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Mamoudzou

Coconi, futur « centre touristique de la biodiversité et de l’eau »

Une visite au pied de la cascade de Barakani, une des plus hautes de l'île, a permis à la Fédération mahoraise des associations environnementales de parler de l'eau sous toutes ses coutures. Des tissus qui polluent les berges aux produits qui tuent les rivières en passant par un vaste projet touristique et éducatif qui ferait de Coconi une destination à part entière "pour tous les Mahorais".

Au pied de la cascade, la petite troupe composée de représentants du Département, de l’Etat, de la municipalité de Ouangani et de plusieurs associations environnementales, échange malgré le fracas assourdissant de l’eau qui tombe sur un tas de rochers, témoignage d’un vieil éboulement. A leurs pieds, d’innombrables déchets, de la fiole en verre à la bouteille de javel en passant par des tissus en pagaille. Chacun d’eux, à leur manière, participe à faire de la rivière, lieu de vie par excellence, un milieu stérile. La javel en tuant dans l’eau les alevins, larves d’insectes et autres écrevisses qui nourrissaient jadis les villageois. Les tissus, en recouvrant les berges, interdisant toute repousse de la végétation. Le reste, en faisant de ce site magique un endroit, disons le sans détour, dégueulasse.

En haut de la cascade, un homme accompagné de son jeune fils fait sa lessive, en utilisant un savon de Marseille, une des solutions les plus respectueuses de la rivière. En contrebas, l’eau blanchâtre et la mousse qui recouvre les rochers laisse à penser que le petit savon blanc de notre lavandier est loin d’être l’option privilégiée par tous les usagers du lieu.

Au sein du groupe, Ali Madi, président de la Fédération mahoraise des associations environnementales, pose le contexte, et plusieurs constats alarmants.

L’eau laiteuse témoigne de la pollution venant d’en haut de la cascade

« Tous les deux ou trois ans on amène les personnes sur les sites pour montrer comment ça avance. Ici, la cascade de Barakani, qui s’appelle aussi la cascade de Hapandzo selon le côté de la rivière où on se trouve, est polluée. On constate deux choses. Le débit d’eau est très faible, alors que jadis il y avait des inondations. Là les gens reviennent. Du coup il y a des coupes d’arbres, des gens commencent à y élever des zébus ce qui est inquiétant, on voit aussi des lavandières qui viennent laver des vêtements, et il y a les déchets qui vont avec car les gens qui lavent leurs affaires laissent des vêtements, des bouteilles de javel et même des canettes de coca. Nous avons une solution : l’association AHPE, Association Hapandzo pour la Protection de l’Environnement a le projet d’un lavoir, mais ça bloque car il faudra le raccorder à l’assainissement qui n’est pas totalement opérationnel. L’argent est là, il manque cette synergie pour se mettre d’accord. »

La synergie, c’est ce que la FMAE tente de créer autour du riche patrimoine naturel de Coconi. Après avoir constaté l’état déplorable de la cascade, le groupe s’est avancé jusqu’au conservatoire botanique, au dessus du pôle rural d’excellence dédié à l’ylang-ylang. Là, une maison en ruine résiste aux assauts de la végétations. Dans ces murs qui auraient vu grandir le président Ibrahim Soibahadine Ramadani, la FMAE a un projet à la fois culturel, touristique, écologique et éducatif.

Les lessives en rivière font des ravages dans l’eau et sur les berges

« Le projet c’est de faire ici la maison de l’eau et de la biodiversité. Sans parler de la crise de l’eau, c’est un patrimoine mondial. Pourquoi la biodiversité, parce que les oiseaux de Mayotte, on en voit de moins en moins, les serpents sont tués, les tortues pareil. Et les makis ? On veut dire aux gens que tout ça, toute cette biodiversité, ça tourne autour de l’eau. Il faut mettre l’eau au centre, car pour beaucoup de gens l’eau n’est qu’un consommable, mais ce n’est pas qu’un consommable. C’est une denrée à protéger. Et très rare ! Cette maison sera avant tout un endroit public. Notre vision, c’est celle d’une maison éducative et d’initiative. L’idée est d’amener l’ensemble des habitants de Mayotte à venir connaître l’eau, que ce soient les scolaires, les mémés, tout le monde, et à partager leur vision de l’eau. »

Un site « bien placé »

Sur ce site verdoyant, le président de la FMAE veut fédérer les forces et créer une dynamique.

« Au sein de notre personnel et de nos bénévoles, on a des compétences variées, il faut amener toutes ces compétences à travailler ensemble pour aider les collectivités à mener leurs missions, en créant une synergie. Le mal de Mayotte, c’est de toujours dire que c’est la faute de l’autre, mais c’est aussi à moi citoyen de savoir gérer l’eau, c’est une responsabilité partager, il faut construire une politique globale et que chacun apporte sa pierre. On veut travailler sur les solutions, pas sur ce qui bloque.

Ali Madi devant ce qui fut la maison du président Soibahadine, et qui pourrait devenir un site touristique central

Le projet est très bien placé. Historiquement Coconi c’est notre berceau en termes d’environnement, d’agriculture et de biodiversité. Il y a la maison de l’ylang, le lycée agricole, un jardin botanique, le conservatoire botanique et même un parc botanique spécialisé dans les plantes médicinales, un peu plus loin il y a une autre cascade, il faut un site touristique autour de la connaissance de l’eau et de la biodiversité mahoraise. Faisons de Coconi le centre de la biodiversité et de l’eau à Mayotte. »

Y.D.

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