Comores : quatorze personnes dans le couloir de la mort

Trois individus, condamnés récemment par une cour d’assises, rejoignent la liste des personnes en instance d’exécution. Malgré le prononcé des sentences, l’archipel n’a exécuté aucun condamné à mort depuis 1998. Les Comores font aujourd’hui partie des 55 pays qui refusent d’abolir la peine de mort, « pour être en bon ordre avec son droit interne », faisant ainsi l’exception dans l’Océan indien.

L’archipel compte désormais « 14 individus » dans le couloir de la mort dont un seul actuellement détenu à la prison de Koki sur l’île d’Anjouan. On en compte « 13 autres » à la prison de Moroni. Un condamné à mort à Mohéli, la petite île, a été transféré à Moroni. « En tout, ils sont quatorze. Mais il y a trois personnes poursuivies pour crimes et qui seront jugées très prochainement. Et une fois jugées et condamnées, le chiffre va monter à dix-sept », souligne Soilihi Ali Said, directeur général des administrations pénitentiaires.

Une exception dans l’Océan indien

Aucune femme n’a été condamnée à mort. Un mineur, reconnu coupable d’un viol ayant entrainé la mort en 2021 d’une fillette, a été condamné aux travaux forcés à perpétuité. La loi comorienne interdit la condamnation à mort des mineurs et des femmes enceintes. La peine de mort est clairement affirmée dans l’article 4 du Code pénal comorien. L’archipel fait aujourd’hui figure d’exception dans la zone Océan indien où tous les pays ont aboli la peine capitale.

Les personnes en question ont été, pour la majorité, condamnées pour des faits de crimes aggravés. Il s’agit d’actes d’assassinats prémédités, des crimes passionnels ou des viols ayant entrainé la mort de la victime. Parmi les crimes les plus atroces enregistrés, on notera ceux de 2019, de 2021 et de 2025.

Vue extérieure la prison de Koki à Ndzuani (Anjouan)

Dans le premier cas, trois jeunes enferment un individu dans un véhicule aspergé d’essence et mettent le feu. La victime, soupçonnée d’entretenir des relations intimes avec la sœur de l’un des criminels, a été calcinée. En 2021, une petite fille, nommée Faina Rahim, a été violée à mort par deux garçons. Toujours en 2021, un homme tue l’amant de sa femme à coups de machette. En 2025, une jeune femme nommée Hikima Ahamada a été étranglée à mort dans l’après-midi du 31 janvier par son chauffeur qui voulait lui voler de l’argent retiré dans une banque quelques heures plus tôt.

Souvent épinglé par des mouvements abolitionnistes et les Nations-Unies, l’archipel reste droit dans ses principes « pour être en bon ordre avec son droit interne ». En effet, le droit musulman qui prévoit de facto la peine de mort figure bien dans l’ordonnancement juridique du pays. L’abolition de la peine de mort serait contraire à l’ordre juridique et conduirait à la renonciation aux principes et aux valeurs propres d’un pays musulman. Mais pour contourner les critiques, les autorités prennent acte des sentences sans jamais avoir pris la décision d’exécuter un condamné à mort depuis 1998.

Une multiplication des actes criminels

La dernière tentative pour abolir la peine de mort remonte au mois de décembre 2022. Un amendement a été introduit dans le projet de nouveau Code pénal. Mais, l’amendement en question, a été rejeté à l’unanimité de tous les députés comoriens. « La peine de mort ne peut pas être abolie dans un pays musulman comme le nôtre. Il peut y avoir des assouplissements sur d’autres aspects de la loi. Mais, la peine de mort, elle, doit être formellement précisée dans la loi », avait indiqué à l’époque le rapporteur de la commission des lois de l’Assemblée comorienne.

Aux Comores, le débat sur la peine de mort est toujours relancé en cas de crimes graves sans jamais faire long feu. Un premier condamné à mort a été enregistré en 1976 et deux autres à la fin des années 1990. Et, depuis, aucune personne condamnée n’a été exécutée. Le pays fait toutefois face à des pressions accrues à cause de la multiplication des actes criminels. On ignore si les pressions en question aboutiraient, cette-fois, à infléchir la position des autorités pour ordonner l’exécution des condamnés à mort.

A.S.Kemba, Moroni

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