« La préfecture est venue à l’audience « en culotte courte » avec un dossier qui ne tenait pas du tout la route du point de vue du droit », affirme Me Eric Hesler, l’avocat défendant « Cousin » le propriétaire du bar-restaurant « Chez Cousin », surnom sous lequel tout le monde le connaît à Mayotte. Son établissement a fait l’objet le 31 mai dernier d’une fermeture administrative ordonnée par la préfecture pour 4 mois. « S’il ferme aussi longtemps, mon client risque la liquidation judiciaire, car il y a déjà eu trop de choses qui lui ont fait perdre sa clientèle cette année », poursuit l’avocat de la défense. En effet, entre les blocages dus au mouvement social des Forces Vives en début d’année, les travaux du Caribus, qui empêchent les véhicules de se garer sur le parking de l’établissement, et les délinquants qui caillassent régulièrement les abords du bar-restaurant à l’heure de la sortie des classes, le propriétaire des lieux n’avait vraiment pas besoin de cette fermeture administrative en sus !
D’autant plus que, selon lui, cette fermeture relèverait davantage d’un « règlement de compte » que d’un réel manquement à la règlementation en vigueur. Les célèbres soirées du vendredi soir dites « cousinades » engendrant beaucoup de bruit, un fonctionnaire de la préfecture serait venu s’en plaindre un soir et, furieux, aurait pris l’initiative de débrancher lui-même le matériel de sonorisation, provoquant son expulsion de l’établissement par le service de sécurité. « Mon client a porté plainte contre ce fonctionnaire de la préfecture car il a dégradé du matériel et ce dernier a porté plainte en retour. A peine quelques jours plus tard, cette fermeture administrative était ordonnée », révèle Me Eric Hesler, qui pointe du doigt le fait que la procédure légale n’aurait pas du tout été respectée par la préfecture et le dossier monté « à l’emporte-pièce ». Pour l’avocat et son client, il s’agit d’un « abus de pouvoir » de la part du fonctionnaire de la préfecture éconduit par la sécurité dans l’unique but de « régler ses comptes avec le propriétaire de l’établissement ». « La préfecture a prétendu dans les médias que de nombreuses plaintes avaient déjà été déposées contre l’établissement. Or c’est faux : il n’y a que celle-là en réalité ! », s’indigne l’avocat.
Le choix du « référé liberté » justifié par l’urgence
Me Hesler est sûr du bon droit de son client, mais craignait simplement que la procédure en « référé liberté » ne soit pas acceptée par le tribunal administratif pour ce genre d’affaire. « J’hésitais entre le référé liberté et le référé suspension, qui aurait peut-être été plus adapté à cette l’affaire, mais qui aurait pris beaucoup plus de temps à être jugé. Or, du temps, mon client n’en a pas : il risque la faillite si son établissement ne peut pas bientôt rouvrir ses portes ! », indique l’avocat.
Ce n’est qu’à 19h20 que nous apprenons finalement que le référé liberté, déposé par Me Eric Hesler a été rejeté par le tribunal administratif comme il le craignait. L’avocat et son client ont aussitôt déposé un référé suspension. Une procédure qui prendra malheureusement davantage de temps à être jugée. En attendant l’établissement reste donc fermé.
Nora Godeau