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Mamoudzou

Tribunal judiciaire : Trois ans d’inéligibilité pour Mohamed Bacar, règlement de compte et abus de confiance

La sentence est tombée sur les coups de 8 heures mardi. Mohamed Bacar est condamné à 12 mois de prison avec sursis, 15.000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité dans l’affaire concernant une prise illégale d’intérêts dans les marchés publics. Il n’est donc plus, de facto, maire de Tsingoni depuis hier matin.

Mohamed Bacar attendait le délibéré concernant son procès qui avait eu lieu le 28 mars dernier et pour lequel il lui était reproché « d’atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés publics, ainsi que pour prise illégale d’intérêts ». La justice l’a relaxé concernant le premier chef d’inculpation mais l’a condamné pour le deuxième. Le chef du parti Les Républicains dans l’île voit donc son avenir politique compromis puisqu’il ne pourra pas candidater aux prochaines élections sénatoriales qui auront lieu au mois de septembre prochain. Par ce délibéré, il perd également son siège de maire de Tsingoni. Lui qui avait plaidé la bonne foi lors de son procès et admis qu’il y avait eu « un défaut dans la méthode de rangement et d’archivage » n’a semble-t-il pas convaincu les membres du tribunal.

Mohamed Bacar n’est plus maire de Tsingoni

Il dispose désormais de dix jours pour faire appel de cette décision et annonce dans un communiqué que « De toute évidence, face à ce procès purement politique, je ne me laisserai pas facilement abattre et me réserve donc le droit, en concertation avec mon avocat, de faire appel pour laver mon honneur. En tout état de cause, il appartient maintenant à mon successeur de maintenir l’unité que j’ai mise en place depuis 2014 au sein de la majorité municipale actuelle, et ce jusqu’à la fin de la mandature en cours ». Affaire à suivre…

Règlement de compte

Un jeune homme comparaissait également devant le tribunal pour violence aggravée. Les faits se sont déroulés à la fin du mois de novembre 2020 sur fond de règlement de compte et d’alcool entre bandes rivales. L’auteur des faits aurait demandé à la victime de ne pas venir avec ses chiens dans son quartier. S’ensuit une bagarre avec un sabre et des coups portés à la tête et à la main. La victime se verra ainsi prescrire plus de huit jours d’ITT et un handicap toujours présent à la main. Le plus fâcheux dans cette histoire, au-delà de l’altercation, c’est que l’auteur des faits ne se rappelle pas avoir eu dans la même journée, l’après-midi, une autre embrouille avec des faits de violence. La procureure lui rappelle les faits et l’interroge sur l’altercation de l’après-midi. « Que s’est-il passé ? demande-t-elle. – Je ne me rappelle pas. Je ne me souviens pas avoir agresser quelqu’un, répond l’accusé. – C’est bien dommage pour vous », rétorque la procureure.

Un nouveau fait de violence entre jeunes

L’homme était déjà connu des services judiciaires quand il était mineur dans pas mal d’affaires pour vols en réunion avec violences et avec arme. La procureure n’a pas manqué de rappeler devant le tribunal les différentes peines auxquelles il a été condamné durant son adolescence. Avant que le tribunal ne se retire pour délibérer sur son cas, le président du tribunal, Bruno Fisselier, lui demande s’il a une dernière chose à déclarer. « Oui, je n’ai pas l’habitude de faire ça ! », a-t-il répondu à la grande stupeur de l’auditoire. Sa victime quant à elle s’est constituée partie civile afin de pouvoir toucher une indemnisation concernant l’infirmité de sa main. Après avoir délibéré, le tribunal l’a condamné à 18 mois de prison (au-delà des réquisitions du ministère public), avec une absence d’aménagement de sa peine, mais aussi à l’impossibilité de porter une arme pendant cinq ans.

Tel est pris qui croyait prendre

Ce fut au tour ensuite de deux accusés de venir s’expliquer à la barre du tribunal concernant un abus de confiance au préjudice de la société Western Union notamment. Les deux accusés, par ailleurs frères, possèdent des boutiques de vêtements mais exerçent également l’activité d’agents de transfert de fonds pour le compte de la société Western Union. Il se seraient fait voler à trois reprises les sommes de 50.000 euros par une stagiaire qui se serait ensuite volatilisée aux Comores, puis la somme de 40.000 euros qu’ils avaient dans un sac à dos et qu’ils auraient perdu lors d’un guet-apens. Et 15.000 euros dont les explications sont un peu obscures. Le reste ayant été mis sous séquestre en attendant le jugement. « Comment se fait-il qu’une stagiaire ait pu vous voler 50.000 euros ? demande la procureure. Vous n’avez pas de coffre-fort ? – Si, mais elle a dû trouver les clés et prendre de l’argent, répond un des deux accusés. – Comment une simple stagiaire peut-elle avoir accès aux clés d’un coffre-fort, qui plus est si cela faisait seulement une semaine qu’elle était là ? – Nous avons sans doute été négligents. Nous n’avons pas fait attention. – Et comment expliquez-vous le fait de vous promener à Mayotte avec un sac à dos rempli de billets pour près de 40.000 euros ? – Je voulais les ramener chez moi pour pouvoir les compter et vérifier. – Cela ne se fait pas par informatisation ? demande la procureure. Il n’y a pas de reçu lorsque quelqu’un fait un dépôt d’argent ? – Si mais des fois nous avons des problèmes informatiques ou d’imprimante et dans ces cas-là les opérations ne sont pas traitées et nous devons vérifier si les transferts correspondent bien aux sommes reçues, » explique l’un des accusés.

 

Peu de personnes hier matin dans la salle d’audience

Le préjudice pour Western Union s’élève quand même à plus de 115.000 euros. Dans son réquisitoire, la procureure a souligné que des sommes énormes étaient brassées chaque mois par ces deux individus et émettaient par ailleurs de sérieuses inquiétudes quant au fait qu’ils continuent à faire le métier d’agents de transfert d’argent. « C’est ahurissant, s’exclame-t-elle. Tant d’imprécisions et d’incompétence. Ils ont fait n’importe quoi. Nous n’avons même pas le chiffre d’affaire de leurs boutiques de vêtements. Certes, il n’y a pas eu de transfert sur leurs comptes et ils reconnaissent les faits mais c’est tout de même un abus de confiance ». Dans son réquisitoire elle a demandé 15 mois de prison avec sursis, l’obligation de rembourser les sommes dues et l’interdiction d’exercer l’activité d’agent de transfert de fonds. Le délibéré sera rendu à la fin du mois.

B.J.

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