Le village au nom très campagne Hexagonale de Montlegun, dans la commune de Koungou, est un exemple à ne pas suivre. Il y a 15 ans, quelques familles ont commencé à y implanter des cases en tôle, puis, ce fut carrément un hameau qui s’est constitué, un chemin a été tracé, mué en route d’accès pour les véhicules, et des raccordements aux réseaux ont été bricolés. Se greffent alors immanquablement des problèmes de sécurité des branchements, des implantations illicites de cases qui n’hésitent pas à défier de fortes pentes, etc. Autant de risques que la commune de Koungou entend anticiper désormais, en se dotant de médiateurs fonciers.
C’est en collaboration avec la préfecture et Action logement (ex-collecteur du 1% logement), que la mairie a décidé de s’attaquer à l’anarchie ambiante en matière d’urbanisme. « Nous avons pensé qu’il fallait faire passer des messages auprès de nos administrés pour instaurer les bonnes pratiques dans un domaine, le foncier, où ils manquent d’informations », nous explique Mélanie Guilbaud, DGA Développement urbain à la mairie de Koungou.
Pour communiquer, dans un premier temps il a été envisagé d’avoir recours aux cadis, mais un mode plus dynamique a été choisi, celui d’aller vers les population en étant mobile : « Nous avons noué un partenariat avec la préfecture pour redéployer sur la thématique foncière, des agents de médiation qui l’étaient sur la sécurité. Ils circulent en voiture avec une enceinte embarquée dans les six villages de Koungou, et s’arrêtent pour échanger avec les habitants » Cinq jeunes ont donc été recrutés en contrat PEC (Parcours Emploi Compétence) sur un an, et encadré par la Politique de la Ville.
« Aide toi, le Ciel t’aidera »
Une action financée par l’organisme Action logement, en quête de terrain, « en réponse au manque de visibilité sur le foncier alors que les besoins en logements sont importants. »
Et les messages diffusés par haut-parleurs mettent en garde sur plusieurs risques, qui vont de l’escroquerie au bâti en zone de danger. « Nous voulons interpeller et informer. Comment savoir qui est propriétaire foncier quand on vise un terrain ? Comment se renseigner sur ce qui est possible de faire ou pas quand on est propriétaire d’un terrain, par exemple, ne pas construire au bord d’une ravine ? Et mettre en garde contre les arnaques, en expliquant qu’il ne faut pas verser d’argent au propriétaire avant de passer devant le notaire, etc. » Et des exemples, Mélanie Guilbaud en a plusieurs, dont « cet homme qui a fait fonctionner la tontine (la musada), et qui a versé toutes ses économies à un propriétaire peu scrupuleux qui a gardé le terrain ».
Les dangers des constructions périlleuses, la commue connaît, pour avoir été le théâtre d’un drame en janvier 2018, un glissement de terrain avait emporté la case d’une famille occasionnant le décès des 5 occupants, « beaucoup pensent que Dieu les protège. Il peut ne rien se passer pendant plusieurs années, et une forte pluie suffit pour provoquer de gros dégât ».
Avant les sanctions
D’autre part, le coût pour la collectivité en matière de rattrapage urbain, est conséquent : construire des routes après que les maisons soient installées, installer des réseaux sur des chemins qui ne laisse la place à aucune servitude alors que les pompiers ou la collecte des déchets doivent passer… C’est un des problèmes majeurs par exemple posé par les cases installées sur les hauteurs de Majikavo Dubaï, qui implique un élargissement de la route pour les camion de ramassage des déchets, qui se déverse alors sur la plage à chaque pluie.
Cela fait une semaine que le véhicule tourne et diffuse des messages de vulgarisation du droit dans ce domaine, et déjà les premiers résultats se font sentir, « beaucoup de gens viennent en mairie pour se renseigner. C’est ce qu’on cherchait. » Une étape d’information et de prévention avant que n’intervienne la police de l’urbanisme avec des sanctions.
Des spots TV vont être diffusés. De son côté, Action logement déroule son programme habitat en poursuivant son information sur les mécanismes à activer, notamment sur l’accès à la propriété, « et notamment sur les prêts à taux zéro ».
Une action innovante, qui permet de lutter contre la méconnaissance des droits dans un domaine où le coutumier a toujours régné, et où le notaire reste un personnage encore très éloigné du quotidien.
Anne Perzo-Lafond