Sénat – Continuité territoriale, la parole est donnée aux représentants de l’océan Indien.
C’est depuis le Sénat, par retransmission directe et visioconférence que se déroulait ce jeudi 26 janvier 2023, une table ronde organisée par la délégation sénatoriale aux outre-mer, dédiée à l’étude des problématiques et aides à la mobilité, entre l’Hexagone et les départements ultramarins de la Réunion et Mayotte.
En qualité de maître de séance, par ordre de présence, les sénateurs Stéphane Artano (Saint-Pierre-et-Miquelon) et Micheline Jacques (Saint-Barthélemy) ont donc offert la parole alternativement aux respectifs représentants régional de la Réunion et départemental de Mayotte mais également aux hauts dirigeants de la Sécurité de l’Aviation Civile océan Indien (DSAC-OI) et des compagnies aériennes qui opèrent entre la métropole et notre région insulaire, permettant ainsi d’approfondir un état des lieux porté à la connaissance de la délégation. Un état des lieux global de tous les DROM et COM** qui sera présenté officiellement en février prochain au groupe de travail de Gérard Larcher, Président du Sénat.
Besoins cruciaux d’usage
Qu’il soit question de rendre visite à un parent éloigné, malade ou en fin de vie, de passer un concours, des examens médicaux précis, de trouver un lieu de stage pour la poursuite de ses études, un emploi, ou bien même de participer à des manifestations sportives ou culturelles, autant de raisons de comprendre le caractère fragile, isolant et vulnérable de l’insularité, en comparaison d’une facilité logistique et tarifaire propre aux territoires métropolitains.
Piloté par LADOM*** et financé par l’État, ce dispositif d’aide à la continuité territoriale* (ACT), d’un délai de carence de 3 ans entre chaque demande, s’adresse aux résidents d’outre-mer, de tout âge, dont le revenu familial est inférieur à 11 991 €.
Délivré sous forme de bon d’achat, il permet de prendre en charge une partie du billet auprès des agences de voyage ou des compagnies aériennes partenaires sous un principe de DSP (Délégation de Service Public). Le montant de ce bon, différant d’un territoire à l’autre, est fixé à 440 € pour Mayotte.
Pour l’année 2021, le budget total des bons réalisés sur notre île s’élevait à 378 835 €.
La Réunion, grande sœur rebelle
Au regard de l’article 1803 du code des transports stipulant que« l’État est le seul responsable légal de l’ACT entre ses territoires ultramarins et la métropole », l’ancienne majorité régionale s’était substituée à L’État et avait rompu ses liens en 2015. La mise en place d’un dispositif volontariste local et électoral s’était alors actée dans une approche d’autofinancement. En 2016, cette même majorité renforçait son dispositif dans le sens Hexagone-la Réunion ce qui a officiellement été déclaré illégal par le Tribunal Administratif « mais qui a eu le positif impact d’apporter une pleine refonte en 2021 du dispositif de continuité territoriale afin d’agir en complémentarité de l’État » notifie Lorraine Nativel — Vice-présidente déléguée à la lutte contre l’illettrisme et aux savoirs de base, à la continuité territoriale et au soutien des jeunes en mobilité, conseil régional la Réunion — et de mettre en oeuvre un système plus en adéquation avec les spécificités et besoins solidaires locaux en revalorisant le montant des aides attribuées antérieurement.
Outre le ralentissement physique et économique justifié d’une année à l’autre pour motif de crise covidée, cette fronde juridique de nos voisins réunionnais a tout de même eu pour résultats notables de passer de 3 452 bons distribués en 2021 à 23 704 bons en 2022 et de bénéficier, depuis le 1er avril de cette même année, d’un système de soutien complémentaire d’aide LADOM-Conseil régional en fonction de la tranche du revenu déclaré.
Des aides jugées encore trop insuffisantes et des craintes à venir
Au regard d’une inflation post-crise pleinement palpable, d’une continuité territoriale encore perfectible en bien des points et d’un récent arrêt de la Cours administrative d’appel de Bordeaux datant du 12 décembre 2022, risquant de remettre en cause certains dispositifs et la compétence même des collectivités territoriales, les départements de Mayotte et la Réunion souhaitent pousser l’élargissement des conditions d’accès aux dispositifs ACT, en créant des passerelles d’aides cumulables et renouvelables autant de fois qu’au besoin pour lutter, par exemple, contre l’exode et la désertification des territoires qui voient leur jeunesse partir étudier et/ou trouver des stages en métropole et qui ne peuvent revenir, faute de moyens (pour le moment, il est question que d’une aide annuelle dans le cadre du passeport mobilité).
Du côté médical mais également mortuaire, il est fait état d’un besoin de réévaluation voire de création d’aide (pour le moment à la charge unique de la région ou du département) notamment au regard de l’accompagnant qu’il s’agisse d’un parent qui conduit son enfant pour examen médical en métropole ou bien d’un proche qui suit le rapatriement de son défunt qui sera inhumé dans son département d’outre-mer d’origine. Pour information, 12 640 € ont été dépensés en bon ACT par LADOM de Mayotte en 2021, concernant le dispositif lié à l’aide obsèques.
Il est également notifié des demandes d’aide pour les sportifs, les artistes ainsi qu’une mesure dérogatoire de confort pour les personnes âgées ou en situation de handicap pour qu’elles puissent bénéficier, sur prescription médicale, d’un bon de surclassement dans le cadre de l’ACT.
Le coût exorbitant des billets sur la desserte aérienne mahoraise
Qu’il soit question de venir sur Mayotte ou de repartir, le constat est le même, le prix des billets est encore bien trop élevé pour nombre de familles mahoraises.
« Bien qu’il n’y ait pas d’explication officielle à la différence significative qu’il existe entre les bons émis et les bons consommés, on peut tout de même y voir un motif économique » nous indique par téléphone Mohamadi Madi Charif, directeur de LADOM Mayotte. En effet, il est facile de comprendre que certaines familles ne peuvent prétendre à compléter l’achat du fameux sésame aérien en plus du bon ACT attribué par LADOM.
Pour preuve en 2021, 1 209 bons ont édités et seulement 869 consommés. En 2022, rebond de l’activité économique et de la mouvance, il s’agissait du ratio 3 734 bons émis pour au final 2 850 consommés. Un bon obtenu en 3 jours, sous réserve d’un dossier complet, d’une validité de 4 mois et qui peut être utilisé au 31 décembre de l’année d’édition. Malgré cette réactivité administrative certaine, la fautive justification des prix élevés serait liée, selon Bibi Chanfi — 5e vice-présidente chargée du développement économique et de la Coopération décentralisée au sein du conseil départemental de Mayotte — à « l’absence de concurrence réelle et une alliance commerciale implicite entre les rares compagnies aériennes présentes dans l’espace aérien mahorais » dénonce-t’elle lors de sa prise de parole devant la délégation. Un traffic aérien autant indispensable que lucratif en approche inter-iles (Mayotte, Madagascar, La Réunion) grâce à la dominante mouvance des résidents mahorais sur ces lignes (58% du traffic aérien entre Mayotte et la Réunion). Des compagnies limitées au nombre de 3 : Corsair, Air Austral et Ewa (cette-dernière, bien qu’indépendante, est tout de même contrôlée à hauteur de 52% de son capital par Air Austral). La proposition du conseil départemental de Mayotte de reprendre le capital de la compagnie concernée a une nouvelle fois été évoqué publiquement lors de cette table ronde tout comme la formulation du souhait d’une fréquence plus conséquente au niveau des rotations régionales.
Bilan de l’activité aérienne
Mayotte – La Métrople :
En termes de chiffres, concernant la saison IATA**** hiver (octobre à mars), c’est une augmentation du nombre de sièges proposés passant de 35 500 en 2019-2022 à 76 000 pour l’hiver 2022-2023. Pour la saison IATA estivale (mars à octobre), il est question de 85 000 sièges en 2019-2022 contre 145 000 en 2022-23.
Cette augmentation s’explique par le retour de la compagnie Corsair dans l’espace aérien mahorais soit près de 220 000 sièges proposés sur l’année 2023 pour la ligne Mayotte-Métropole.
Six rotations hebdomadaires en période creuse et le double en période de pointe.
Mayotte – La Réunion :
Une offre de sièges augmentée de 50% par rapport à la période pré-Covid.
Sur la saison IATA hiver 2019-2022 : on est passé de 94 000 sièges à 139 000 pour 2022-2023. Pour la saison estivale IATA : 2019-2022, 120 000 sièges à 179 000 siège en 2023 « soit près de 320 000 sièges offerts sur la connexion Mayotte – la Réunion.
En terme de fréquence, nous sommes donc à 9 rotations hebdomadaires en période creuse et 23 rotations hebdo. en période de pointe. (source DSAC-OI)
Ode au pétrole lampant
Le droit européen impose dans une certaine mesure une réglementation tarifaire aux compagnies entre la métropole et les territoires d’outre-mer notamment au regard de la DSP. Du côté des respectives directions des compagnies précitées, tour à tour il a été fait état des problématiques et limitations rencontrées justifiant en majorité le coût des billets propre à Mayotte. L’augmentation du prix du kérosène en 2022, comme effet rattrapage des suites de la crise sanitaire et des pertes financières, est le motif majeur de cette inflation. « Il est à noter, en moyenne, que 30% des dépenses des compagnies sont directement liées à l’achat du fuel » précise Joseph Bréma, président-directeur général d’Air Austral.
Ces compagnies justement qui dénoncent une tarification 2 fois plus élevée du fuel à Mayotte en comparaison du tarmac réunionnais où il existe 4 opérateurs et où, par légitimité, la concurrence tend à faire baisser le prix du gallon.
A cela s’ajoute un lien direct avec la fluctuation du prix du dollar et la nécessité pour ces compagnies d’une maintenance sur plate-formes et sites internationaux où la devise est justement en dollar. Un dollar qui, rappelons-le, a été réévalué à la hausse depuis ces dernières années.
Concernant la question des rotations et des escales obligatoires au départ de Mayotte direction l’Hexagone, la spécificité technique liée aux contraintes de la piste courte mahoraise a été unanimement évoquée par les différents dignitaires aériens en présence, portant ainsi à la connaissance de l’ensemble de la délégation aux outre-mer, les implacables limites rencontrées.
Au regard des accusations implicites de collaborations intéressées entre compagnies, Julien Houdebine, directeur commercial de Corsair a rétorqué « notre suspension temporaire pour raison technique n’a aucunement lieu d’être interprétée comme un accord commercial de non concurrence. Ça n’est absolument pas le cas et je peux vous assurer que la concurrence entre Mayotte, la Réunion et la Métrople est vive… ».
« Des exposées clairs ! »
C’est ce qu’a conclu Catherine Conconne, sénatrice de Martinique et rapporteur auprès de la délégation des outre-mer, apportant poids et légitimité au dispositifs ACT déjà en place et mettant en avant la diversité des territoires et leurs respectives singularités des plus complexes. De manière globale, baissant les armes et mettant à mal les idées initiales préconçues, notamment les tensions connues entre le département de Mayotte et ses opérateurs aériens, il a été confirmé qu’il était grand temps que l’État prenne pleinement ses responsabilités anticipant et incluant aussi des compensations financières auprès des compagnies aériennes car augmenter le coût de la prise en charge des bons de transport dans le cadre ACT n’est pas une solution concrète au regard des différentes problématiques exposées précédemment. Il n’est plus question de se renvoyer la balle mais bien d’avancer dans la même direction.
La Corse dans l’œil de Mayotte…
Précurseur et à l’origine quelque part de la création du fonds de continuité territoriale en 1976, la Corse fait office de modèle et de recule au regard de ses problématiques insulaires initiales en matière de transport de marchandises et de passagers. Des problématique de desserte tant sur le plan aérien que maritime… Et c’est bien sur ce point que Bibi Chanfi souhaite appuyer son rapport qui sera remis à la délégation dans les jours à venir. Jointe par téléphone après son discours au Sénat, via visio-caméra, la vice-présidente a tenu a souligner que le traffic inter-iles Petite-Terre et Grande-Terre, au moyen de la barge, représente un coût annuel de plus de 12 Millions d’euros soutenu exclusivement par le Conseil départemental. La prise en charge par l’État de cette dépense dans le cadre d’une incontournable (mini) continuité territoriale permettrait de dédier ce faramineux budget en d’autres priorités sur notre département.
MLG
* L’ Aide à la Continuité Territoriale (ACT) s’adresse aux résidents d’outre-mer (sans limite d’âge), désireux de se rendre en France hexagonale. Il se caractérise par l’octroi, sous conditions de ressources, d’un bon de réduction valable (avant le 31 décembre de l’année en cours).
Le montant de ce bon dépend du territoire de résidence.
** Départements ou régions français d’outre-mer (DROM) et les Collectivités d’outre-mer (COM).
*** L’Agence de l’outre-mer pour la mobilité
**** L’Association du transport aérien international
Faute de toit, les familles ont adopté celui sécurisant des centres d’hébergement au sein des établissements scolaires. Qui manquent de tout, eau, nourriture, et sécurité.
Face au marasme provoqué par Chido, les urgences sont nombreuses. Approvisionnement en denrées alimentaires, eau, électricité, sécurité, comme annoncé, la préfecture émet régulièrement des points de situation à destination de la population.
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