La CGT Ma a renouvelé son bureau confédéral, et c’est sans trop de surprise que le nom du nouveau secrétaire général a été accueilli, Haoussi Boinahedja, l’homme fort de l’intersyndicale du conseil départemental, à l’origine des communiqués cégétistes depuis quelques jours.
L’occasion pour nous de revenir avec Salim Nahouda, sur les combats de plus de 20 ans au sein du syndicat, dont 19 à sa tête.
19 ans, c’est carrément une fin de règne !
Salim Nahouda : Surtout que j’ai été à l’origine de la création de la CGT Ma en 2001 à partir du syndicat interne d’Electricité de Mayotte dont je suis un agent. C’est Ahamada Madi Chanfi qui en prend la tête, je lui succède lorsqu’il devient conseiller général de Mtsangamouji en 2004. Ce jeudi 1er juin, j’ai décidé de passer la main pour me consacrer aux sénatoriales. Mais nous travaillons en semble depuis 2008 avec Haoussi Boinahedja, et je suis toujours membre de la Commission exécutoire de la CGT Ma.
Presque 20 ans de combats syndicaux, avec des événements plus marquants que d’autres…
Salim Nahouda : Oui, et en premier lieu, celui sur le passage de la société EDM et de celui de son personnel sous le statut des Industries Electriques et Gazières le 1er janvier 2011, avec Olivier Flambard comme directeur. Nous avions commencé à le réclamer depuis 1999. Autre combat, le port de Longoni, pour sauver les emplois des salariés de la SMART que MCG voulait absorber. C’est une victoire dont je suis fier.
Ensuite, celui des agents de la fonction publique qui étaient spécifiques à Mayotte à cette époque. En 2004, nous avons obtenu les premiers décrets d’intégration dans le corps de droit commun, puis ensuite, l’indexation pour les fonctionnaires.
Ce n’était pas un combat mené par le SNUipp-FSU ?
Salim Nahouda : En 2007, au début des revendications, le SNUipp n’existait pas, les enseignants étaient syndiqués à la CGT Mayotte. On peut dire que ces enseignants ont commencé le combat, mais sans les unions départementales, nous n’y serions pas arrivés.
Vous n’évoquez pas la grande grève contre la vie chère de 2011 ?…
Salim Nahouda : Si bien sûr. Au tout début, la question portait sur des augmentations de salaires. Les délégués syndicaux avaient remarqué qu’elles étaient toujours suivies d’augmentation des prix. Nous avons donc demandé de baisser les prix avant de réclamer toute augmentation de rémunérations. La CGT Ma a lancé le 1er jour de grève, suivie par la CFDT puis par les autres syndicats.
Le bilan de ces 44 jours de blocage n’est-il pas mitigé ?
Salim Nahouda : Si, mais parce qu’il y a eu des mélanges de genre. Nous ne nous attendions pas du tout à ce que l’un d’entre nous se porte candidat aux législatives (Boinali Saïd Toumbou, Secrétaire général de la CFDT, ndlr), j’ai du m’activer pour qu’il n’y ait pas de division dans le mouvement. Ensuite, j’ai été déçu qu’on arrête en préfecture un panier de 10 produits de prix à réguler, et non une révision globale des modalités de calcul des prix. Pour le pétrole, la régulation se faisait tous les 3 mois, elle est maintenant mensuelle.
Depuis 2011, avez-vous noté une évolution de l’exercice du droit syndical, davantage de place laissée à la négociation ?
Salim Nahouda : Oui, nous négocions davantage, mais il y a toujours de la résistance du côté des employeurs dans l’évolution vers le droit commun. Par exemple, en 2007, la CGT Ma a mené la revendication d’une évolution de ce qui était le SMIG alors, vers le SMIC national. En 2015, le SMIC net de Mayotte était quasiment aligné sur celui de la métropole, mais depuis, l’écart se creuse, il est actuellement de 150 euros, c’est anormal.
Et sur la convergence du SMIC brut ?
Salim Nahouda : Justement, il y a résistance. Car du côté des cotisations des salariés, le rattrapage n’est pas énorme. Il faut l’alignement sur le droit commun. Nous devons avoir une meilleure protection en cas de maladie, et un niveau digne de retraite. Ça n’évolue pas car les employeurs ne font pas preuve de bonne volonté, mais aussi, par défaut d’application des loi à Mayotte. Celle de 2016 sur les conventions collectives n’est pas effective, car nous avons demandé à la DEETS la liste des conventions collectives dans les différentes branches, nous ne l’avons toujours pas. Or, le syndicat n’a ni les moyens juridiques, ni le personnel pour assurer des recherches ou un suivi de ces demandes.
Donc, vous visez les sénatoriales en septembre prochain. Avec quel objectif ?
Salim Nahouda : Il faut dédouaner Mayotte sur la scène nationale. C’est en réalité la députée Estelle Youssouffa qui m’a incité à me lancer dans la bataille. J’ai commencé à travailler avec elle lors de son arrivée à Mayotte en 2008, notamment sur les problématiques des délégations comoriennes à Mayotte en 2014. Nous avons monté le Collectif des citoyens loi 1901 dont elle était la présidente et moi le vice-président. Elle m’a incité à venir défendre les dossiers au niveau parlementaire avec elle.
Je me prépare donc à cette élection nationale, j’ai commencé à échanger avec des élus puisque ce sont nos électeurs.
Propos recueillis par Anne Perzo-Lafond