Un brusque malentendu entre les Comores et Madagascar défraie la chronique ces derniers jours dans les deux pays après la suspension temporaire, le 17 octobre, des liaisons maritimes par les autorités de la Grande Ile. Tout a commencé après le refoulement d’un bateau battant pavillon comorien à Majunga avec plus de 280 passagers de nationalités comorienne et malgache.
Tana invoque des raisons sanitaires
Le navire « Acadie » a été ainsi interdit d’accoster au port de Majunga alors que l’équipage n’était pas informé de la décision prise, la veille, par les autorités malgaches. Il se trouve que le bateau, au départ de l’île d’Anjouan, était déjà en route lorsque le gouvernement malgache avait décidé la suspension des frontières maritimes avec les Comores. « On n’était même pas au courant de cette décision. Sinon, on n’allait pas envisager le voyage», a regretté le capitaine du bateau Acadie, obligé de rebrousser chemin après plus de 50h au large de Majunga. Le navire a retrouvé son port d’attache à Mutsamudu, dimanche 20 octobre.
L’autorité malgache a pris cette décision à cause de « la propagation » de l’épidémie de choléra aux Comores. Les Comores ont enregistré « 198 cas de choléra » la semaine dernière, comme l’a rapporté Al-watwan qui a cité un bulletin épidémiologique du ministère comorien de la Santé. A Madagascar, l’on a justifié la mesure « suite à la persistance de l’épidémie de choléra en Afrique de l’Est et dans la Corne de l’Afrique avec l’enregistrement de dix nouveaux cas aux Comores », selon une note verbale transmise aux autorités comoriennes via leur ambassade à Antananarivo.
Mais, pour les autorités comoriennes, les cas en question « ne représentaient pas un risque » de nature à pousser les autorités malgaches à fermer les frontières maritimes avec les Comores. «L’Organisation mondiale de la Santé n’a déclenché aucune alerte pouvant justifier des mesures aussi drastiques que restrictives », peut-on lire dans un communiqué du ministère comorien des Affaires étrangères. « Le gouvernement comorien déplore la décision des autorités de Madagascar de suspendre unilatéralement les liaisons maritimes entre les deux pays, sous le prétexte injustifié qu’une épidémie de choléra sévirait actuellement aux Comores, et ce, quatre ans après la suspension unilatérale des liaisons aériennes », ajoute le communiqué.
Des tensions épisodiques entre les deux pays
Le Consulat des Comores à Majunga a tenté de convaincre les autorités malgaches de laisser entrer les passagers. Mais les démarches entreprises n’ont pas abouti. Les Comores avaient proposé «la mise en quarantaine des passagers aux frais du gouvernement comorien, suivi d’un test médical pour détecter éventuellement les cas de choléra», selon le ministre comorien des Affaires étrangères, Mbaé Mohamed lors d’une conférence de presse ce lundi 21 octobre. «Mais malheureusement, le gouvernement malgache a refusé toutes nos propositions», a-t-il déploré. Les Comores ont appelé « les autorités de Madagascar à reconsidérer leur position et à donner une chance au dialogue pour mettre fin à ce regrettable malentendu ».
Les relations entre les Comores et Madagascar connaissent des tensions épisodiques caractérisées par des fermetures temporaires des frontières comme ce fut le cas en 2020. Les deux pays sont en bisbille à cause de nombreux sujets, notamment la problématique des visas ou encore la saisie, en septembre 2022, par Moroni de lingots d’or (près de 50kg) à l’aéroport de Hahaya. Une affaire qui a même été à l’origine d’une visite surprise à Moroni de l’actuel premier ministre malgache Christian Ntsay. Les lingots d’or n’ont toujours pas été restitués comme l’a demandé le gouvernement malgache. A noter que Madagascar n’a toujours pas de représentation diplomatique à Moroni depuis près de 10 ans.
A.S.Kemba, Moroni