Les faits remontent à l’été 2021, au mois d’août, quand une fois de plus les bandes de Pamandzi et de Labattoir se sont livrées à des heurts et des violences en Petite-Terre. C’est peu avant minuit, dans la nuit du 20 au 21 août 2021, que les gendarmes sont appelés suite à des affrontements entre bandes rivales. Plusieurs blessés sont à dénombrer, dont 2 grièvement, notamment à l’arme blanche avec une machette. Une des victimes à des plaies à l’oreille et au cuir chevelu d’une dizaine de centimètres. Une autre a visiblement été frappée à plusieurs reprises à coups de pierre avec des plaies un peu partout sur le corps, au visage, au poignet, au bras…
Un accident de scooter à l’origine de l’affrontement
Pour comprendre le déchainement d’une telle violence il faut remonter quelques semaines auparavant quand deux jeunes, l’un issu de Pamandzi et l’autre issu de Labattoir, ont un accident de scooter, et de là serait née une « embrouille ». Celui originaire de Labattoir aurait eu la mâchoire cassée. « J’ai vu du sang sortir de sa bouche, il parlait très doucement. On a attendu les pompiers, a expliqué la victime issue de Pamandzi devant le tribunal. Je ne sais pas vraiment ce qu’il s’est passé, il a changé de voie et il est venu me percuter ». Les choses auraient pu en rester là, sauf que les rivalités entre bandes sont telles que la moindre occasion est bonne pour se venger…
En effet, quelques semaines après cet accident, un affrontement se préparait entre les deux bandes, le soir du 20 août. « J’étais au courant, mais cela ne me concernait pas, je n’ai pas de souci avec eux, raconte la victime. C’est un pote qui m’en avait parlé. Je voulais juste me rendre à un concert dans un bar pour faire la fête car il y avait une soirée spéciale avec des artistes connus. – Vous faites partie d’une bande, interroge la présidente. – On ne peut pas dire ça comme ça…mais oui j’en ai fait partie dans le passé ». Alors qu’il se rendait à cette soirée, il croise l’individu avec lequel il a eu un accident, il s’approche vers lui pour échanger quand il se fait directement agresser par derrière et reçoit brusquement un premier coup de machette derrière l’oreille, puis un autre sur le crâne. « Je me suis dit : si je reste là je vais mourir, je ne veux pas mourir dans la rue. Je me suis mis à courir en direction du bar pour me réfugier », raconte la victime qui à ce jour a encore des séquelles et a du mal à entendre.
L’auteur des coups de machette n’est autre que le propriétaire du scooter qui l’avait prêté à un de ses potes et avait eu un accident quelques semaines auparavant. Il n’avait pas apprécié que son scooter soit hors d’usage et le fait que l’autre personne impliquée dans l’accident soit de Pamandzi et présente ce soir-là était véritablement une aubaine pour lui de se venger. Selon les premiers témoignages, les jeunes étaient là pour en découdre et attendaient pour se battre. En effet, une deuxième victime a quant à elle été frappée à coups de barre de fer et de pierre par plusieurs individus qui se sont littéralement acharnés sur elle avant qu’une tierce personne s’interpose, malgré les menaces, et fasse s’en aller les agresseurs. Il s’en sortira avec de nombreuses plaies au visage, au poignet, au bras, au coude, et devra subir une opération de la main au CHU de Bordeaux. On peut parler de vengeance car les coups portés à la fois à la tête et sur des zones vitales laissent planer peu de doutes. Interrogés à la barre par la présidente du tribunal l’un des deux prévenus « assume les faits ».
Des prévenus au passé difficile
Selon l’expert psychiatrique qui a examiné les prévenus, ils ont tous les deux un discours clair et cohérent, n’ont pas d’antécédents psychiatriques et de troubles de la personnalité. Mais l’un deux a minimisé les faits, il consomme de l’alcool tous les jours depuis l’âge de 12 ans et aurait baigné dans une atmosphère de violence familiale. « Il boit une bouteille de rhum tous les jours et avait semble-t-il les yeux rouges au moment des faits, laissant penser à une consommation de stupéfiants… », indique l’expert. Pour l’autre prévenu, le psychiatre a relevé qu’il avait une conversation pauvre, et qu’il n’a quasiment pas connu sa mère, restée vivre au Comores, quand lui est arrivé à Mayotte chez sa tante alors qu’il était encore enfant. « Il a eu une enfance difficile, avec de la misère… Il réfute toute violence et lui aussi consomme beaucoup d’alcool. Selon lui la gendarmerie de Pamandzi favoriserait les jeunes de ce village au détriment de ceux de Labattoir. Pour lui il n’a fait que se défendre », conclut l’expert.
Aujourd’hui, après les plaidoiries des avocats et le réquisitoire de l’avocate générale, les jurés devraient rendre leur délibéré concernant les deux prévenus qui encourent chacun au minimum 5 ans de prison rien que pour les faits de tentative de meurtre.