« Beaucoup de jeunes filles n’ont pas accès aux serviettes hygiéniques, on se bat pour en avoir au sein des établissements, mais cela reste encore compliqué à l’heure actuelle », révèle Rasmia Bacar, l’une des infirmières travaillant au collège de Doujani. A l’occasion de la Journée mondiale de la santé et de l’hygiène menstruelle de ce mardi 28 mai (une date qui n’a pas été choisie au hasard puisqu’un cycle menstruel dure en moyenne 28 jours et que les règles proprement dites en durent en moyenne 5, comme la place chronologique du mois de mai), la Croix-Rouge a organisé un « forum de la santé menstruelle » dans 4 collèges de l’île (Doujani, Koungou, M’tsamboro et Labattoir) en collaboration avec les infirmières scolaires du rectorat. L’association Endo Mayotte y participe également pour informer les jeunes filles au sujet de l’endométriose, une maladie encore trop peu connue, très douloureuse pendant la période menstruelle.
A Mayotte, encore certaines jeunes filles ignorent l’existence des serviettes hygiéniques ou n’ont pas des parents qui ont les moyens de leur en acheter (le paquet de serviettes hygiéniques coûte en moyenne 4 euros et, selon la durée des règles et leur flux, il peut être utilisé entièrement pour une seule période). « C’est un problème que j’ai découvert en travaillant en tant qu’infirmière scolaire, car j’ignorais que c’était encore un souci pour les jeunes filles d’aujourd’hui », nous confie Rasmia Bacar. Elle se souvient que, lorsqu’elle était elle-même jeune fille, ces protections n’existaient pas encore sur l’île et que les femmes étaient obligées d’avoir recours à des « système D » comme des torchons lavables, des éponges ou du papier et découvre que c’est malheureusement encore le cas aujourd’hui pour certaines jeunes filles. « Ces protections « système D » ne sont pas optimales dans la mesure où elles laissent passer les odeurs et ne protègent pas bien les jeunes filles qui peuvent facilement se retrouver dans l’embarras », détaille l’infirmière scolaires qui ajoute « qu’aujourd’hui encore, le tabou des règles reste fort ».
Apporter des solutions aux jeunes filles dans le besoin
Raysati Abdallah, chargée de la santé sexuelle et reproductive pour la Croix-Rouge, tenait un stand au collège de Doujani pour justement informer des différentes possibilités qui s’offrent aux jeunes filles pour conserver une bonne hygiène pendant leurs menstruations. « Outre les serviettes hygiéniques, il y a plusieurs autres possibilités comme les tampons, l’éponge menstruelle ou la cup. Mais étant donné que ce sont des protections qui s’introduisent à l’intérieur du vagin, cela reste trop délicat pour la classe d’âge que nous avons choisi d’informer aujourd’hui, à savoir les 5ème et 4ème », nous confie-elle en expliquant toutefois que le fait que les jeunes filles connaissent ces autres possibilités est une chose importante.
Outre l’information, la Croix-Rouge tente également d’apporter des solutions. L’association anime des ateliers dans lesquels des bénévoles construisent des « distributeurs de serviettes hygiéniques » en bois. « Nous les plaçons dans les établissements, dans des endroits discrets en dehors de l’infirmerie pour celles qui auraient honte de s’y rendre », explique Raysati Abdallah. Par ailleurs, l’association distribue dès qu’elle le peut des « culottes menstruelles », protections lavables et confortables qui diffère peu d’une culotte ordinaire. Le seul problème est le prix puisqu’une telle culotte coûte entre 20 et 40 euros par pièce selon le fabriquant. « C’est toutefois rentable à long terme puisque, si elles sont correctement entretenues, ces culottes peuvent durer jusqu’à 10 ans », insiste la chargée de santé sexuelle et reproductive.
Si le problème de la précarité menstruelle n’est pas nouveau, ni à Mayotte ni sur les autres territoires français, la société n’a actuellement plus honte d’en parler et la possibilité de trouver des solutions pour les jeunes filles concernées se fait jour. Une bonne initiative pour les jeunes filles, souvent coincées entre les impératifs hygiéniques et la honte que génère encore ce tabou dans les sociétés !
Nora Godeau