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Mahamat Saleh Haroun, le plus grand cinéaste Africain, à la rencontre des Mahorais

La semaine prochaine, Mahamat Saleh Haroun, le réalisateur tchadien, digne représentant du continent Africain, viendra à notre rencontre. À travers plusieurs lieux de rendez-vous, il suivra tout un programme, initié par les enseignants de la section cinéma du Lycée des Lumières, en partenariat avec le rectorat.

On pourrait parler d’un évènement extraordinaire ou totalement exceptionnel pour notre île. La venue très prochaine de Mahamat Saleh Haroun, originaire du Tchad et figure importante du cinéma, ne pourra qu’en ravir plus d’un. Il y aurait beaucoup à dire pour introduire cet artiste, tellement son parcours est hors norme. Pionnier du nouveau cinéma Africain, il est aussi passé par des fonctions de hautes importances.

Après des études de cinéma, puis de journalisme en France, il est revenu dans son pays à plusieurs reprises pour réaliser tous ces films – à l’exception d’Une Saison en France en 2017. Il a aussi écrit deux livres édités chez Gallimard et fut rédacteur dans plusieurs quotidiens régionaux français. Mais il est également passé par la case politique. Pendant un an, il fut ministre de la culture de son pays d’origine. C’est au cours de son mandat qu’il instaura le mois du livre et de la lecture. Cette évènement a depuis toujours lieu, chaque année en novembre.

Un parcours honorifique

Le travail de Mahamat Saleh Haroun a très vite été salué. On peut parler de la qualité de son écriture et la délicatesse de ses récits. Mais aussi de la sobriété de sa réalisation, à la fois très soignée et naturaliste. Une forme peu commune dans le cinéma actuel, bien que l’on puisse le considérer comme un Ken Loach Tchadien. Cinéaste des grands espaces, Mahamat Saleh Haroun, raconte des histoires simples, souvent portés par des gens de la réalité. Il aime mélanger les professionnels et les amateurs dans un seul et même projet. Mais il est aussi très fidèle à ceux qui l’accompagnent dans sa création. Depuis son troisième long métrage, Marie-Hélène Donzo a montée tous ses films. La monteuse belge est avant tout connue pour son travail auprès Frères Dardennes (les cinéastes les plus primés du Festival de Cannes). Le célèbre musicien sénégalais, Wassis Diop, a composé la musique de ses trois derniers films. Et depuis Hissein Habré, une tragédie tchadienne, l’image est éclairée par Mathieu Giombini.

Mahamat Saleh Haroun, réalisateur et ancien ministre (© Arte France Cinéma)

En 1999, sort son premier long métrage, Bye Bye Africa. Un documentaire évidemment très personnel et unique. Il devient alors le premier réalisateur Tchadien de l’histoire. L’œuvre est récompensée à la Mostra de Venise par le Prix du meilleur premier film.

Mahamat Saleh Haroun est aussi l’un des rares réalisateurs d’Afrique à recevoir une prestigieuse décoration. En effet, il est fait chevalier de l’ordre des arts et lettres en 2008.

Son quatrième long métrage, Un Homme Qui Crie, est un conte moderne autour d’un maître-nageur dans un hôtel de luxe et son fils, séparés par la guerre civile au Tchad. Tourné dans des conditions très réalistes, le film a été récompensé par le Prix du Jury au Festival de Cannes en 2010 et a reçu le Prix Robert Bresson à la Mostra de Venise. Distribué par Pyramide, il a fait plus de 60 000 entrées. Ce qui est un joli succès pour un film africain, avec aucune tête d’affiche et un sujet dramatique.

L’année suivante, Thierry Frémaux, délégué général du festival de Cannes, invite le cinéaste à rejoindre le jury de la compétition officielle. C’est entre autre aux côtés du président Robert De Niro, qu’il remettra l’une des plus belles palmes d’or de ces vingt dernières années, à The Tree Of Life de Terrence Malick. Le cinéaste Tchadien est revenu dans la compétition officielle du prestigieux Festival de Cannes en 2013 et 2021, pour Grigris et Lingui, les liens sacrés. Les films n’ont pas été primés, mais largement plébiscités par la presse internationale.

Lingui, les liens sacrés, son dernier film en date, est aussi une grande première pour Mahamat Saleh Haroun. Il consacre l’histoire, à l’inverse des précédents films, à des femmes de son pays. Il s’explique d’ailleurs sur ce choix : « Ce sont des femmes célibataires, veuves ou divorcées qui élèvent seules des enfants. Souvent mal vues par la société, elles se débrouillent pour s’en sortir. « J’ai connu une de ces femmes qui s’est retrouvée seule avec ses enfants après la mort de son mari. Pour gagner sa vie, elle s’est mise à récupérer des sacs plastiques pour fabriquer des cordes et les vendre. Je voulais rendre compte de la vie de ces femmes un peu marginalisées mais qui ne se vivent pas comme des victimes. Ce sont les petites héroïnes du quotidien. »

Les moments forts

« Lingui les liens sacrés » met en lumière des femmes appelées à ne compter que sur elles-mêmes

L’arrivée du cinéaste sur notre territoire, est marquée par plusieurs rencontres culturelles, bien organisées :

Lundi 3 Octobre à 18h30, il sera à la bouquinerie de Passamainty pour une rencontre-dédicace, principalement de son dernier livre, sortie cette année : Les Culs-Reptile.

Mardi 4 Octobre à 20h, se tiendra au Pôle Culturel de Chirongui, une projection-débat avec son dernier film : Lingui, les liens sacrés.

Enfin, à côtés d’ateliers avec les lycéens étudiants en cinéma, le vendredi 7 Octobre, une grande master-class aura lieu à l’Amphithéâtre du Lycée des Lumières. Ce dialogue animé par Gilles Collin, enseignant-référent de la classe cinéma, sera suivi d’une projection de Lingui, les liens sacrés.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, les deux derniers événements déjà très attendus par certains informés, s’annoncent presque complet. Il faut donc penser à réserver ou bien venir en avance aux divers rendez-vous. Mais devraient certainement s’ajouter d’autres rencontres, dont une invitation au Journal Télévisé de Mayotte la 1ère.

On sait déjà en tout cas, que l’impatience nous guette. « C’est une grande fierté d’avoir parmi nous, un cinéaste aussi important », exprime Gilles Collin, ne pouvant cacher sa joie.

Nous sommes nombreux à voir cette petite semaine cinématographique, comme un pas de plus pour faire avancer le très fragile secteur du cinéma local. Cette promesse est encore dans l’esprit des jeunes mahorais passionnés, qui ne perdent pas le goût de l’ambition.

Germain Le Carpentier

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