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Mamoudzou

Tribunal judiciaire : une rentrée au ralenti après un mois et demi de vacances

Mardi avait lieu le retour officiel des audiences au tribunal judiciaire de Mamoudzou. Pour l’occasion la plupart des ténors du barreau étaient présents et un peu comme à l’école pour la rentrée scolaire certains avaient fait leurs devoirs de vacances et d’autres non, tant et si bien que de grosses affaires ont dû être renvoyées par le tribunal faute de pouvoir garantir l’égalité à chaque partie.

Les deux principaux dossiers de la matinée où la Poste et la préfecture de Mayotte étaient victimes pour des faits de violence et d’escroquerie ont été renvoyés par le tribunal. La plupart des avocats prétextant qu’ils n’avaient pas eu le temps d’étudier les affaires à cause d’un délai trop court concernant la transmission du dossier ou bien qu’ils étaient en vacances. « Un mois et demi ce n’est pas assez pour étudier sérieusement des dossiers d’une telle ampleur. Les victimes ont droit à un vrai procès », s’est insurgée maître Fatima Ousséni. Quand un autre de ses confrères a expliqué, lui, qu’il était récemment rentré de vacances et qu’il n’a pas eu le temps de se plonger dans les dossiers. Face à une telle fronde de robes noires, la présidente du tribunal, Chantal Combeau, n’a eu d’autre choix que de renvoyer, une fois de plus, les deux affaires.

Un accident de la route tragique où une mère de famille perd la vie

C’est une banale histoire d’accident de voiture aux conséquences tragiques qui s’est déroulée le 13 avril 2022 sur la route entre Dembéni et Bandrélé. Une voiture a fait un dépassement dans un virage et a heurté de plein front un autre véhicule venant en face. Bilan : plusieurs blessés graves et le décès d’une mère de famille, qui se trouvait dans un des véhicules avec sa fille, et qui est morte suite à de « multiples fractures au thorax, au fémur, à un traumatisme crânien et à un choc hémorragique ». Les autres victimes présentes à l’audience avaient, quant à elles, des séquelles.

Certaines affaires importantes ont dû être renvoyées par le tribunal

Les deux conducteurs étaient en règle au niveau du permis de conduire et des assurances et les tests d’alcoolémie et de stupéfiants se sont révélés négatifs. Le problème dans cette histoire c’est que les deux conducteurs s’accusent mutuellement d’avoir dévié de leur voie et on ne sait pas vraiment si l’un et l’autre étaient ou non des taxis clandestins qui prenaient des passagers pour arrondir leur fin de journée. A en croire les déclarations des uns et des autres, les deux conducteurs conduisaient normalement sans excès de vitesse. Le premier chauffeur, celui sur qui repose le plus de suspicions du fait des traces de freinage et des débris retrouvés sur le côté de la route par les enquêteurs, est interrogé par la présidente. « A quelle vitesse rouliez-vous ? Vous vous rappelez ? – Je ne roulais pas vite, j’étais en 4e je crois. – En 4e dans un virage ? C’est une vitesse excessive, non ? – Je conduisais pour ramener des personnes chez elle, j’avais fini ma journée de travail, j’ai vu une voiture venir sur ma voie de circulation, j’ai essayé de l’éviter, l’airbag s’est déclenché et j’ai perdu le contrôle de mon véhicule, explique-t-il. – Pourtant les débris retrouvés sur le bord de la route par les gendarmes et le côté abimé de votre véhicule laissent à penser que c’était plutôt vous qui étiez sur la mauvaise voie… », rétorque la présidente du tribunal.

Puis c’est au tour de l’autre conducteur de venir à la barre avec un des passagers et de s’expliquer sur les circonstances. « Il roulait à une vitesse excessive et était sur notre voie de circulation », raconte le deuxième chauffeur. Quant au témoin il indique qu’« il est venu nous percuter sur notre voie. Il était en train de doubler deux véhicules avant d’essayer de se rabattre. C’est la ceinture de sécurité qui m’a sauvé ». L’avocat de la partie civile a fait valoir les séquelles physiques et psychologiques de ses clients et a demandé une indemnisation à hauteur de 10.000 euros pour chacun d’eux. Quant à l’avocat de la défense, il a soutenu le fait que l’enquête n’a pas été assez poussée par les gendarmes : « On a pas cherché à savoir, argue-t-il. Les constatations ont été faites deux jours après l’accident. Rien n’a été vérifié dans ce dossier. Les gendarmes ont dit à mon client qu’il avait percuté un véhicule sur la voie inverse alors qu’ils n’avaient pas de réelles preuves et de certitude ». Il a donc demandé la relaxe pour son client.

Après avoir délibéré, le prévenu accusé d’homicide involontaire et de blessures involontaires a été reconnu coupable par le tribunal et a été condamné à 18 mois de prison avec sursis et 6 mois de suspension de son permis de conduire. L’assureur de son véhicule devra verser aux deux victimes présentes les sommes de 3.000 et 8.000 euros.

Il incendie un véhicule avec un cocktail Molotov

Le centre pénitentiaire de Majicavo

Un jeune d’à peine 20 ans a également comparu hier devant le tribunal pour « destruction du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes », en l’occurrence un cocktail Molotov. Les faits se déroulés du côté de Tsoundzou à la fin du mois de mars dernier. Alors qu’un habitant entend du bruit dehors et voit des jeunes en train de dégrader du mobilier urbain et de mettre la pagaille, il sort de chez lui et leur demande : « Pourquoi vous faites ça ? ». Ces derniers le menacent et en représailles les jeunes saccagent sa voiture et y mettent le feu. « Ils étaient en train de se déchainer, explique-t-il. Il y avait un conflit entre les jeunes de Tsoundzou et ceux de Passamainty, sans doute un règlement de compte. Ils étaient en train d’installer une poubelle au milieu de la route pour faire barrage à la police. Ils ont brisé les vitres de ma voiture et ont lancé des cocktails Molotov ».

Le prévenu est convoqué à la barre pour s’expliquer. « Tout ce qui a été dit est faux ! Soutient-il. Je n’ai rien fait. – Pourtant les vidéos montrent que c’est vous et certains de vos complices ont dit que vous étiez présent sur les lieux ce soir-là, interroge la présidente du tribunal – J’ai refusé de me battre, moi je n’y étais pas », répond-il. Le vice-procureur prend la parole et l’interroge pour savoir pourquoi il a lancé un cocktail Molotov dans la voiture. « Je ne sais rien sur ce qu’il s’est passé », maintient-il.

Un fois de plus, le principal accusé a déjà été condamné pour vol en réunion, dégradation et destruction… pour des faits qui se sont déroulés en avril 2023, un mois après ceux pour lesquels il était jugé ce mardi. En plus des trois de prison qu’il est en train de purger, le tribunal l’a condamné à rester 3 mois de plus à Majicavo et à indemniser sa victime à hauteur de 2.020 euros au titre du préjudice matériel et 1.000 euros pour le préjudice moral.

B.J.

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