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vendredi 29 mars 2024
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« Presque une maladie », ou la galère des familles monoparentales à Mayotte

Nombreuses et peu médiatisées en raison de leur isolement, les familles monoparentales font face à diverses difficultés, entre les questions d'argent, et le regard de la société "qui juge".

L’union départementale des familles mahoraises (Udaf) organisait ce jeudi une matinale d’information et d’échanges sur le thème des familles monoparentales et des mères isolées. Ce phénomène est peu visible, en raison de l’isolement vécu par ces familles, mais il prend de l’ampleur à Mayotte.
« Cette journée est organisée dans le cadre du grand débat national » explique Enrafati Djihadi, directrice de l’association. « L’idée était de réunir les familles pour faire remonter leur situation. Avec la journée internationale des droits des femmes (ce vendredi NDLR) c’était aussi l’occasion de consulter ces familles qui ne le sont pas souvent. »
Dans la salle de réunion des locaux de l’association installés à Doujani, quelques bébés s’agitent dans les bras de leur maman. « On a aussi quelques papas qui sont venus » sourit la directrice. La majorité des familles monoparentales concernent toutefois des mères isolées. « On a beaucoup de situations de séparation ou de décès d’un parent. Beaucoup de mères isolées n’ont jamais été mariées » indique Enrafati Djihadi qui note aussi « beaucoup de divorces ». Au final, « beaucoup de situations différentes » qui amènent des enfants à être élevés par un parent seul. Et les difficultés rencontrées sont tout aussi nombreuses que les causes. « Souvent elles ont beaucoup d’enfants et les prestations ne sont pas suffisantes, poursuit le responsable. Les principales difficultés rencontrées sont l’accès aux soins et à l’éducation, mais aussi acheter de la nourriture ou des vêtements pour l’école, payer le loyer. Les besoins vitaux sont une source d’inquiétude. »

 

Enrafati Djihadi voit la société mahoraise évoluer sur le plan familial

Selon la directrice de l’Udaf, ce phénomène devient visible notamment grâce à une augmentation des plaintes pour non versement de pension alimentaire. Un phénomène qui pose « la question de la place de l’autre parent. On a des papas qui n’assument les charges que tant que la maman est seule, mais qui cessent de payer quand un autre homme entre dans sa vie. Ils estiment que c’est alors à lui d’assumer les enfants, alors que ce ne sont pas les siens ! L’autre volet, c’est la question de la co-parentalité. On a des papas qui disent qu’ils voudraient juste voir leurs enfants. La question c’est, est-ce qu’on leur laisse leur place de parent, ou pas. En tant que présidente de crèche, je vois de plus en plus de papas qui amènent leur enfant, ça fait plaisir, on a avancé sur ce point. Il y a une évolution de la culture et des mentalités qu’il faut noter et valoriser. »

« La société nous juge »

Mère célibataire, Tanlimi Attibou élève seule son fils depuis près de onze ans. Elle a divorcé alors qu’il avait deux ans seulement. Outre les difficultés financières, la maman note un regard sévère de la société. « La difficulté, c’est que c’est un adolescent et que je dois le gérer seule. Or en tant que famille monoparentale, on n’a pas le droit à l’erreur, la société a tendance à flageller le parent qui est présent. Si je suis fatiguée, on me demande pourquoi, puisque je n’ai pas de mari. Si je veux sortir le soir ou si je me fais belle, on se dit que c’est pour trouver un homme. La société nous juge, être mère ce n’est déjà pas évident, mais mère célibataire, c’est presque une maladie ! »

Tanlimi Attibou dénonce le regard de la société et les jugements qui s’ajoutent aux autres difficultés

La jeune femme déplore « des aprioris négatifs car à Mayotte on est toujours fille de, ou femme de, ou mère de. » Elle dénonce aussi un frein pour ce qui est de faire valoir ses droits. « Le divorce ne doit pas empêcher le rôle de père, estime-t-elle. Mais porter plainte contre quelqu’un à Mayotte est vécu comme une extrême violence, c’est comme brûler sa maison. Beaucoup de familles tentent de dissuader des mères de poursuivre le papa qui ne paye pas. Le faire, c’est risquer de se mettre à dos sa propre famille et de se retrouver encore plus seule. »
Tanlimi Attibou note tout de même des bons côtés. En ayant maintenu de bonnes relations avec les grands-parents paternels, elle note un épanouissement de son fils qui la rend fière. Et le célibat lui a permis de reprendre ses études, et d’obtenir son métier actuel, dans le secteur social. « Il y a aussi des avantages » sourit-elle.

Y.D.

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