Il précise quelles sont les teneurs actuellement détectées, et celles autorisées par l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Les taux de manganèse retrouvés le 22 novembre dans les villages concernés* sont compris entre 13 μg/l et 106 μg/l, soit « au-delà de la valeur maximale admissible fixée par l’ANSES à 60 μg/l ». Comme nous l’avions expliqué, la SMAE a mélangé d’autres sources approvisionnement à celle produite par l’usine de Bouyouni, ce qui a eu pour conséquence mécanique de faire chuter cette teneur en manganèse.
Pour ce qui est des recommandations, le message est plus flou. L’ARS rappelle que le communiqué de restriction des usages en eau n’a concerné que les enfants de 0 à 4 ans, mais indique également que d’autres personnes pourraient être fragilisées par cet apport exagéré de manganèse pour ne pas l’éliminer correctement, » comme les personnes atteintes de maladies ou de malformations hépatiques et les personnes anémiques ». Mais aucune recommandation précise n’est notée.
Après avoir sollicité ses services, et en résumé, l’ARS nous précise que des précautions doivent être prises chez ces personnes fragiles, chez les jeunes enfants, ainsi que chez les personnes âgées, « qui semblent plus sensibles aux effets du manganèse, étant donné la fragilité de leurs cellules neuronales et leurs mécanismes d’homéostasie efficaces ».
Un thé aromatisé au manganèse
L’ARS évoque par ailleurs la présence de haute teneur en manganèse dans de nombreux aliments : « Le manganèse constitue l’un des minéraux les plus abondants dans l’environnement. C’est un oligo-élément essentiel au fonctionnement du corps humain. L’air, l’eau et le sol peuvent être source d’exposition au manganèse, mais il est reconnu que les aliments constituent le principal apport (les grains entiers, le thé, les noix et les légumes sont les sources les plus importantes). Par exemple, une portion d’ananas (82 g) contient environ 800 μg de manganèse. Une tasse de thé peut en contenir jusqu’à 500 μg. » On imagine qu’un thé préparé avec de l’eau du robinet dans les villages concernés, va faire péter tous les plafonds !
Ce manganèse se niche partout nous apprend l’ARS, « de nombreuses eaux minérales présentent des concentrations en manganèse relativement élevées pouvant aller jusqu’à plusieurs centaines de μg/l (…) au-delà des valeurs mesurées à Mayotte sur l’eau du robinet. C’est d’ailleurs une des raisons qui explique que ces eaux sont déconseillées pour les nourrissons. »
Si les jeunes enfants sont plus vulnérable à cet excès de manganèse dans leur eau, c’est en raison d’un rapport à leur poids, « et ils l’éliminent moins facilement ». « Les nourrissons représentent la population la plus à risque, en particulier s’ils sont alimentés exclusivement au biberon à partir de préparations commerciales reconstituées avec de l’eau du robinet présentant des concentrations élevées en manganèse. »
Les risques pour la santé
Comme nous l’avions mentionné, une absorption exagérée de manganèse peut avoir un impact sur « le Quotient intellectuel, le comportement, la performance scolaire, la mémoire à court terme, la dextérité motrice, la souplesse cognitive, etc. L’action du manganèse en excès se situe essentiellement au niveau du système respiratoire et du cerveau (hallucinations, manque de mémoire, problèmes aux nerfs) ».
La limite fixée par l’ANSES de 60 μg/l se base sur la valeur de référence pour les enfants de 0-4 ans. Pour les enfants de 4-7 ans, cette valeur de référence est de 190 μg/l. L’Organisation Mondiale de la Santé, quant à elle, recommande un plafond de 400 μg/l dans l’eau potable.
L’ARS reprend les explications fournies par la SMAE pour expliquer cet excès de manganèse, « cette période de vidange et de baisse du taux d’oxygène dans l’eau des retenues collinaires permet au manganèse piégé dans les sédiments d’être libéré sous forme soluble dans l’eau. Le traitement en place actuellement ne permet pas de retenir le manganèse au niveau de l’usine de production, ce qui entraine des concentrations au-delà des références de qualité sur l’eau distribuée ».
A.P-L.
* Bouyouni, Longoni, Kangani, Trevani, Koungou, Majicavo, Koropa, Majicavo Lamir, Hauts Vallons, Kaweni, Cavani, Cavani sud, Mandzarsoa, M’Tsapéré, Doujani, Ambassadeur, Passamainty-Ngnambo Titi, Convalescence, La Vigie, Labattoir et Dzaoudzi.