C’est une longue période d’accalmie qui a suivi l’épisode Thierry Galarme, ancien président du Medef Mayotte pris entre putsch et mélange des genres dans ses activités le conduisant à la mise en liquidation de ses trois sociétés de communication, qui avait vu Carla Baltus présider le syndicat patronal en février 2018 à l’unanimité des votants. Reconduite en 2021, elle nous informe vouloir se représenter aux prochaines élections du 14 juin 2024.
Elle ne sera pas seule. Nizar Assani Hanaffi, président du Comité territorial d’Action logement, lui annonçait sa candidature ce vendredi 31 mai dans ces termes : « Quand bien même vous ne m’avez pas adressé de convocation, je vous annonce ma candidature à l’élection de la présidence du MEDEF Mayotte prévue le 14 juin 2024 lors de l’Assemblée Générale Élective ». Comme une odeur de poudre…
Nous l’avons contacté pour connaître les raisons de ce contexte tendu. « A travers cette candidature, je souhaite représenter les chefs d’entreprises de l’île en apportant un souffle nouveau. Mais les choses ne se déroulent pas normalement. Tout d’abord, Carla Baltus ayant déjà effectué deux mandats, n’a pas le droit de se représenter, ou tout au moins, elle a la possibilité de recandidater pour une présidence d’un an le temps de trouver un successeur. Ensuite, le dernier conseil d’administration qu’elle préside a radié plus de 30 adhérents qui étaient pourtant à jour de leur cotisation ! »
« Fait du prince » ou pas ?
Le fonctionnement de chaque Medef régionaux semble donc indépendant les uns des autres, et du Medef national puisque Patrick Martin était élu comme patron des patrons nationaux le 6 juillet 2023 pour 5 ans, et non 3.
A l’image de son mentor Michel Taillefer, ex-président du Medef Mayotte, Carla Baltus s’essaierait-elle aux ruses du pouvoir ? Elle nous livre sa position : « Dans nos statuts du Medef Mayotte, l’entreprise doit chaque année formuler une nouvelle demande d’adhésion. Qui peut être acceptée ou pas par le Conseil d’administration. Ce ne sont pas des radiations, mais des refus. En 2019, mon prédécesseur Thierry Galarme avait déposé plainte parce que nous avions refusé son adhésion, nous avions gagné car cela était conforme à nos statuts ».
Facile dans ce cas d’assurer sa propre réélection, l’avons-nous interrogée : « Pas du tout puisque le conseil d’administration est composé de 14 membres dont d’ailleurs Nizar Assani Hanaffi. Par contre, lors du dernier CA, nous avons vu arriver des adhérents tombés du ciel, des chefs d’entreprise que même lui ne connaissait pas. Or, avant d’accepter qu’une nouvelle entreprise nous rejoigne, nous devons nous assurer qu’elle est conforme à une ligne de conduite qui corresponde à nos objectifs. »
La présidente bientôt sortante nous rapporte des défaillances « certains ont bien réglé leur cotisation, mais sans remplir le bulletin d’adhésion, d’autres l’inverse. » Des détails qui tuent lorsqu’il y a compète.
Nizar Assani Hanaffi informe envoyer prochainement à la présidente la liste des 14 candidats qui l’accompagnent, parmi lesquels Christophe Lemoosy (Bole Consultance), Ida Nel (MCG) ou Marcel Rinaldy (3M).
Changement de casquette
Quant à ses deux mandats échus non renouvelables, elle évoque un biais que permettraient les statuts : « Ce ne sont pas des individus mais des personnes morales qui adhèrent au Medef Mayotte. Or, la première fois que j’ai été élue, ce n’était pas pour la même société qu’en 2024. Donc, si je suis reconduite à la tête du Medef, j’entamerai véritablement mon 2ème mandat. » Nous avons vérifié, la dirigeante de Carla Transport Baltus avait en effet été élue à la tête du patronat local en 2018 en tant que PDG de Mahorais Voyages Tourisme (MVT).
Elle conçoit néanmoins qu’un toilettage est nécessaire, « nous devons retravailler nos statuts pour quelque chose de plus cohérent ».
Il y a actuellement 88 entreprises adhérentes au Medef local, sur 5.910 implantées à Mayotte en 2023 (INSEE). Un gros écart mais on sait que le tissu économique mahorais est essentiellement composé de petites et moyennes entreprises, et que les artisans occupent une bonne place, adhérents pour beaucoup à la CGPME. En tout cas, ces bisbilles passent donc au-dessus de la tête de la grande majorité d’entrepreneurs du territoire.
La campagne pour la présidence du Medef Mayotte est entrée dans le vif du sujet. Et les portes ne sont pas fermées, d’autres candidats ou candidates peuvent encore se présenter, ils ont jusqu’au 7 juin pour cela.
Anne Perzo-Lafond