Jacques Mikulovic a tout d’abord fait preuve de résilience face à la situation exceptionnelle que connait notre territoire concernant le manque d’eau. « C’est un facteur que nous ne maitrisons pas. Nous devons néanmoins garder le sourire et la bonne humeur. Il nous faut rester sereins car ce n’est que le début. Les trois mois qui viennent vont être difficiles, il y a beaucoup d’incertitudes…Nous devons trouver les bonnes solutions tout en faisant preuve de sobriété », a-t-il déclaré.
En effet, depuis lundi certains établissements scolaires ont connu des coupures d’eau de façon parfois aléatoire, à l’image du lycée Younoussa Bamana de Mamoudzou qui a dû fermer lundi dans la journée faute d’eau pour les sanitaires. « C’est une évacuation réussie, ironise le recteur. Ce contre temps est dû à des travaux pour le raccordement à l’eau. Le rétablissement doit se faire avec le circuit ancien », a-t-il précisé. Les élèves devraient ainsi pouvoir retourner en classe dès ce mercredi. Les établissements de Passamainty, de Kawéni et de Mgombani qui ne sont pas sur le chemin de l’eau devraient connaitre un retour à la normale d’ici le 15 septembre, « le temps d’effectuer les travaux de raccordement ». Concernant les établissements situés en Petite-Terre, il n’y a pas de changement à ce stade. Pour les écoles primaires, le recteur concède qu’une vingtaine d’entre elles ne sont pas encore équipées en cuves mais que cela devrait rentrer dans l’ordre dans les prochains jours.
« L’essence de notre mission c’est d’éduquer, instruire, transmettre »
Cette semaine est une semaine test pour voir si les cuves vont permettre de tenir 48 heures. Si ce n’est pas le cas rectorat pourra éventuellement mettre à disposition des cuves supplémentaires. « Le calcul est simple, indique le directeur académique du rectorat, Thierry Denoyelle : Nous comptons 10 litres par élève et par jour ». Aussi, un protocole a été anticipé au cas où il faudrait passer « en mode dégradé », pour reprendre les propos du recteur. « Nous voulons éviter les coupures intempestives pour les établissements ne se trouvant pas sur le chemin de l’eau.
Notre priorité est qu’il n’y ait pas de perte de l’apprentissage. L’essence de notre mission est d’éduquer, instruire, transmettre. S’il faut accueillir les élèves seulement 2h30 par jour nous le ferons afin qu’ils puissent faire au moins une heure de français et une heure de mathématiques. La crise de l’eau est un enjeu pédagogique », a soutenu Jacques Mikulovic. Le rectorat a ainsi distribué près de 117.000 gourdes de 600 ml à l’ensemble des élèves de l’île et réfléchit aussi à fournir du gel hydro-alcoolique dans les établissements scolaires. Cela représenterait 3.400 litres de gel par mois, mais cela à un coût…
Après avoir abordé la problématique de l’eau, le recteur a fait un premier bilan de la rentrée : « C’est loin d’être catastrophique ! Même si tout n’est pas parfait on ne s’en sort pas si mal comparé à certains établissements situés en métropole. Nous devons encore renforcer l’attractivité de ce département, mais aussi former plus d’enseignants sur ce territoire. L’avenir de Mayotte passera par le recrutement d’enseignants locaux », a-t-il insisté.
Des compétences en inadéquation avec les diplômes
A Mayotte même si les bonnes volontés sont là, il n’en demeure pas moins que le niveau scolaire des élèves est bien en deçà des standards nationaux, comme l’a rappelé Thierry Denoyelle : « Notre but commun est de mieux faire réussir les élèves de ce département, cela passe entre autres par une implication professionnelle des équipes pédagogiques et des chefs d’établissements. Car les résultats sont biaisés. Près de 75% des élèves âgés de 18 ans ont des difficultés en lecture lors des tests effectués durant la journée défense et citoyenneté (JDC). Or, plus de 75% des élèves de terminale générale ont obtenu leur baccalauréat. Il y a une différence notable entre les compétences et la réussite au diplôme. Nous devons peut-être repenser l’organisation de certains enseignements… »
En filigrane, derrière ce discours on comprend que les élèves mahorais sont surévalués par rapport à leur niveau réel. « Si on veut respecter nos élèves, on doit être exigeant avec eux et ne pas créer des illusions et des mensonges. Il faut sans doute arrêter le bidouillage des résultats et travailler davantage à la maitrise des savoirs fondamentaux. Il n’est pas normal que 75% de bacheliers de notre territoire aient des difficultés pour la lecture, s’agace le recteur. Certes Mayotte est l’académie qui a fait le plus de progrès ces dernières années mais on doit remettre de l’ordre en étant exigeant sur les l’acquisition des connaissances en français et en mathématiques ». Jacques Mikulovic veut ainsi créer une sorte d’électrochoc pédagogique et reste totalement ouvert aux nouvelles méthodes d’enseignement et à une liberté des professeurs pour transmettre les savoirs fondamentaux, car « Le progrès scolaire, c’est le passeport pour des perspectives d’avenir positives ».
B.J.