrats de la CRC.
Le poids excessif des charges de personnel et des subventions d’équilibre versées au budget annexe santé et protection de l’enfance et au budget annexe des transports maritimes s’est accentué.
L’absence de lien entre contrat d’engagement et contrats de convergence et de transformation nuit gravement au pilotage global des actions et des moyens et à leur efficacité sur le terrain. Les enjeux de reconstruction résultant des dégâts causés par le cyclone Chido en décembre 2024 justifieraient la création d’un outil unique regroupant l’ensemble des soutiens apportés par l’État au Département ainsi que leurs conditions de mise en œuvre, conclut la chambre régionale des comptes.