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vendredi 29 mars 2024
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Mayotte en panne de commande publique : de multiples causes

L'IEDOM à Mayotte
L’IEDOM à Mayotte

Ce n’est pas la première fois que nous écrivons que la France a vendu Mayotte à l’Europe pour pas grand chose. Pour une enveloppe de fonds européens renégociée à la baisse et acceptée par François Hollande, « de toute manière, ils n’arriveront pas à les consommer ! », lâchait-on. Comment pourrait-il en être autrement sur un territoire non structuré, en infrastructures (routes, eau potable, assainissement) et en compétences humaines, mais à qui on demande de relever le défi du pointillisme des fonds européens ?

Le dernier rapport de l’IEDOM est à cet égard éloquent. Dans son panorama de l’économie mahoraise, il dresse à la section 3 consacrée aux politiques publiques, la liste des principaux besoins : les infrastructures, le logement, l’assainissement, l’environnement, le désenclavement de l’île, le développement économique, l’éducation et l’emploi.

Le peu qui a été fait a su tirer bénéfice des Fonds européens de développement (Fed) passés, que nous avons consommés à peu prés correctement. Etant donné les enjeux, on se tourne avec espoir vers les deux grosses enveloppes promises depuis que Mayotte est passée RUP, Région ultrapériphérique européenne en 2012. Et là, on déchante.

La page blanche du conseil départemental sur le CPERConseil départemental drapeaux

Le Contrat de projet Etat-Région (CPER) de 378,5 millions d’euros qui court sur 2015-2020, est sous-consommé. L’IEDOM a réceptionné les chiffres des investissements de la préfecture, 51%, soit 193 millions d’euros. Pas ceux du conseil départemental qui ne les a jamais livrés, alors qu’il devrait participer à part quasi-égale de 49%, soit 185,5 millions d’euros.

Sur les 8 volets thématiques prioritaires retenus au CPER, 2 n’ont encore fait l’objet d’aucun engagement du côté de la préfecture, le développement de la recherche et de l’innovation et le numérique.

Sur les 118 millions d’euros qui doivent être alloués par elle aux infrastructures de base, 16 millions ont été engagés*, soit 13%, seulement 568.000 euros réalisés, soit 0,5%… En matière d’aménagement urbain, sur 12,6 millions d’euros, seuls 2 millions d’euros ont été engagés, et 46.000 euros dépensés. En gestion des ressources énergétiques, sur 3,6 millions d’euros, la moitié ont été engagé, et 190.137 euros dépensés. Idem en matière de cohésion sociale, où 8% ont été réalisés, et 20% d’engagés.

Mayotte, 7ème région de France en programmation

Les routes nationales et départementales au programme
Une île en déficit d’infrastructures

Un taux moyen d’engagement de 15,4% et d’exécution de 2,9% fin 2016 du côté de l’Etat. Faible parce que dépendant de sa contrepartie du conseil départemental qui n’est pas débloquée. Des « données non disponibles » en forme de point d’interrogation. Souvenons nous que l’absence de la partie départementale avait plombée le dernier contrat de projet, en particulier sur les travaux d’infrastructure d’eau potable…

Du côté des fonds européens, la situation catastrophique est en voie d’amélioration. « Les services de la préfecture n’ont pas été en mesure de nous communiquer les données au 31 décembre 2016 », peut-on lire en bas de page 61 du rapport annuel. Or, c’est elle, en tant qu’autorité de gestion qui supplée le Département, qui doit les fournir.

L’IEDOM doit donc se contenter des chiffres 2015, avec une programmation de 10,9% de l’enveloppe globale de 320,44 millions d’euros. Le JDM a pu obtenir les chiffres 2016, et même tout début 2017, après avoir contacté Pierre Papadopoulos, le nouveau SGAR, le Secrétaire général aux Affaires régionales de la préfecture. « En terme de programmation, nous sommes la 7ème région de France », se réjouit-il.

Retrait de l’agrément à la préfecture

La Préfecture de Mamoudzou
La Préfecture de Mayotte

Début 2017, la programmation du fonds structurel FEDER était de 35%, de 17% sur le FSE (social), 30% sur le FEADER (agricole), « sur le FEAMP (maritime et pêche), pratiquement rien », explique-t-il. Nous n’aurons pas les taux de réalisation, « cela ne sert à rien de les donner, car beaucoup sont en cours de paiement et nous avons de gros projets, long à faire aboutir comme l’hôpital de Petite Terre ». On comprend que le pourcentage d’exécution est encore faible.

Comment pourrait-il en être autrement. En l’absence de résultats probants en matière de gestion de fonds européens, l’agrément avait été retiré à la préfecture en 2014. La valse des SGAR (Secrétaire général aux Affaires régionales) qui en avaient la charge n’y est pas pour rien, et il se murmure du côté de la maison Département qu’ils auraient eu avantage à en conserver la gestion comme dans les autres RUP, « quitte à faire venir un cabinet spécialisé de Bruxelles. Au moins, nous aurions avancé. »

Pas d’agrément, pas de chèque

Daoulab Ali Charif, économiste de l'IEDOM
Daoulab Ali Charif, économiste à l’IEDOM

Car l’impact est de taille, sans agrément, la préfecture peut engager et promouvoir les projets, mais n’a pas l’autorité pour les payer, « seulement les avances, tout ce qui est réalisé », explique le SGAR qui se veut rassurant, « l’agrément est en cours d’approbation, et la machine est relancée ».

Quel avenir donc pour la commande publique avec ce sombre tableau ? Difficile de le dire. Un comble quand on sait que le secteur public représente plus de la moitié du PIB de l’île, et que sa masse salariale est payée par nos impôts, sans le résultat escompté donc. Le BTP qui dépend de cette commande publique, souffre, et alors qu’une planification des investissements de l’Etat ou des collectivités, pourtant souvent demandée, n’est toujours pas d’actualité.

Mieux, c’est le secteur privé, pourtant malmené, qui montre l’exemple et continuent à y croire. « Les entreprises maintiennent leur volonté d’investir et de développer leur activité », indique Daoulab Ali Charif, économiste à  l’IEDOM, en utilisant le joli mot de « résilience », pour traduire leur capacité à encaisser les chocs et à rebondir. Surtout sur les secteurs de la téléphonie mobile et de la grande distribution, en réponse à une donnée jusque là infaillible : c’est la consommation des ménages qui porte la croissance à Mayotte.

Conclusion : si le secteur public faisait le job pour lequel on le paie, et lançait les grands chantiers programmés, les entreprises sauraient rebondir pour devenir un relais de croissance.

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

* Première phase du processus des dépenses

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