Tenir compte des besoins liés à l’évolution du tissu socio-économique local et offrir des formations certifiantes à des stagiaires bien souvent au profil précaire au moyen d’un vrai contrat renouvelable, telle est la formule non pas miracle mais bien étudiée du service d’insertion Mlézi Maoré. Dans cette ère où l’art de la critique acerbe excelle notamment via les réseaux sociaux, l’association contre vents et marées de sa propre actualité garde la transparence du cap et de l’envie dans ses nombreux combats et actions menés depuis historiquement près de 20 ans.
L’indispensable expérience requise
Partie de l’implacable constat que le manque d’expérience était le frein majeur des jeunes en recherche d’emploi et ce, quelque soit le cursus en amont et leur motivation réelle, l’association Mlézi Maoré a eu l’idée, il y a maintenant 2 ans de cela, de lancer le vaste projet d’ouvrir un atelier et chantier d’insertion mécanique auto offrant ainsi enseignement concret et formation aux personnes ayant pour vocation de s’engager sur cette voie professionnelle porteuse en notre territoire.
Après les premiers chantiers d’insertion mis en œuvre en 2019, liés aux espaces verts, au bâtiment et par la suite à l’agriculture et la préservation du patrimoine forestier, c’est donc un 5ème chantier qui a vu le jour, en fin d’année dernière. Parmi les 5 stagiaires de cette toute nouvelle promotion, Mohamed Boura, 20 ans, issu de la filière mécanique du lycée polyvalent de Kahani qui n’a pu trouver embauche à la fin de sa scolarité : « J’ai effectué des stages durant ma formation mais la boîte qui m’accueillait ne pouvait pas me proposer de poste au motif que je n’avais assez d’expérience. À l’issue du contrat de cette formation certifiée et de l’accompagnement qui nous est offert, je bénéficierai d’arguments plus forts pour me présenter sur le marché de l’emploi ». Un marché de l’emploi tristement pointé du doigt au regard des dernières données statistiques officielles de notre département qui indiquent une augmentation du taux de chômage s’élevant désormais à 34%, touchant principalement, et sans surprise, les jeunes.
Le CDDI
Bénéficiant d’un agrément, ce contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI) se veut de 26h semaine, étalé minimum sur 4 mois renouvelables — jusqu’à 24 mois au besoin. Sous la juridiction de l’encadrant technique d’insertion et responsable formation qu’est Toni David Smitt, cette formation offre une partie purement pratique qui s’effectue en garage, mais également un enseignement théorique poussé ainsi qu’un accompagnement insertion, sanitaire, social et économique tout comme des ateliers d’alphabétisation.
« Notre mission est de lever tous les freins liés à des potentielles problématiques parallèles qui peuvent affecter la recherche d’emploi du salarié stagiaire. Notre but est qu’il monte en compétence tout au long de sa formation », précise Brahim Dasse, chef du service SIAE. Une formation qui vise avant tout l’utilité à moyen-long terme afin de pousser ces futurs salariés qualifiés sur le marché également de l’entreprenariat pour devenir patrons de leur(s) propre(s) structure(s) et employeurs de salariés stagiaires. En somme une économie solidaire pérennisée par le principe de la valorisation qui lutte contre l’avenir tout tracé d’une jeunesse bien souvent en roue libre.
« Et on ne va pas s’arrêter là… », indique fièrement la présidente de l’association, Hanima Ibrahima, lors de son discours officiel d’inauguration, avant de poursuivre « notre mission est de sortir ces jeunes de la rue et notre force est l’engagement groupé de nos équipes ».
Un garage plein d’avenir
Dédié exclusivement à la maintenance du parc automobile de l’association et des professionnels partenaires du milieu social, en qualité de chantier d’insertion, ce garage présente tous les outils récents et nécessaires en lien avec la réparation purement mécanique des véhicules mais aussi leur entretien technique, périodique et même pneumatique et ce, dans le respect des règles environnementales imposées par la DEAL — direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement — notamment dans l’approche du traitement des déchets mécaniques.
Ayant aspiration à ce que cette structure s’auto-alimente en terme de rentabilité et modèle économique viable sur une période de 3 à 4 ans, l’idée sera à l’issue de transformer sa forme juridique en statut d’entreprise d’insertion, qui se veut un peu moins subventionnée au niveau des aides mais qui présentera l’avantage d’ouvrir ses prestations aux particuliers ayant de faibles revenus, dans le cadre similaire d’un garage de type solidaire.
L’importance de l’activité économique par l’insertion
Cette approche d’insertion à la fois privée de par l’initiative, et publique de par les aides et fonds soulevés, où il existe une mince frontière entre l’encadrement de jeunes par la formation et la création de richesse, représente une réelle plus-value pour notre département qui se veut justement différente d’un modèle stricto sensu lié au système de l’éducation nationale. Une formule relativement récente qui fait ses preuves et pour lequel le gouvernement confirme son soutien « pour faire face au défi de l’insertion professionnelle de ceux qui sont le plus éloignés de l’emploi », précise le préfet de Mayotte « nous sommes passés de 14 structures en 2019, à 21 en 2022 avec 6,4 millions d’euros de financement initiaux qui s’élèvent désormais à près de 9 millions d’euros pour soutenir ces activités ». Des activités qui représentent actuellement, toutes structures confondues, près de 560 emplois* directement liés à l’activité économique par l’insertion et qui tendent à voir leurs respectifs financements se diversifier justement par l’apport de clients.
MLG
* Paysage actuel de l’insertion à Mayotte (données préfecture) : 13 chantiers d’insertion, 3 associations intermédiaires, 3 entreprises d’insertion et 2 entreprises de travail temporaire d’insertion.